Il ne mâche pas ses mots. Hier soir, "Le Monde" a dressé sur son site un portrait du journaliste Paul Amar, signé de Gérard Davet et Fabrice Lhomme. Dans cet article, les journalistes d'investigation ont rencontré l'ex-présentateur du "20 Heures" d'Antenne 2 et ont retracé avec lui sa carrière sur la deuxième chaîne, dont notamment la période de cohabitation avec Jean-Pierre Elkabbach, lorsque ce dernier était le patron de France Télévisions.
En 1993, lors de la victoire de la droite aux législatives, Jean-Pierre Elkabbach a été nommé président du groupe audiovisuel du service public. "C'est mon arrêt de mort. Quand Elkabbach soutient le pouvoir, il le soutient ouvertement...", confie Paul Amar, avant d'évoquer sa rencontre avec l'intervieweur lorsque les deux journalistes étaient correspondants à Washington : "Il m'avait lancé, en sortant de l'avion : 'Le patron, c'est moi !' Il avait même pris ma place au bureau. Je n'ai jamais vu un type aussi tyrannique. Il m'avait empêché d'aller serrer la main de l'écrivain Henry Miller, dont j'avais obtenu, pour lui, l'interview. J'en avais pleuré."
Alors présentateur du journal télévisé d'Antenne 2, Paul Amar raconte le changement de la ligne éditoriale de son "20 Heures" : "Je n'avais plus mon mot à dire, c'était le retour à l'ORTF ! Un soir, j'ai même dû recevoir deux ministres, Philippe Douste-Blazy et Charles Pasqua. C'était ridicule, même eux en rigolaient..." Ainsi, le présentateur affirme que Jean-Pierre Elkabbach l'avait obligé à tenir le mythique débat entre Bernard Tapie et Jean-Marie Le Pen, durant lequel le journaliste avait sorti des gants de boxe en direct à la télévision. Suspendu trois semaines après le choc, il est ensuite licencié par le patron de France Télévisions. "Je préfère perdre un '20 Heures' que ma conscience", lâche Paul Amar aujourd'hui.
Au cours de ce portrait, le journaliste revient également sur son départ compliqué d'i24News en février 2017. Alors directeur de l'information de la chaîne d'information de Patrick Drahi, basée à Tel Aviv en Israël, il avait dû déposer sa démission en raison d'une divergence d'opinion sur la stratégie de développement de la chaîne. "Il y avait trop de divergences avec Frank Melloul, le patron de la chaîne, sur le mode de management, les choix stratégiques... Le versant francophone de la chaîne disparaissait, on m'avait promis des moyens que je n'ai pas eus. J'avais déjà présenté trois fois ma démission en dix-huit mois !", précise le présentateur, avant de conclure : "Je suis parti sans un centime, alors que j'étais très bien payé..."