
En traitant d’un sujet pertinent, les licenciements économiques massifs, The Company Men vise en plein dans le mille et s’appuie sur un scénario bien travaillé, intelligent et sérieux, en présentant des portraits humains criants de vérité. On peut lui reprocher une réalisation sans artifice et très sobre, cela convient au sujet, mais un peu plus de dynamisme et d’efforts n’auraient pas nui.
En revanche, impeccables sur toute la ligne, les acteurs ont donné le meilleur d’eux-mêmes : Tommy Lee Jones, Maria Bello et - incroyable mais vrai - Ben Affleck, qui n’apparaît plus comme le séduisant trentenaire à l’air béat et naïf. Son très direct « tu sais quoi, va te faire foutre Sally », lors de son licenciement, a de quoi faire sourire de toutes ses dents. On en a rêvé, il l’a dit ! On adore le voir s’énerver dans une autre scène où on lui propose un poste bien en-dessous de ses compétences. Dans ce film qui fait toute la lumière sur la détresse de perdre son emploi se trouve de l’humour ironique au vitriol.
Cette critique incisive du rêve américain tombe à pic. Aucune scène ne nous est épargnée, et on pense une fois de plus à Violence des échanges en milieu tempéré, ou comment se comporter poliment avec les gens qui détruisent notre vie : les scènes où deux meilleurs amis s’affrontent, ceux qui ont bâti la boîte ensemble, sont bouleversantes de réalisme.
The Company Men, malgré son apparence de film un peu trop sérieux, s’attaque directement à des problématiques au cœur de l’être humain : est-on ce que l’on fait ? N’a-t-on de valeur aux yeux des autres que par notre position dans l’entreprise ? Que perd-on quand on perd son travail, sa dignité, tout ? Dans le même film, on suit plusieurs destins, plusieurs façons de réagir à son licenciement, l’un s’en sort, l’autre se suicide…
Une image plane longtemps après la fin du film, quand on revoit l’usine désaffectée parce que l’industrie lourde n’a plus sa place en cette époque : des milliers d’hommes y travaillaient dignement, faisaient vivre leur famille, achetaient une maison… On dirait que tout cela n’existe plus, et le grand patron lui, a 22 millions de plus dans son portefeuille. Tout ça finit un peu trop bien et trop gentiment, mais après cette dégringolade à vif, ça fait du bien.