Chaque semaine, retrouvez "Médias le mag, l'interview", en partenariat avec France 5. Julien Bellver, co-rédacteur en chef de puremedias.com et chroniqueur dans "Médias le mag" le dimanche à 12h35 interroge une personnalité des médias toutes les semaines. Pour ce 20e numéro, Julien Bellver reçoit Laurence Ferrari, à la tête de "Tirs croisés" sur iTELE et du "Grand 8" sur D8.
L'événement politico-médiatique de la semaine, c'était la venue de Nicolas Sarkozy jeudi soir dans "C à vous". C'est un joli coup pour France 5 ?
C'est un joli coup pour France 5, c'était un très joli coup pour TF1 et "Sept à huit" de l'avoir en premier chez Thierry Demaizière. On est là sur une séquence médiatique pour l'ancien président, c'est normal que ça passe sur des émissions qui sont plus sur le registre du testimonial que réellement sur une offre politique.
Vous aviez demandé à le recevoir sur iTELE ?
Oui, on le demande de toute façon en permanence. Je pense que la séquence purement politique va s'ouvrir après. Le côté regret, mea culpa, on est encore dans ce registre-là.
"Sept à huit", "C à vous" puis "Des paroles et des actes" en février, c'est un bon plan de com' pour un retour en politique ?
Commencer par Thierry Demaizière, c'est un super plan de com', "C à vous" aussi, c'est l'émission d'accueil qui est la mieux placée aujourd'hui en access prime time. Après, l'autre séquence, et celle qui m'intéressera le plus, c'est la séquence politique : l'articulation du programme, des idées, des convictions, et là effectivement, ce sera avec "Des paroles et des actes" en premier et ensuite il y aura les chaînes info et iTELE, bien entendu !
Nicolas Sarkozy fascine encore les médias ou ils sont, comme les Français, passés à autre chose ?
Non, il fascine encore les médias. Regardez le plan média qu'il a en ce moment. Après la question, c'est est-ce qu'il fascine les Français, mais est-ce qu'il y a aujourd'hui un homme ou une femme politique qui fascine les Français ? Je n'en suis pas sûre... Il va falloir retisser des liens entre les hommes politiques et les Français.
La bataille pour les primaires à droite et à gauche a démarré. Et iTELE a lancé son "Journal de la primaire". Vous allez raconter quoi ?
On voulait démarrer tôt. Mieux vaut partir au bon moment et être prêt en septembre, quand les dés seront lancés. Chaque semaine, on va avoir un grand sondage, avec un beau panel, 5.000 personnes sondées. On va tester les courbes de popularité, tous les cas de figure. On voulait avoir chaque semaine, sur iTELE, dans mon émission "Tirs croisés", ce rendez-vous de la primaire près de 300 jours avant l'échéance.
L'autre actu de la semaine, c'est la démission de Christiane Taubira. Vous en avez parlé sur D8. Vous sortez de votre neutralité journalistique, là ?
Bien sûr, et c'est pour ça que "Le Grand 8" est magique pour moi. Il me permet justement de donner mon avis, de dire ce que je ne peux pas dire sur un plateau de news, parce que ce n'est absolument pas mon rôle. Christiane Taubira en plus, honnêtement, cette séquence sur la déchéance de nationalité, elle l'a faite chez moi, dans "Tirs croisés". Je lui ai demandé les yeux dans les yeux si vraiment, cette question lui convenait, si elle n'était pas en porte-à-faux avec ses convictions. Elle m'a répondu très franchement "Si, pour moi c'est une mesure injuste, inefficace". Elle était dans la sincérité, donc je me sentais un tout petit peu responsable de ce qui s'est passé par la suite.
Vous ne pourriez pas dire la même chose sur iTELE...
Bien sûr que non !
C'est l'avantage de votre double casquette...
Evidemment ! C'est pour ça que je suis si heureuse d'avoir ces deux émissions, "Le Grand 8" le matin et "Tirs croisés" le soir.
C'était une icône, Christiane Taubira ?
Ca l'est toujours ! C'est une femme d'une ampleur idéologique et d'une culture, d'une faconde... C'est une oratrice extraordinaire ! Honnêtement, il y a très peu de femmes politiques qui sont à son niveau aujourd'hui.
Elle est difficile à interroger ?
Pas tant que ça ! Elle est très sincère, très cash. Elle répond à vos questions, ce qui est absolument miraculeux pour un homme ou une femme politique. C'est très, très agréable.
Vous l'avez demandée en interview ?
Pas encore. On va lui laisser un peu de temps. Je pense qu'elle a besoin de laisser retomber la pression médiatique, et elle reviendra, peut-être sur un autre registre !
