Une compétition dans la compétition. Dans la foulée du prime de "Top chef" de ce mercredi, François-Régis Gaudry animera, aux côtés de Stéphane Rotenberg, "Le chef des chefs" à partir de 23h25 sur M6. Une deuxième partie de soirée hebdomadaire remaniée qui verra s'affronter dans un championnat parallèle au prime 12 candidats de la saison 12 de "Top chef" et 12 figures historiques de l'émission. Ce soir, Pierre Chomet, éliminé en 2021 aux portes de la demi-finale, défiera ainsi dans le premier épisode Coline Faulquier, finaliste de la saison 7. Avant d'arbitrer ce premier match, le critique gastronomique de M6 et France Inter a répondu aux questions de puremedias.com.
Propos recueillis par Ludovic Galtier.
puremedias.com : Pour la troisième saison consécutive, vous prenez les commandes, aux côtés de Stéphane Rotenberg, de la deuxième partie de soirée de "Top chef". Exit "Les grands duels", place au "Chef des chefs". Quel en est le concept ?
François-Régis Gaudry : La deuxième partie, telle qu'elle avait été imaginée à mon arrivée (en 2020), était jusque-là composée de sortes de matches amicaux entre des anciens candidats de 'Top chef'. La chaîne et la production (Studio 89) étaient très contentes des audiences (la saison dernière, l'émission avait réuni jusqu'à 1,02 million de téléspectateurs et 13,6% du public le 21 avril 2021, ndlr). On s'est donc dit qu'il y avait un réel intérêt pour cette deuxième partie de soirée, que l'on pouvait en faire un programme encore plus fort et avec plus d'enjeu.
On a conservé le principe des rencontres, en l'occurrence cette fois-ci, entre des candidats de la saison 12 et des personnalités historiques de "Top chef". Par contre, on en a fait un véritable championnat, c'est-à-dire qu'il y a désormais un premier tour, des demi-finales et ensuite une vraie finale. Ce qui fait que ce ne sont plus seulement des rencontres amicales, il y a un enjeu de compétition. Les candidats se sont mis la pression : il y avait de la sueur sur les fronts, la peur de ne pas achever les plats en une heure de temps... On a constaté, dans cette saison 3, que le fait d'avoir musclé la mécanique avait fait aussi encore grimper le niveau culinaire. Cela fait maintenant 20 ans que je vais au restaurant, j'ai voyagé dans beaucoup de pays et de restaurants étoilés dans le monde et j'arrive encore à être surpris. Je garde en mémoire trois plats assez inoubliables, qui m'ont scotchés le palais. Quand j'aime, je n'oublie jamais.
"On a convaincu tous les chefs de la saison 12"
Comment les affiches des matches ont-elles été déterminées ?
On a créé des chocs de titans entre des personnalités emblématiques. On les a associées par style. On s'est dit que de temps en temps, on trouvait des cuisines assez proches et que deux candidats pouvaient faire une "battle" très intéressante. On a comme ça composé des duos. Ils s'affronteront dans des matches de deux manches gagnantes autour de deux produits différents. Si jamais chacun des candidats du premier tour a gagné une manche, je les départage en prenant en compte le plat que j'ai le plus aimé dans la première ou la deuxième manche. Autrement dit, il n'y aura pas de belle. L'un des candidats du premier tour sera donc qualifié à l'issue de chaque émission pour les demi-finales, l'autre sera éliminé. Les affiches des six demi-finales seront ensuite composées par tirage au sort.
Pierre Chomet et Coline Faulquier s'affronteront ce soir. Quels sont les autres candidats à avoir accepté le challenge ?
Du côté des candidats de la saison 12, on a convaincu tout le monde, dont le gagnant Mohamed Cheick mais aussi Matthias Marc, Jarvis Scott, Chloé Charles... Du côté des historiques, je pense spontanément à Guillaume Sanchez, candidat de la saison 8 avec une étoile Michelin. Gianmarco Gorni, chef italien truculent et drôle de la saison 11 était également parmi nous. Mais aussi Baptiste Renoir, candidat de la saison 10 et à la tête d'un restaurant à Rueil-Malmaison, dans les Hauts-de-Seine, Denny Imbroisi, chef italien de la saison 3. Je peux vous citer aussi Victor Mercier (saison 9), Merouan Bounekraf, Justine Piluso ou encore Thibault Sombardier.
"On ne peut que constater une sous-représentation des femmes dans la cuisine"
Comme dans "Top chef", la parité n'est pas respectée dans "Le chef des chefs". Comment l'expliquez-vous ?
