Le journaliste, animateur et auteur Stéphane Bern est ce mardi le rédacteur en chef de puremedias.com. Toute la journée, il répond aux questions de la rédaction et réagit à l'actualité des médias. Après son interview sur la télévision et la radio, place à la politique. Passionné par la campagne présidentielle, il livre son analyse à moins de cinquante jours du premier tour. Dernier rendez-vous avec Stéphane Bern en fin de journée pour "les bonus de Stéphane" où il nous donnera son avis acéré sur les médias.
Propos recueillis par Julien Lalande et Julien Bellver.
puremedias.com : Vous suivez forcément la campagne présidentielle. Diriez-vous qu'elle est d'un bon niveau en 2012 ?
Stéphane Bern : Non ! Même si je la suis, j'adore ça. Elle est décevante mais à la hauteur des ambitions politiques. On a les hommes politiques qu'on mérite. On ne parle que des petites phrases, les coups de griffes. Je trouve qu'il n'y a pas d'idéal. Je comprends, il faut sortir de la crise et faire le dos rond. Mais j'ai envie d'être porté par un idéal !
François Hollande parle du "rêve français"...
J'ai lu son livre, il y a de bonnes idées, il y a un amour sincère de la France. Mais pendant des années, on nous a dit que nos probèmes étaient liés à l'Europe. Maintenant on nous parle de solutions grâce à l'Europe. Pourquoi n'a-t-on pas le courage de dire que les caisses sont vides ? Pourquoi ne dit-on pas que l'Etat doit aussi se serrer la ceinture ? Un Etat modeste, enfin ? Je vois autant de voitures ministériellles qu'avant, le train de vie de l'Etat n'a pas été réduit, c'est par ça qu'il fallait commencer.
Vous vous étiez indigné il y a deux ans qu'on associe immigration à identité nationale. Ce sont des thèmes encore très présents pendant cette campagne. Qu'en 2012 ces sujets soient au coeur de certains programmes politiques, cela vous inspire quoi ?
Oui, et la viande halal aussi ! On agite des chiffons rouges en permanence. Je crois que par chance, ça ne prend plus. J'ai le sentiment que les gens ne sont pas dupes. J'observe, je regarde, je suis comme tous les Français. Moi, j'ai une vision un peu gaullienne et je l'avoue mornachique, une France éternelle. Là, j'ai l'impression d'avoir en face de moi des épiciers.
Vous êtes un homme de culture, aussi. On en parle peu.
Oui, pas de culture. Il n'y a pas un projet où on retrouve des idées de grandeur de notre pays. Le grand fautif, c'est Jacques Chirac. Un homme qui n'a rien fait. Il est largement responsable, j'ai toujours dit que Bernadette Chirac avait été meilleure première dame qu'il n'a été bon président. Quand il a été élu à 82% des voix, il fallait faire un gouvernement d'union nationale. C'était l'occasion rêvée pour se rassembler et sortir le pays de l'ornière.
On vous a déjà proposé d'être ministre ?
Jamais ! Chaque fois que Frédéric Mitterrand me voit, il me dit "fais gaffe tu finiras comme moi, ministre de la culture !". On a un peu le même profil mais moi je refuserai. Ce n'est pas mon objectif dans la vie. Cela peut-être une parenthèse mais après, c'est difficile de rebondir.
Il a été un bon ministre de la culture ?
Il a été un merveilleux ministre de la culture ! Chaque fois que je suis allé sur un tournage de "Secrets d'histoire", dans tous les châteaux de France, même les plus obscurs, les plus inconnus, les plus éloignés, il est venu. Il a été très présent. Je ne suis pas sûr qu'il a été aussi présent dans l'art contemporain. Mais après tout, on se laisse guider par ses goûts et ses conseillers ont fait le travail. Mais sur le patrimoine, il a été un formidable ministre.
Vous êtes un des rares à le dire...
Oui, je le dis haut et fort ! Et il faut être loyal envers ses amis. Frédéric a été un grand frère, il m'a fait venir à la télévision dans beaucoup d'émissions, il a toujours été d'une fidélité à toute épreuve à mon endroit, j'aurai la même pour lui.
Quand Christian Vanneste parle du "lobby gay médiatique", vous vous sentez visé ?
Je ne réagis pas aux propos d'un crétin ! S'il y a un lobby crétin, il est son porte-parole. Ca se saurait s'il y avait un lobby gay, un lobby juif ! Je crois que cet homme a un vrai problème avec l'homosexualité car il en parle tout le temps. Le meilleur service à lui rendre est que l'un de ses fils le devienne ou que lui-même change... Il s'intéresse plus aux homos que les homos ne s'intéressent à lui. La parole est un peu trop libérée de ce point de vue, beaucoup de gens ont le droit de dire beaucoup de conneries ! Je pense à Jean-Paul Guerlain notamment avec qui ils se disputent la palme pour 2012 de la crétinerie. La vieillesse est un naufrage et Guerlain en est la preuve. C'est dommage pour un type comme lui d'avoir des propos qui puent autant, c'est désolant.
La question homo a-t-elle sa bonne place dans la campagne ?
Je suis pour l'ouverture des droits à tous, quels qu'ils soient. On devrait commencer avec les femmes, je suis plutôt féministe. Les femmes sont maltraitées, toutes les blagues sexistes, on a le droit de les tenir et c'est insupportable. Sur la question gay, la France est le dernier pays réactionnaire. Toutes les monarchies qui nous entourent, puisqu'elles sont aux yeux des républicains des symboles de la régression et du conservatisme, toutes ont accordé des lois bien plus ouvertes sur le mariage gay et l'adoption. Cela ne veut pas dire que je suis pour, mais que je suis pour que ce droit existe pour ceux qui en ont envie. Parce que il faut être honnête, à part les gays et les prêtres, personne n'a envie de se marier aujourd'hui !
Nicolas Sarkozy a expliqué au Figaro Magazine "qu'en ces temps troublés, notre société a besoin de repères"...
Ces propos sont le reflet d'une crispation identitaire et d'un repli sur soi qui me gêne. Je trouve qu'au moment où on vit une période désagréable, et où on va en vivre bien d'autres, on doit justement rassembler et être plus dans l'ouverture. C'est l'inverse que beaucoup prônent. Et de la même façon, autant je suis pour une fiscalité plus juste, autant je n'ai pas le sentiment que c'est en disant qu'on va faire maigrir les riches que les pauvres vont grossir. Cela n'a jamais marché, il n'y a pas de vase communicant. Une fois que ceux qui créent de l'emploi se seront tirés avec leurs millions, qui va payer ? Vous, moi ?
Vous revendiquez rarement votre sexualité pour servir la cause gay, vous vous l'interdisez ou c'est un choix ?
Je n'en parle jamais, c'est un choix. Je ne parle pas de mes opinions politiques à part quand on dit de moi que je suis royaliste, ça me va. Je ne parle pas d'argent, de religion ou de sexualité. S'il y a un domaine où on doit garder notre intimité, c'est bien celui-ci. Je n'en ai jamais parlé mais les autres en ont parlé à ma place. Je n'ai jamais attaqué, je trouve ça nul. Je ne veux pas être un porte-parole, un porte drapeau. Mais si les homosexuels sont blessés par des propos outrageants, je serai à leurs côtés pour les défendre.
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