On imagine que ça a dû chauffer dans les couloirs de L'Obs. Son fondateur Jean Daniel, qui était resté silencieux dans l'affaire de la Une sur le livre de Marcela Iacub relatant sa relation intime avec DSK, n'a visiblement pas apprécié le choix fait par son directeur de la rédaction, Laurent Joffrin. "Quand j'ai découvert la couverture de notre journal, la semaine dernière, j'ai eu un choc. Quoi ! DSK et ses turpitudes une fois encore à la une de notre hebdomadaire !", écrit-il cette semaine. Il réfute d'emblée l'axe de défense de Joffrin, celui d'un choix éditorial guidé "au nom d'une cause, celle de la littérature".
"Il s'agit du récit complaisant des états dans lesquels l'auteure est plongée par les raffinements érotiques pervers de son personnage principal", écrit Daniel, qui dénonce un "acharnement". "Je veux dire clairement ici que je reste allergique et hostile à tout ce qui contribue à maintenir vivante et médiatiquement sulfureuse la descente aux enfers de cet homme", conclut-il. Dominique Strauss-Kahn appréciera sans doute. Il lui avait adressé une lettre publique, dans laquelle il faisait part de son "double dégoût".
"Peut-être le dégoût est-il plus grand encore à l'égard du Nouvel Observateur qui inquiet de perdre des lecteurs, et on comprend pourquoi, imagine son salut en s'avilissant dans une publication commerciale et crapoteuse qu'on croyait réservée à la presse de caniveau" écrivait-il, lâchant un cinglant "L'ancien 'grand journal de la conscience de gauche' vient de sombrer dans une opération qui donne la nausée".
De son côté, Laurent Joffrin a toujours assumé ce choix. Deux pages avant l'éditorial de Jean Daniel, il explique cette semaine "avoir jugé le texte (de Marcela Iacub) bien écrit et bien pensé, susceptible d'éclairer l'affaire DSK d'un jour à la fois neuf et dérangeant." La semaine dernière, il reconnaissait aussi avoir réalisé un coup éditorial. "Effectivement, dans un journal il y a plusieurs sujets. Effectivement, je l'avoue, avec la plus grande humilité, j'ai tendance à choisir celui qui va intéresser le plus les lecteurs", a-t-il expliqué sur Canal+. Outre la polémique, cette Une coûtera cher à L'Obs : 25.000 euros de dommages et intérêts et une condamnation judiciaire à publier en Une la semaine prochaine.