Musique
Sylvie Vartan : "Je n'ai pas eu de traversée du désert, j'en suis moi-même étonnée !"
Publié le 23 décembre 2010 à 12:13
Par Julien Mielcarek
Alors qu'est sorti "Soleil Bleu", Sylvie Vartan évoque ce nouvel album, sa carrière ou encore les médias qui ne lui parlent que de Johnny. Elle explique aussi pourquoi elle a refusé "Dancing with the stars" sur TF1.
Crédits : Abaca Crédits : Abaca© Sylvie Vartan
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Un an seulement après [musique:331230 "Toutes peines confondues"], Sylvie Vartan est déjà de retour avec [musique:415430 "Soleil bleu"], un disque beaucoup mieux accueilli par la critique. Cette fois, c'est Keren Ann et Doriand qui sont aux commandes de ce nouveau disque où participent également d'autres auteurs comme Etienne Daho, Julien Doré ou encore Benjamin Biolay. Un disque branché ? « Non » selon Sylvie Vartan qui nous explique comment est né ce disque. Pour Ozap, elle revient aussi sur sa carrière et ses projets. Entretien.

Ozap : Les critiques de ce nouvel album sont excellentes. On va résumer ça comme ça.
Sylvie Vartan : (rires) Ecoutez oui, c'est un bon résumé !

C'est un résumé qui vous va bien ! C'est le sentiment du travail accompli ou un soulagement ?
Quand on entreprend quelque chose, on espère toujours que ça va plaire. On a toujours l'espoir de faire au mieux et d'arriver à faire le meilleur possible. Forcément, on n'arrive pas forcément à toucher dans le mille. A travers cet album, j'ai l'impression qu'il s'est vraiment placé sous l'ordonnance des étoiles, tout s'est tellement bien imbriqué dès le départ. Le choix des chansons, des réalisateurs, des duos, le mixage, les photos... Tout est venu comme un puzzle avec les pièces rassemblées.

Assez naturellement donc.
Non, pas naturellement. On essaie toujours de faire naturellement mais on n'y arrive en fait jamais. Peut-être que sur les 63 albums que j'ai déjà enregistré, j'ai réussi à faire ça deux fois. C'est à dire pour qu'il y ait plus de cinq ou six chansons formidables.

Quel était l'autre album où vous estimez que ça a fonctionné aussi bien ?
L'album que j'avais enregistré à Nashville et je pense aussi celui que j'avais enregistré à Londres. Je l'avais enregistré en une nuit, c'était extraordinaire ! Il y aussi un facteur chance, tellement de choses rentrent en ligne de compte. On ne peut pas savoir pourquoi quelque chose a plus de succès qu'une autre.



Mais vous sentez, notamment avec les médias, une prime à la « branchitude » et le fait qu'on vous parle beaucoup de ceux qui vous ont entouré sur ce disque/
(Elle interrompt) Ça, ça lasse franchement. Ils ne savent pas quoi dire. Il n'y a pas de branchitude parce que j'aurais pu faire ça avant. Ce sont des rencontres qui arrivent à un moment donné sans vraiment les chercher, c'est ce qui s'est passé. Je ne voulais pas enregistrer un disque si rapidement après le dernier mais il s'est trouvé que j'ai rencontré Keren Ann qui, elle, terminait son album et comme ça a été un enthousiasme mutuel, ça s'est fait très rapidement. A croire que le fait de travailler sous pression a porté ses fruits. Mais il n'y a ni règle, ni recette. Quant à la branchitude, qui est branché et qui ne l'est pas ? Vous savez, être branché et chanter pour deux personnes, ce n'est pas forcément être branché. Il y a des gens de talent, un point c'est tout. Peu importe leur âge. Il y a des gens jeunes qui ont du talent, d'autres plus âgés qui n'en ont pas. Il n'y a pas de règle. J'ai fait appel à des gens qui, selon mes critères, ont du talent.

Du coup, vous trouvez ça désagréable qu'on résume en disant que vous êtes allé chercher...
(Elle interrompt) Vous savez, je ne suis plus à ça près, depuis le temps (rires) ! Ce qui compte, c'est la réaction du public. Je suis quelqu'un qui passe beaucoup de temps sur scène à communiquer avec les gens qui viennent me voir. Je chante onze de ces nouvelles chansons sur scène et c'est vrai que l'accueil a été absolument au-delà de mes espérances. C'est vrai que les petits du showbiz vous disent toujours qu'il ne faut pas mettre trop de chansons nouvelles parce que les gens n'aiment pas ça. C'est vrai mais, moi, je pars du principe que si les chansons tiennent la route et qu'elles captent l'intérêt des gens, ils ne se posent pas la question de savoir si elle est connue ou pas. Ils sont ou non captivés, c'est tout.

