En 2007, l'Etat a offert une chaîne bonus aux opérateurs privés historiques. Ces canaux compensatoires étaient censés voir le jour fin 2011 sur la TNT. Ils ont été octroyés par le gouvernement de Dominique de Villepin à TF1, Canal+ et M6 en "dédommagement" des investissements consentis lors du lancement du numérique hertzien, en mars 2005.
Face à la menace de poursuites judiciaires et de lourdes sanctions économiques après que la Commission européenne a jugé ces canaux compensatoires "contraires au droit européen", le gouvernement de François Fillon a décidé de revenir sur ce privilège. Ansi, une loi prévoyant l'abrogation des chaînes bonus a été rédigée. Seul hic : elle n'a jamais été votée. Légalement, TF1, Canal+ et M6 sont donc en droit de réclamer leur canal compensatoire.
Après l'appel à candidatures du CSA concernant six chaînes HD sur la TNT gratuite où TF1 et M6 ont obtenu, chacun, une nouvelle fréquence, on pensait l'affaire des canaux compensatoires oubliée grâce à cet arrangement informel. "C'était sans compter sur la gourmandise du groupe M6, révèle Le Point. Dès le 23 avril, dans un courrier adressé par porteur à Michel Boyon, président du CSA, Nicolas de Tavernost, patron de M6, réclamait aussitôt son dû."
Ainsi, dans son courrier aux Sages, Nicolas de Tavernost réclamait le passage au gratuit de sa chaîne Paris Première, actuellement proposée sur la TNT payante. "Le groupe M6 souhaite faire valoir son droit qu'il tient du législateur et qui s'impose à l'autorité de régulation, écrivait le patron du groupe M6. J'ai par conséquent l'honneur, conformément à la loi, de vous indiquer que le groupe M6 souhaite disposer, au titre de l'article 103 précité, d'une nouvelle chaîne gratuite, soit par le biais d'une autorisation sur un multiplex existant, soit en étendant totalement la diffusion gratuite de Paris Première, poursuivait le patron de M6. Cette chaîne répond déjà aux conditions fixées par la loi et son passage en diffusion gratuite n'emporterait aucune contrainte sur le plan technique."
Bien embêté, le Conseil supérieur de l'audiovisuel n'a toujours pas répondu. C'est dans ce contexte que Nicolas de Tavernost a écrit au gouvernement, ces derniers jours, pour obtenir une centaine de millions d'euros en réparation de la méconnaissance de son droit acquis. En cas d'insuccès, M6 pourrait se tourner vers le Conseil d'Etat. En effet, la Six se juge dans son bon droit, d'autant plus qu'en 2006, le Conseil d'Etat et le Conseil constitutionnel avaient reconnu dans son principe le préjudice subi par TF1, Canal+ et M6 avec le passage au numérique hertzien.