
Le grand public l'a découvert avec son Ring en 1997. Mais cette fois, Hidéo Nakata ne nous offre plus un thriller d'épouvante tournant sur une malédiction qui prend la forme d'une cassette vidéo. Avec Chatroom, le cinéaste japonais fait reposer son thriller sur une menace bien plus concrète et qui s'inscrit dans l'air du temps : Internet. Véritable campagne préventive sur les méfaits du web et les dangers qui se cachent derrière les forums pullulant sur la Toile, son Chatroom, bien qu'imparfait, se révèle un thriller glauque habile et plutôt intelligent sur les méfaits du net. Si le film ravira les accros du clic et les geeks en puissance, il déroutera sûrement ceux qui sont restés indifférents à l'évolution. Tant pis pour eux...
L'idée de dénoncer les menaces que peut représenter Internet n'est pas révolutionnaire en soi. Mais c'est la façon brillante dont Hidéo Nakata a réussi à retranscrire à l'écran le fonctionnement des forums qui distingue Chatroom de ses concurrents. Le réalisateur a choisi de représenter les forums sous l'aspect d'un long couloir d'hôtel, où derrière chaque porte se trouve une pièce et donc un Chat différent. L'atmosphère y est glauque, perverse, sombre et souvent décadente. En quelques plans, Nakata fait déjà passer le message de son film. Ne reste plus alors qu'à raconter l'histoire...
L'histoire justement, c'est celle de Williams, un ado solitaire et perturbé qui passe son temps sur Internet et décide d'ouvrir un forum de discussion pour les jeunes de sa ville. Il va alors être déterminé à influencer son groupe sur son chatroom « à la vie, à la mort »... Et comme le résume bien le sous-titre du film, « l'accepter comme ami peut nuire gravement à votre santé ». Le point de départ fera peut-être rire jaune Mark Zuckerberg et tous ses Facebookiens, mais c'est bien l'intérêt du film que d'insister sur la faille essentielle des forums : nul ne sait jamais qui se cache vraiment derrière un pseudo et quelles sont les intentions de cet inconnu planqué derrière son écran.
Hidéo Nakata n'est pas du genre démagogue, alors pas question pour lui de nous passer la brosse à reluire et de tourner autour du pot. Très vite, il entre dans le vif du sujet et grâce à sa troupe talentueuse de jeunes comédiens (emmenée par l'acteur qui monte en ce moment du côté d'Hollywood, Aaron Johnson, alias Kick-Ass), on se prend au jeu nous aussi et on attend avec un plaisir coupable de participer (de manière fictive) à cette manipulation. Malheureusement, l'ingéniosité de la mise en scène ne suffit pas à alléger certaines scènes qui se perdent en bavardages et qui plombent un peu le rythme.
Après une entrée en matière réussie, le film de Nakata s'essouffle assez vite pour ne reprendre son efficacité que dans les dernières minutes, avec une course-poursuite physique et psychologique qu'on n'attendait presque plus. La faute peut-être à cette difficulté que représente la mise en image de la petite Toile sur la grande. Reste que si Chatroom ne se révèle certainement pas aussi flippant qu'avait pu l'être Ring à l'époque, on ne boudera pas notre plaisir de voir Nakata écorcher l'image d'un outil qu'on n'est pas près de voir disparaître désormais : Internet.