Un tiers des candidats sont des candidates. C'est une question compliquée : je suis critique gastronomique depuis 20 ans et on ne peut que constater une sous-représentation des femmes dans la cuisine... 'Top chef' est une émission qui fait beaucoup d'efforts pour représenter les femmes dans le programme. Pour cette deuxième partie de soirée, on a fait le choix de convoquer seulement des femmes cheffes pour juger les demi-finales et la finale. Il y aura notamment avec moi Stéphanie Le Quellec, qui ne tardera pas trop à mon avis à avoir sa troisième étoile à l'instar d'Anne-Sophie Pic, et Barbara Gonzalez.
La deuxième partie de soirée conserve-t-elle sa dimension culturelle ?
Oui bien sûr ! Il faut considérer que la cuisine et la gastronomie, c'est de la culture à part entière. C'est la raison pour laquelle la production et M6 est venue me chercher. En plus de se concentrer sur le match entre deux candidats, resituer des préparations, comme une raie à la grenobloise ou un beurre blanc, dans l'histoire de la cuisine, les expliquer techniquement et donner des informations sur les produits qui sont en jeu, ça me semble important. On fait oeuvre de pédagogie pour ceux qui nous écoutent. On donne aussi la parole aux producteurs. C'est ma passion, j'ai essayé de faire profiter l'émission de mes lumières.
D'ailleurs, comment sont sélectionnés les produits ?
On les a sélectionnés avec la production. Nous nous sommes concentrés sur des produits qui correspondent aux valeurs que je porte, c'est-à dire des produits identitaires, encadrés par un cahier des charges respectueux de l'environnement et qui nourrissent les hommes et les femmes qui les fabriquent. On a tous une responsabilité dans notre façon de manger par rapport à l'avenir de la planète, cela nous semblait très important de sélectionner des produits qui portent ces valeurs.
"Je me rendrai au Plaza Athénée de Jean Imbert pour me faire mon propre avis"
Cette saison 13 est aussi marquée par le retour de Jean Imbert dans "Top chef". Dans un portrait que lui a consacré "Le Monde" en août 2021, lorsqu'il est arrivé au Plaza Athénée, vous relativisiez son talent. Vous avez déclaré à son sujet : "Il aime le bling-bling, les gens connus, l'argent... Il a le talent du culot, des réseaux sociaux, des selfies et de savoir bien s'entourer". Comment avez-vous vécu son retour ?
Sincèrement, j'ai mon avis sur Jean Imbert, je n'ai plus envie de m'exprimer sur le sujet. Ce que je dis, c'est que je n'ai pas toujours eu de bonnes expériences dans ses restaurants. Néanmoins, je me rendrai au Plaza Athénée pour me faire mon propre avis. Je juge toujours sur pièce et en toute indépendance, je paye mon addition, et si l'expérience se révèle convaincante, que je détecte une sincérité dans l'assiette, je le dirai avec plaisir. Je ne demande qu'à changer d'avis. À titre personnel, je n'ai rien contre Jean Imbert, je serai très heureux de lui reparler. Après, je ne suis pas le conseiller de l'émission. Je trouve toutefois cohérent que "Top chef" fasse appel à un ancien candidat qui, de surcroît, a gagné l'émission.
"Je suis toujours en discussions avec Netflix"
On vous a vu en 2018 dans le concours culinaire international "The Final Table" sur Netflix. Avez-vous d'autres projets avec la plateforme américaine ?
Je suis toujours en discussions avec eux. On m'a proposé, comme ça, en one-shot d'être le critique français dans un concours international avec un niveau culinaire incroyable à Los Angeles. Il y a d'autres concours internationaux qui se profilent pour Netflix et d'autres plateformes sur lesquelles on me challenge. Mais je ne peux pas trop en dire plus, ce n'est pas signé.
Avez-vous d'autres ambitions au sein du groupe M6 ?
J'anime toujours l'émission "Très très bon" sur Paris Première . J'ai deux films documentaires en préparation pour cette émission en tant qu'auteur : on est en train de rechercher le meilleur sushi de France, donc là notre boulot c'est de constituer un jury et de tester de villes en villes les restaurants de sushis pour désigner le meilleur. On l'avait fait l'an dernier avec le kebab, c'était un film qui avait eu beaucoup de succès. On prépare également un autre film de 52 minutes sur le meilleur oeuf mayo de France, produit populaire de bistrot par excellence, un peu négligé dans les années 1990-2000 et qui revient désormais au goût du jour. Je suis très content de bosser pour le groupe M6, chaîne la plus performante et la plus sincère en terme de gastronomie.