Au théâtre du Châtelet, vous avez d'ailleurs eu de bonnes surprises ? Il parait que le public a particulièrement aimé "Personne".
Ils la chantaient, c'est incroyable. Je ne sais pas où ils avaient appris les paroles ! Je suis très heureuse d'avoir des chansons rythmées comme "Personne", "La femme coupée en deux" ou "La prisonnière" d'Etienne Daho. C'est ce qu'il y a de plus difficile à trouver et, moi, j'aime que mes spectacles soient dans des couleurs différentes, avec le côté interprète avec les chansons à texte où j'extériorise mes émotions, mais aussi tout ce qui est rythmé. J'ai quand même commencé comme chanteuse de rock (rires).

Vous venez de me dire que c'était le hasard qui avait fait que vous sortiez très vite un disque après le précédent, "Toutes peines confondues". Mais le fait que ce disque soit éclipsé...
Il n'est pas vraiment éclipsé car j'ai quand même gardé plusieurs chansons sur scène. C'est un disque charnière pour moi car il m'a permis de donner une autre orientation à mes concerts, de plus axer sur l'intimité et le fait de me rapprocher des gens. J'arrive ainsi à faire le pont entre le métier de comédienne et le métier de chanteuse.



Avez-vous la pression des ventes ou faites-vous partie de ces artistes qui ont le luxe de se dire qu'ils feront quoiqu'il arrive un nouveau disque ?
Je dois dire que si je regarde toutes ces années que j'ai passé à parcourir le monde, je me considère comme quelqu'un d'extrêmement privilégiée d'avoir toujours un public extraordinaire, qui évolue et qui est différent des autres publics. Ce sont des gens qui participent énormément, ils ne sont pas calmes ou sages et j'aime ça. C'est très dopant et motivant. Et c'est vrai que je n'ai pas eu de traversée du désert, c'est quand même extraordinaire, j'en suis moi-même étonnée. Les années où j'ai décidé de m'arrêter, c'était un choix délibéré. Je suis très touchée par l'amour du public car je peux continuer à faire ce que j'aime.

Avec la crise du disque, avez-vous néanmoins senti au fil des années avoir moins de moyens pour faire votre travail ?
Oui, c'est vrai. Pas en studio mais surtout sur scène, c'est beaucoup plus marquant. Mais ça tombe bien parce que ça correspond à une envie personnelle. J'ai tellement fait de grandes scènes avec quinze danseurs, des projections, du bruit, de la fureur et une profusion de lumières et de folies. J'ai l'impression d'avoir fait le tour de tout ce que je pouvais faire. J'ai peut-être le sentiment d'avoir fait le tour de tout ça et de me lasser de ce genre de barnum où, en fait, vous échappez aux gens parce qu'ils sont éblouis par ce qu'ils voient et l'artiste n'existe plus quelque part. Quand vous faites un récital, on centre beaucoup plus l'intérêt sur ce qu'on a à dire et qui on est. Peut-être est-ce pour la bonne cause.

Vous chantez beaucoup sur ce disque l'amour déçu, le chagrin...
C'est ce qui fait pleurer le coeur !

Ça vient de votre envie de chanter la mélancolie ou est-ce tous simplement les auteurs qui n'écrivent pas sur le bonheur ?
Il y a des deux. C'est en fait très difficile d'écrire une chanson sur le bonheur ou même des chansons légères (rires). Sur le disque, il y a quand même "La moue" qui est une chanson légère ou encore avec "Tous ces garçons" qui est une façon différente de parler de l'homosexualité sans pathos. Mais ce qui touche le cœur, c'est quand même la mélancolie.



Vous assumez pleinement votre statut d'interprète. Il n'y a jamais de frustration à ne pas écrire vos chansons ?
J'écris les musiques mais, pour les paroles, je pense que je ne suis pas capable de faire aussi bien que ceux qui écrivent pour moi donc voilà. Je connais mes limites et mes possibilités.

Mais comment travaillez-vous que les textes vous collent aussi bien. "Soit dit en passant" est clairement destinée à votre fille. En l'écoutant, on pourrait croire que c'est vous qui l'avait écrite.
Je choisis justement les chansons que j'aurais pu écrire. Quand on chante, on est soi-même. Le choix des chansons et la façon dont il se présente est très révélateur de la personnalité de quelqu'un. Tout est vrai, il n'y pas de tricherie quand on chante. Forcément, mes choix sont toujours proches de la personne que je suis, de mes émotions, sinon je serai incapable de les chanter. Les chansons doivent d'abord m'émouvoir si je veux pouvoir émouvoir les autres. Une chanson comme "Mon enfance" écrite par Barbara par exemple, si j'avais eu le talent d'écrire, je n'aurais pas pu mieux écrire pour moi que cette chanson-là. C'est troublant et c'est vrai que j'ai énormément de plaisir à la chanter car j'ai l'impression de chanter ma vie.

