Eric Fottorino balance. Le patron de presse à l'origine des revues "Le 1", "America" et "Zadig" était hier l'invité de Yann Barthès dans "Quotidien" sur TMC. Alors qu'il est l'un des rares à lancer des titres de presse papier aujourd'hui, celui qui fut le patron du "Monde" de 2007 à 2011 a donné sa vision de la presse, qu'il conçoit désormais sans publicité ni "actionnaire puissant". Eric Fottorino a ainsi décrit le rôle néfaste que peut jouer un ^puissant actionnaire d'un groupe de presse, s'appuyant notamment sur son expérience en tant que patron du "Monde".
"Avoir des actionnaires puissants fait qu'à des moments, on vous attache", a-t-il ainsi estimé, donnant ensuite des exemples. "Au moment des élections présidentielles, tout actionnaire - même si vous croyiez qu'il était endormi - se réveille. Il se réveille parce qu'il faut être derrière untel ou untel", a raconté Eric Fottorino. "Il y avait quelques instructions, entre Matthieu Pigasse et Pierre Bergé, sur le candidat à soutenir. En 2012, il y avait un candidat qui était possiblement Dominique Strauss-Kahn. Je peux vous dire que les nouveaux actionnaires avaient quelques idées sur quel était le bon candidat pour 'Le Monde', que 'Le Monde' devait soutenir", a-t-il ajouté à propos de la période où il dirigeait le célèbre quotidien.
Eric Fottorino a ensuite estimé que les actionnaires des journaux se servaient d'eux comme d'un outil "d'influence" et de "dissuasion" vis-à-vis de leurs concurrents. Celui qui est aussi écrivain a alors raconté une nouvelle anecdote. "Quand j'étais encore directeur du 'Monde', nous avions un partenariat industriel avec le groupe Bolloré sur 'Direct Matin' qui était son journal gratuit. Quand Raphaëlle Bacqué (célèbre journaliste du 'Monde', ndlr) m'a un jour apporté une page sur les ports africains de Bolloré, je peux vous dire qu'il s'est passé quelques petites choses assez croustillantes mais très désagréables", a relaté Eric Fottorino, précisant qu'un "homme de main" de Vincent Bolloré dirigeant "Direct Matin" à l'époque s'était opposé à cette publication, sans succès puisque l'article avait été publié.
Au cours de cet entretien, Eric Fottorino a aussi révélé avoir à l'époque "dit non" au président Nicolas Sarkozy, qui souhaitait que "Le Monde" soit vendu à Arnaud Lagardère. Et de raconter qu'en l'espace de quelques semaines suite à cette prise de position, trois clients de l'imprimerie du groupe Le Monde, "le groupe Bolloré, le groupe Les Echos de Bernard Arnault et le groupe Lagardère d'Arnaud Lagardère", avaient subitement décidé de ne plus faire appel aux services de l'imprimerie du journal dirigé par Eric Fottorino, mettant ainsi en péril sa situation financière. "En un mois, j'ai perdu trois clients. Ils ne nous ont pas attaqués sur le plan éditorial mais sur le plan industriel", a-t-il conclu. puremedias.com vous propose de revoir cette séquence à partir de 08'13.