Vincent Bolloré honore une promesse faite au Conseil supérieur de l'audiovisuel le 24 septembre dernier. Ce jour-là, le nouveau patron du groupe Canal+ avait défendu son "impartialité politique" et avait nié toute volonté de censure tant de documentaires que des "Guignols". En signe de bonne foi, l'homme d'affaires breton avait annoncé la création d'un comité d'éthique chargé à l'avenir de "garantir, sous le contrôle du CSA, l'indépendance éditoriale comme celle de l'information" de Canal+.
Un peu plus de trois mois plus tard, ce dernier est finalement constitué. Il sera composé de six membres : trois hommes et trois femmes. Du côté des femmes, on retrouvera Jacqueline de Guillenchmidt (membre du conseil supérieur de la magistrature, ex-membre du CSA et du conseil constitutionnel), Colette Neuville (juriste, économiste et présidente de l'Association de défense des actionnaires minoritaires) et enfin Michèle Reiser (réalisatrice, productrice et ex-membre du CSA).
Pour les hommes, le groupe Canal+ a fait appel à Jean-Marie Colombani (journaliste, cofondateur et directeur de publication de Slate.fr mais aussi ex-président du directoire du "Monde"), à Jean-Marie Coulon (magistrat, Président honoraire de la cour d'appel de Paris) et enfin à René Ricol (expert-comptable et commissaire aux comptes).
Dans un article paru aujourd'hui, BFM Business met en cause l'indépendance de ce comité d'éthique. Soulignant qu'il est composé de personnalités "plutôt à droite", le site indique aussi qu'"au moins deux membres" de la nouvelle structure sont "déjà en relations d'affaires" avec Vincent Bolloré. Le cabinet de conseil co-fondé par René Ricol compte ainsi le groupe Bolloré parmi ses clients comme ne s'en cache pas son site web. BFM révèle aussi que cet expert-comptable est le trésorier général de la "Fondation de la 2ème chance" créée par l'industriel breton dont il serait un proche.
Toujours selon notre confrère, le cabinet de René Ricol serait aussi actionnaire de Slate.fr, le site de Jean-Marie Colombani dont l'un des autres actionnaires est Alain Minc, un très proche de Vincent Bolloré. Slate et "Direct Matin", le quotidien gratuit de l'homme d'affaires breton, sont d'ailleurs liés par un partenariat, le pure player fournissant depuis deux ans une page quotidienne au journal papier de Vincent Bolloré. Baptisée "L'oeil de Slate", cette page est même constituée le lundi d'un éditorial de Jean-Marie Colombani.
La création du comité d'éthique de Canal+ dont la composition a été transmise au CSA s'ajoute au "groupe de travail" mis en place par le gendarme de l'audiovisuel. Cette structure est pour sa part "chargé d'examiner l'ensemble des conséquences" du changement de stratégie et du virage éditorial mis en place par l'homme d'affaires depuis sa prise de pouvoir à Canal+.