Soirée à fort enjeu pour France 2. Le mardi 23 août en prime time, la chaîne du service public a remis au goût du jour "Masterchef", le concours de cuisiniers amateurs lancé en France en août 2010 sur TF1. Mais que diable France 2 est-elle allée faire dans cette galère ?
La marque "Masterchef" a-t-elle manqué aux téléspectateurs au point de mériter d'être relancée ? Pas sûr. Il y a sept ans, le public avait sévèrement sanctionné la saison 5 de l'émission. Seulement 2,69 millions de téléspectateurs, soit 13,6% du public et 17% des Femmes responsables des achats de moins de 50 ans (FRDA-50), cible prioritaire de la chaîne, avaient salivé, le 25 juin 2015, devant ce qui était déjà présenté comme une nouvelle mouture du concours culinaire.
Auteure de deux des plus mauvaises audiences en prime de l'année 2015 sur TF1, "Masterchef" est alors reléguée sans tarder sur... NT1 (aujourd'hui TFX). Et les audiences s'effondrent, la mayonnaise étant visiblement irrattrapable. Le 3 septembre 2015, le programme quittait l'antenne dans l'indifférence générale, conservant l'attention de 590.000 fidèles, soit 3,5% du public. Un score acceptable pour NT1 mais catastrophique pour "Masterchef", dont la finale la plus suivie, en 2011 (saison 2), avait sustenté près de 7 millions de gourmands et 30% du public.
Certes, France 2 n'est pas NT1 mais le retour d'une marque usée et abîmée, de plus estampillée TF1, a-t-elle du sens sur le service public ? "'Masterchef' est un programme qui est natif du service public, sur la BBC", se défendait Nicolas Daniel, patron de l'unité magazines de France Télévisions, le mois dernier lors de la présentation du programme à la presse.
Mais Agathe Lecaron, nouvelle incarnation de l'émission, jadis présentée par Carole Rousseau, le regretté Sébastien Demorand et Sandrine Quétier, a beau promettre "une version un petit peu différente" du "Masterchef" d'il y a douze ans - "avec des valeurs ultra écoresponsables", le respect de la nature et de l'environnement et la lutte contre le gaspillage - le programme n'en reste pas moins basé sur la compétition. Dès le 23 août, les téléspectateurs ne s'y sont pas trompés. Sur les 18 candidats derrière les fourneaux, seuls 9 ont finalement revêtu le tablier "Masterchef" et un seul remportera, dans cinq semaines, le concours et les 100.000 euros qui accompagnent le titre de "Masterchef" 2022. "Je ne vous mets pas la pression mais quand même je vous la mets", résume ainsi l'animatrice dans la bande-annonce.
Des codes et un enjeu davantage associés aux programmes des chaînes privées. La présence dans le jury des chefs Yves Camdeborde et Thierry Marx, respectivement révélés au grand public par TF1 ("Masterchef") et M6 ("Top chef"), est un autre ingrédient qui n'aide pas non plus à cerner quel goût aura cette sauce service public. Et surtout quel public France 2 cherche-t-elle vraiment à séduire en marchant sur les plates-bandes de M6, chaîne référente en matière culinaire dans l'ère moderne depuis la sortie du four de "Oui chef" avec Cyril Lignac en 2005 et le lancement de "Top chef" en 2010.
Ajoutez à cela un choix de programmation risqué. Le lancement de cette saison 6 de "Masterchef" a, par exemple, fait face le mardi 23 août non seulement à la puissance de feu de "Crimes parfaits" sur France 3 et au démarrage de la saison 4 de "Mask Singer" sur TF1. France 2 ne pouvait ignorer que la Une lancerait un programme du genre dans cette case du mardi, dédiée aux divertissements... depuis un an. Bien sûr, ces éléments défavorables de contexte pourraient être balayés si l'audience est au rendez-vous. France 2 avait réussi - il faut le rappeler - à faire perdurer sur son antenne "Qui sera le prochain grand pâtissier ?" entre 2013 et 2017. Un programme diffusé... le mardi soir.
Mise à jour le mercredi 7 septembre 2022 à 12h15 : Au lendemain de la diffusion de l'épisode 3 de "Masterchef", le fait est que la nouvelle mouture de l'émission incarnée par Agathe Lecaron n'a pas ouvert l'appétit des téléspectateurs. De semaine en semaine, l'audience s'effrite.
Le lancement de la saison 6 de cette production Endemol France a suscité, le 23 août, la curiosité de 1,82 million de téléspectateurs (10,7% du public et 12,4% des FRDA-50). En deuxième semaine, les plats évalués par les chefs Yves Camdeborde, Thierry Marx et Georgiana Viou ont fait saliver seulement 1,55 million de gourmands (8,7% du public et 10,1% des FRDA-50). Ce mardi 6 septembre enfin, le troisième épisode a sustenté 1,27 million d'amateurs, soit 6,6% de l'ensemble du public (7,3% des FRDA-50). Le programme a donc égaré, depuis son retour, 550.000 téléspectateurs, 4,1 points de part d'audience sur l'ensemble du public et 5,1 points sur la cible commerciale.
Interrogé par puremedias.com, France Télévisions n'envisage pas pour l'heure de déprogrammer son émission.