La fusion TF1-M6, un bouleversement pour le paysage audiovisuel français ? En attendant l'hypothétique feu vert de l'Autorité de la concurrence, dont la décision est attendue à la fin de l'année, Nicolas de Tavernost, président du directoire du groupe M6, et Gilles Pélisson, président-directeur général du groupe TF1, s'attèlent à convaincre les mondes économique et politique de l'intérêt d'un tel rapprochement.
Illustration nouvelle, ce lundi, au Sénat. Auditionné par les sénateurs siégeant à la commission d'enquête sur la concentration des médias, Gilles Pélisson a relativisé le poids de la future entité qui regrouperait les deux leaders de l'audiovisuel privé. "Le futur groupe sera plus petit que France Télévisions tant en investissements dans les programmes de fiction, dans le sport, dans l'information en nombre de journalistes. Il sera donc très loin du géant que l'on décrit qui dominerait le marché français", a affirmé Gilles Pélisson.
"Si la fusion TF1 et M6 devait se faire, ce serait un groupe qui toucherait 75% des téléspectateurs. Ce niveau de concentration on ne l'a jamais atteint", décrivait l'économiste Julia Cage dans "C politique" sur France 5 le 23 janvier. Auditionné lui aussi par cette même commission d'enquête, Vincent Bolloré, à la tête de Vivendi, qui détient les groupe Canal+ et Lagardère, avait usé d'une image similaire. "Le groupe Vivendi est en réalité un petit nain", avait-il asséné.
"Nous pensons sincèrement que l'intérêt du public et du secteur est d'avoir aux côtés d'un service public puissant un groupe audiovisuel en clair, digital, privé, solide, capable de continuer à faire vivre cette marque de fabrique française dans le monde de la création culturelle", a poursuivi Gilles Pélisson devant les sénateurs. Sur son site, M6 indique que "la finalisation de la transaction devrait avoir lieu d'ici la fin de 2022, après consultation des instances représentatives du personnel, l'obtention des autorisations réglementaires (ADLC, Arcom) et la tenue des assemblées générales d'actionnaires".
L'un des prérequis à cette fusion est toutefois la cession de plusieurs chaînes qui composent actuellement les deux entités. Les repreneurs devraient être choisis en avril, selon "Le Figaro", mais pour l'heure, ils ne seraient pas nombreux à avoir officiellement déposer une offre, rapportait "Capital" la semaine dernière. "Jeudi 3 février, le dépôt des offres sur les chaînes Gulli, TFX, 6Ter et TF1 Séries Films a montré que de nombreux acteurs avaient finalement décidé de passer leur tour", expliquait le journal économique.
L'éditeur de magazines Reworld Media, qui possède déjà la chaîne Sport en France, a déposé des offres pour le rachat de Gulli et 6Ter. L'éditeur Unique Héritage Media, qui publie le "Journal de Mickey", a candidaté à l'acquisition de Gulli. Le propriétaire de "L'Express" Alain Weill a déposé une offre pour racheter TFX. "Enfin, Altice-SFR, déjà propriétaire de BFMTV et RMC, aurait postulé pour plusieurs chaînes, notamment TFX et TF1 Séries Films", a fait savoir "Capital".
La loi sur l'audiovisuel interdit à un groupe de posséder plus de 7 chaînes diffusées en terrestre hertzien. TF1 et M6 possédant chacune cinq chaînes TNT, le nouvel ensemble devra céder trois fréquences, ou deux si l'on tient compte de Paris Première. Free apparait, pour l'heure, comme l'opposant le plus obstiné. En juillet 2021, son vice-président Maxime Lombardini avait dénoncé, lors d'une audition devant le CSA, la constitution de ce "quasi monopole de la télévision privée". L'opérateur, détenu par Xavier Niel, vient, assure "Capital" ce matin, de déposer un quatrième recours contre le plan des deux chaînes privées.