"Il y a des gens qui s'identifient à elle parce que c'est la petite beurette qui est montée dans les échelons, qui a réussi". Yves Thréard, éditorialiste et directeur adjoint de la rédaction du "Figaro", est sous le feu des critiques depuis qu'il a dépeinte Rachida Dati, nommée ministre de la Culture en janvier 2024, en ses termes – sans être interrompu ou contredit par Caroline Roux et les trois autres invités – sur le plateau de "C dans l'air", ce lundi 5 février 2024 sur France 5.
L'éditorialiste était en train d'expliquer pourquoi Rachida Dati avait toutes les chances de chiper la mairie de Paris, à laquelle elle s'est déclarée candidate à peine nommée rue de Valois, à Anne Hidalgo en 2026. "Il faut se promener avec Rachida Dati dans des quartiers extrêmement populaires de l'est parisien, c'est une star, c'est Johnny Hallyday", a-t-il pris comme point de comparaison.
"'La petite beurette' – France – 2024", a commenté Leïla Kaddour en relayant l'extrait sur X. "De manière peut-être un peu naïve, je m'attendais à des excuses. Mais rien. Peut-être que les excuses (ou même un petit mot de repentir) tardent parce que cette personne ne sait pas par où commencer. Allez, je lui donne un petit coup de pouce", a-t-elle déploré ce jeudi 8 février 2024 sur Instagram en joignant un modèle de message d'excuses.
La veille, la présentatrice du "13 Heures" de France 2 le week-end avait déjà fait part de son émotion. "Je suis consternée", avait-elle écrit sur X, en réponse à un message de colère posté par Émilie Mazoyer. "Pardon Yves Thréard ? On n'a pas bien entendu ? Vous êtes quoi vous ? Plutôt un grand raciste ou un grand sexiste qui a réussi ?", a fait mine de s'interroger l'animatrice de "Décibels" sur France Bleu en renvoyant ses abonnés à un podcast de France Culture intitulé "'Beurettes' : Du fantasme orientaliste au cliché raciste". "Pas bravo à 'C dans l'air', pourriez-vous tenir votre plateau comme si on était en 2024 s'il vous plaît ?", a-t-elle exigé.
"Ainsi donc, en 2024, un homme blanc de plus de 50 ans se fend d'une analyse de caniveau, satisfait de son bon mot. Las. Vous êtes fatigué. Et nous aussi", lui a emboité le pas Aïda Touihri, présentatrice de "Engagez-vous !" sur RMC Story. "Ne nous appelez plus jamais beurette", a-t-elle encore exigé. Dans les rangs de la classe politique, Karima Delli, eurodéputée écologiste, a dénoncé des "propos médiocres" et le "silence" qui règne sur le plateau.
Jean-Michel Aphatie, éditorialiste dans "Quotidien" sur TMC, a qualifié, de son côté, l'argumentaire d'Yves Thréard de "vestige de la pensée coloniale". "Yves Thréard incarne cette part du journalisme français qui tient aujourd'hui le haut du pavé et qui a assuré pendant 25 ans la carrière d'Éric Zemmour malgré ses propos constamment racistes", a-t-il ajouté.
Sans doute en référence à un débat, organisé le 17 février 2022 sur LCI, au cours duquel il avait eu maille à partir avec l'éditorialiste du "Figaro". Yves Thréard avait estimé en effet que "Éric Zemmour ne s'en prend pas aux Arabes parce qu'ils sont Arabes, il s'en prend aux Arabes parce qu'il dit que ce sont des voleurs".
Rappelons enfin que "C dans l'air" avait déjà été confronté à des propos racistes. En février 2017, Luc Poignant, porte-parole du syndicat Unité SGP Police FO, avait affirmé que "bamboula, ça reste encore convenable". Caroline Roux, qui l'avait fermement recadré dans la foulée, avait exprimé sa tristesse quelques jours plus tard sur RTL. "J'étais très triste que cela se passe sur le plateau de "C dans l'air'. J'en ai beaucoup voulu à cette personne de mettre 'C dans l'air' dans cette situation", avait-elle confié dans "Les dessous de l'écran".