Ca veut dire que, quand vous donnez un concert, ça ne peut pas être de la pure comédie ?
Non, pas moi en tout cas. Quand on joue, on peut se glisser dans la peau de quelqu'un d'autre mais quand on chante, on est authentique.

Sur la version collector du disque, il y a le duo que vous aviez fait pour France 3 avec votre fille. Avec tout ce que vous avez pris de la part de la presse, vous n'avez pas peur de vous afficher avec votre fille ?
Ah mais ça, c'est un choix aussi. Quand j'ai commencé à réfléchir à ce que j'allais faire pour cette émission, j'ai visionné certaines émissions et je suis tombé sur une archive où je chantais "L'homme et l'enfant", mais dans une version féminine, avec ma fille alors qu'elle avait six ans. Elle était absolument craquante mais je ne voulais pas qu'on la voit donc on voyait ses cheveux. Mais j'étais tellement frustrée en revoyant l'émission. Je me suis dit "Tant pis" pour cette fois-ci et on a fait quelque chose qui nous ressemble. Et quand elle sera plus grande, ça sera un moment unique dans sa vie. J'aurais adoré me voir à 13 ans chantant avec ma mère, j'aurais adoré. Je me suis dit que j'allais le faire mais ce n'est pas une photo, juste un passage comme ça.

Un passage qui n'a pas eu de conséquence particulière ?
Non, et elle va grandir donc elle n'aura plus la même tête (rires).



Il y a un passage obligé dans vos interviews mais on m'a dit que ça vous agaçait. On vous parle tout le temps de Johnny.
Et quand on interviewe Johnny, est-ce qu'on lui parle tout le temps de Sylvie ? (rires) Il faut demander ça à sa femme !

Mais à la longue, comment vous le percevez ?
Mais c'est normal. Nous avons commencé ensemble, nous avons une grande histoire d'amour ensemble, nous avons un fils donc c'est normal. Nous avons vécu les années lumière ensemble donc nos cœurs sont forcément plein de souvenirs, c'est normal.

Mais le fait qu'on y revienne à chaque fois...
Ça doit être une nostalgie de la part des gens ma parole ! (rires)

Concernant la promotion, on évoquait votre émission de variété-fiction sur France 3. Aujourd'hui, si on veut chanter à la télévision, on doit réfléchir soi-même à fabriquer des programmes ?
Moi, je fonctionne comme ça et je ne sais pas ce qu'il en est pour les autres. C'est rare mais j'aime ça sous cette forme. Il n'y avait pas de présentateur, une idée conductrice, et je fais ça avec des producteurs qui m'ont proposé des choses attrayantes. C'est excitant de prendre ce parti pris.

Vous acceptez d'aller n'importe où à la télévision ?
Non, pas n'importe où, surtout pas (rires). Ça dépend de ce qu'on me propose.



On vous a proposé Dancing with the stars mais il parait que vous avez refusé d'aller danser sur TF1.
Ah oui, non ! Vous vous rendez compte ? De passer son temps en répétitions ? Pour faire quoi ? Non ! J'ai suffisamment dansé comme ça, je ne suis pas frustrée de ce côté-là (rires).

Mais les gens ont peut-être aujourd'hui envie de voir les artistes dans d'autres registres que les variétés, vous le comprenez ?
Je peux comprendre qu'on ait envie de faire autrement mais tout cela est personnel. Ca dépend des gens et de leur musique, de la façon dont ils se présentent. Tout le monde ne peut pas faire les mêmes choses et ce qui me va à moi ne va pas forcément aller à quelqu'un d'autre.

Vous allez faire vos premiers pas au théâtre, au printemps, dans L'amour, la mort, les fringues. Ca parle de quoi ?
De fringues ! (rires). Par le biais des fringues, cinq femmes racontent leurs vies sur un ton léger et parfois grave, mais c'est surtout une comédie.

C'est une volonté de vouloir vous orienter plus vers la comédie ? Pourquoi ce n'est pas venu plus tôt ?
Je ne suis pas quelqu'un qui va demander. Je n'ai jamais rien demandé, je n'ai pas fait d'audition. Je ne sais pas camper devant la porte d'un metteur en scène, ou lui écrire. Je ne sais pas faire les choses utiles peut-être. J'attends et, en attendant, je fais ce que je sais faire, c'est-à-dire chanter, et faire mes spectacles.

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