Un exercice rare et bienvenu de transparence et d'autocritique. Vendredi, Daniel Schneidermann recevait sur le site "Arrêt sur images" le député La France insoumise Louis Boyard pour évoquer son affrontement avec Cyril Hanouna, survenu une semaine plus tôt. Le journaliste est également revenu avec le député sur son passé de dealer, qu'il avait lui-même révélé en 2021, à l'époque où il était chroniqueur dans "Touche pas à mon poste !" sur C8.
Dans la foulée de l'émission mise en ligne vendredi, le médiateur de la rédaction d''Arrêt sur images' révèle à ses lecteurs que la version initiale de cette séquence n'a pas été conservée au montage à la demande de Louis Boyard. Après l'émission tournée dans les conditions du direct, Daniel Schneidermann a en effet proposé au député, mal à l'aise, de réenregistrer la séquence. Une première dans l'histoire de l'émission née en 1995. Interrogé par le médiateur du site de critiques média, le journaliste, qui n'avait pas informé la rédaction et la rédaction en chef de son initiative, a dû s'en expliquer.
Dans la séquence initiale, Louis Boyard a confié à Daniel Schneidermann qu'il ne souhaitait pas s'étaler sur le sujet de la drogue, avant de s'emporter contre le journaliste. "Bah me demandez pas de faire des choses que vous connaissez pas (...) Respectez la parole des gens", lui a-t-il reproché. Fin de l'émission. Louis Boyard quitte le plateau, "visiblement agacé", rapporte le médiateur du site. Avant de revenir dans les locaux de l'émission pour "présenter ses excuses" à Daniel Schneidermann "pour son énervement".
Gêné par la séquence, le député, écrit le médiateur, "propose alors de couper la séquence". Ce que Daniel Schneidermann refuse : "On ne coupe pas nos émissions", lui indique-t-il. Mais "après un quart d'heure d'échanges", les deux parties trouvent une alternative. "La séquence sera coupée, mais une nouvelle version doit être tournée sur-le-champ, avec l'extrait de 'TPMP' de 2021 où le député LFI évoquait son passé de dealer. C'est cette fin d'émission que nos abonnés peuvent visionner aujourd'hui", relate le médiateur.
Face à une rédaction en demande d'explications, Daniel Schneidermann s'est ainsi justifié : "Je cherche souvent à pousser mes invités dans leurs retranchements, pas à créer des malaises (...) Je n'aime pas piéger mes invités. Je préfère quand ils sont dans des bonnes conditions pour produire une réflexion", assure-t-il.
Si "la deuxième version est incontestablement plus intéressante que la première", selon Daniel Schneidermann, le journaliste fait son mea culpa. "Je ne suis pas persuadé d'avoir pris la bonne décision", indique-t-il. Plus définitif, le médiateur craint que cette décision fasse jurisprudence à l'avenir et espère qu'une telle initiative "ne se reproduise plus".