Chaque année, en janvier, c'est l'événement de la rentrée de M6. Le lundi, la chaîne dégaine "Top Chef", son concours culinaire porté par son animateur le plus populaire, un jury convaincant, à la fois sympathique et très cash, et des candidats qu'on adore, ou qu'on adore détester. Au fil des années, "Top Chef" a révélé des personnalités fortes, des vrais talents de la cuisine, et proposé des moments de télé incroyables, autant que des plats qui restent dans les mémoires des aficionados.
Mais la cuvée 2014 démarre difficilement. Le lancement, qui aurait pourtant dû bénéficier de la présence de dix anciens candidats que le public connaît déjà, a signé la pire audience du programme depuis le tout premier épisode de la première saison, avec 3,1 millions de téléspectateurs. Pire, les scores s'effrittent de semaine en semaine. L'émission est ainsi passée sous les 3 millions de fidèles lundi dernier, et a confirmé hier avec moins de 2,9 millions de téléspectateurs, pour 13,7% de parts d'audience sur l'ensemble du public et 21,7% sur les ménagères. L'an dernier, le troisième épisode de "Top Chef" avait réuni 3,7 millions de fidèles, soit 17% du public et 26% des ménagères.
Pourquoi une si nette érosion et surtout, pourquoi une tendance à la baisse ? puremedias.com examine les facteurs extérieurs et la concurrence un peu différente cette année, mais aussi les évolutions du programme. Si tout est déjà en boîte pour la saison actuelle, peut-être faut-il y réfléchir rapidement pour ne pas commettre les mêmes erreurs l'an prochain... ?
Si "Top Chef" a été lancé face à "Castle" sur France 2, comme l'an dernier, la concurrence est plus forte sur TF1. Alors que les deux premiers épisodes du concours culinaire de M6 avaient affronté le faible "Doc Martin" l'an dernier, c'est face à Clem que la saison 5 se retrouve confrontée depuis son arrivée. Or, "Clem" est nettement plus puissante que la série portée par Thierry Lhermitte, surtout sur les ménagères. Face au lancement de "Top Chef", "Clem" a réuni 26% des ménagères, et est montée jusqu'à 30% hier soir, là où Thierry Lhermitte n'atteignait pas les 20%. Ajoutez à cela la nouvelle concurrence des cinq nouvelles chaînes TNT, qui ont réuni hier soir plus de 600.000 téléspectateurs, et le paysage concurrentiel est indéniablement différent de celui de l'an dernier.
L'an dernier, nous publiions un article dans lequel nous étudiions l'influence qu'aurait un arrêt de "Top Chef" à 22h45. Car avec les reports des autres chaînes à la fin des premières parties de soirée, M6 enregistrait souvent une audience supérieure pour la deuxième partie de l'émission que pour la première. Cette année, ce n'est plus le cas. Au mieux, la courbe est stable. Au pire, elle chute. Certes, allonger l'émission augmente mécaniquement la part d'audience. Mais au bout de cinq ans, difficile d'imaginer que la durée n'ait pas d'effet décourageant pour les téléspectateurs. Certains fidèles ont peut-être tout simplement décidé d'abandonner l'émission plutôt que de rester debout jusque minuit tous les lundis, ou de devoir rattraper l'émission en replay.
Pour allonger artificiellement les primes, la production a recours depuis l'an dernier à des défis. En plein milieu d'une épreuve, les candidats sont donc interrompus pour se plier à un défi qui peut leur permettre de se qualifier plus rapidement. Voilà quelques minutes de contenus glanées en plus, mais le téléspectateur s'y perd. Hier soir, le vice est allé jusqu'à intégrer un défi dans l'épreuve de la dernière chance ! A quand le "défi-express" qui interrompt le défi qui interrompt lui-même l'épreuve ? On se croirait presque dans "Inception"... Par ailleurs, on passe à côté de beaux plats. Hier, les fans de pâtes n'ont pas pu découvrir ce que Pierre avait concocté pour sa dernière chance, puisque le candidat s'est qualifié lors d'un défi d'une inutilité affligeante : la béarnaise.
Hier soir, les fans de "Top Chef" espéraient, façon "Koh-Lanta", une réunification. Au lieu de cela, ils ont eu droit à un affrontement très inégal. La production a préféré opposer les nouveaux aux anciens mais, ces derniers n'étant que quatre, seuls quatre nouveaux ont pu cuisiner. Les autres se sont tourné les pouces. Si le but était d'opposer systématiquement anciens et nouveaux, il ne fallait pas sélectionner quatre anciens et douze nouveaux... Hier, on a vu certains nouveaux cuisiner pour la première fois... lors de la dernière chance.
A l'automne, "Masterchef" a vu ses audiences fondre. Beaucoup y ont vu le résultat d'un changement de case et d'un passage au vendredi, ou encore le prix à payer après trois saisons décevantes - en particulier la troisième, au casting raté. Mais si cette baisse de régime était annonciatrice d'une tendance plus générale ? Dans ce cas, "Top Chef" devra aller plus loin pour réinventer son format. La présence des grands classiques comme la boîte noire ou la guerre des restaurants est bienvenue, mais de nouvelles épreuves marquantes sont nécessaires. La bonne nouvelle, c'est que M6 en a déjà donné un aperçu lors de la conférence de présentation de la saison, et notamment l'épreuve du témoin à son insu, ou la participation des experts du Guide Michelin. Encore faut-il que les audiences arrêtent de s'éroder d'ici-là...