Ca fait quatre ans que vous présentez "Le Grand 8" sur D8. Est-ce qu'il y aura une nouvelle saison ?
Je le souhaite vraiment. On en parle avec les dirigeants de D8. C'est vraiment un talk très original, c'est un talk show féminin où on parle de politique, de cuisine, d'économie, de mode... Et tant mieux, c'est ce qui fait le sel de l'émission. Avec cinq femmes qui ont des prises de position intéressantes, des convictions politiques fortes. On est assez inédit dans le paysage. On est sur la chaîne qui voit jour après jour le succès de Cyril Hanouna, et tant mieux, mais on a aussi notre particularité à nous. Tous ensemble, on fait ce qu'est aujourd'hui D8.
L'émission rassemble 200.000 téléspectateurs en moyenne. C'est beaucoup de travail pour une audience finalement assez faible, non ?
Ecoutez, nous, l'audience, elle nous convient. Moi, j'aime bien ce créneau-là. D'une certaine façon, ça nous protège un tout petit peu et ça nous donne une grande liberté et une grande marge de manoeuvre. Pour l'instant, on est très bien là. Si un jour les dirigeants de D8 veulent nous changer de case, ils nous en parleront, mais ça n'est pas le cas pour l'instant. On a un public qui est très fidélisé, qui nous regarde aussi beaucoup en replay, les chiffres d'audience ne sont pas que sur Médiamétrie.
Cela n'a échappé à personne, Vincent Bolloré est le nouveau patron de Canal+ et donc d'iTELE. Il a promis une refonte totale de la chaîne qui doit changer de nom. Où en est le projet ?
Pour l'instant, iTELE va bien, on a des bons chiffres d'audience. On a eu une très grosse séquence d'actualité évidemment au mois de novembre. iTELE est une chaîne qui a son identité, avec des formidables journalistes. Je dirais que le projet éditorial, c'est nous, c'est l'info, c'est du hard news, on fait du hard news. Est-ce qu'il faut attendre un nouveau projet éditorial ? Je ne pense pas. Nous, on le met en oeuvre chaque jour avec toutes les équipes d'iTELE. Après, il y aura sans doute un nouveau nom, un nouvel habillage, dans les prochains mois. Mais honnêtement, pourquoi demander un nouveau projet éditorial ? C'est nous qui le portons tous les jours.
Le moral des troupes est bon ?
Elles travaillent. Elles sont sur le terrain, elles bossent H24, donc elles sont encore une fois dans le plein exercice de leur métier.
Vous vous sentez libre à iTELE ?
Totalement.
Il y a un nouveau directeur de la rédaction, Guillaume Zeller, arrivé il y a quelques mois pour remplacer Céline Pigalle...
Il n'y a aucune ingérence éditoriale. Aucune crainte sur l'emploi.
Vous l'avez rencontré Vincent Bolloré ?
Oui, une fois. Je lui ai fait part de ma passion pour les émissions politiques ! J'espère qu'on aura des projets qui vont aboutir.
Le PAF comptera bientôt deux nouvelles chaînes d'informations, LCI et la chaîne de France Télévisions. C'est combien de trop ?
C'est difficile, d'abord parce que ce sont des confrères et parce que j'ai commencé à LCI. J'ai un rapport très affectif avec cette chaîne. C'est vrai que trois ou quatre chaînes d'info, c'est énorme ! Où sont les téléspectateurs ? Où sont les recettes publicitaires ? Est-ce que finalement ces deux chaînes ne vont pas affaiblir les deux chaînes existantes ? On se pose énormément de questions. Après, on a une longueur d'avance, on a été les premiers avant même que BFM arrive sur le créneau, même si LCI était déjà là. On a notre savoir-faire, on a notre identité, on va résister, on va se battre...
Vous pensez qu'il y aura des morts ?
Je pense qu'il y aura un affaiblissement général, très sincèrement. Je pense que le marché publicitaire va être trusté par TF1. A nous de nous battre maintenant. Mais c'est sûr que ce n'est pas une super nouvelle pour nous.
France Télévisions cherche à renouveler son offre d'émissions politiques. Vous êtes candidate ?
Non ! (Rires) Je crois que Léa Salamé est très bien placée. Elle sera formidable là-dedans !
Représenter un 20 Heures c'est possible ?
Il ne faut jamais dire jamais, mais honnêtement, j'ai fait le tour de l'exercice. J'en suis partie, j'ai un équilibre entre "Le Grand 8" et "Tirs croisés". Franchement, je ne vois pas pourquoi j'irais me remettre dans cette situation.