Un débatteur de la société civile visé par Adrien Quatennens. Hier soir, franceinfo: recevait Jean-Luc Mélenchon dans son émission quotidienne "Votre instant politique". Parfois tendu, l'échange avec les journalistes Gilles Bornstein et Adrien Rohard a laissé la place vers 19h40 à une discussion entre le candidat à la présidentielle et un représentant de la société civil choisi par franceinfo:. Il s'agissait hier d'Antoine Demeyer, présenté à l'antenne par Adrien Rohard comme un "conducteur de bus" d'Annecy "déçu de la politique".
"Ce n'est pas un secret de dire qu'Antoine n'a jamais voté pour vous, Jean-Luc Mélenchon, et qu'il en a un petit peu marre globalement de la classe politique et il va nous dire pour quoi", a ajouté le journaliste de la chaîne info, avant de passer la parole au chauffeur. Ce dernier a alors fustigé les "promesses non-tenues" des responsables politiques, depuis Nicolas Sarkozy jusqu'à Jean-Luc Mélenchon. Antoine Demeyer a conclu son intervention en affirmant que son choix n'était pas encore arrêté pour la prochaine élection présidentielle de 2022.
La neutralité du témoin sélectionné par franceinfo: a été remise en question dès le soir-même par Adrien Quatennens. Sur Twitter, le député LFI a souligné la proximité affichée par le passé par Antoine Demeyer avec les idées de Marine Le Pen. Il a ainsi publié sur le réseau social un article du "Huffington Post" datant de 2016 évoquant déjà le conducteur de bus. Ce dernier venait alors de faire parler de lui après avoir interpellé le président François Hollande sur le plateau d'une grande émission politique diffusée en prime time sur France 2.
En 2016, Antoine Demeyer se présentait ainsi comme un déçu de la gauche votant désormais à l'extrême droite, sans toutefois être encarté au FN. Après sa participation remarquée à l'émission de France 2, le chauffeur de bus avait rencontré Marine Le Pen, la leader frontiste ayant estimé publiquement à cette époque qu'Antoine Demeyer ferait "un bon député".
Contacté par puremedias.com, Adrien Quatennens n'a pas donné suite. Egalement contacté, l'entourage de Jean-Luc Mélenchon s'est pour sa part agacé de l'absence de référence à l'antenne à cette proximité passée d'Antoine Demeyer. "Personne n'est un citoyen neutre. Ceux qui s'expriment sur un plateau de télé sont en général des gens qui sont déjà engagés d'une façon ou d'une autre. Nous, à La France insoumise, nous avons souvent dénoncé ça car il est toujours important de savoir d'où les gens parlent. Ce n'est pas uniquement pour la personne interrogée, mais aussi pour la personne qui écoute", tient à faire savoir un porte-parole de Jean-Luc Mélenchon.
Et d'ajouter : "Peut-être qu'il (Antoine Demeyer, ndlr) est sincère quand il dit qu'il hésite sur son vote. Ce n'est pas la personne en particulier qui est incriminée, c'est ce système qui est à la mode depuis plusieurs années : on vous met des Français comme si c'était la parole de n'importe qui dans la rue. C'est faux ! C'est une espèce de leurre. Est-ce que ça apporte vraiment quelque chose à un débat ? Qu'est-ce qu'on y gagne ? Est-ce qu'on n'aurait pas intérêt à dire d'où les gens parlent pour éclairer le débat ?".
Egalement joint par puremedias.com, Gilles Bornstein, l'un des intervieweurs de Jean-Luc Mélenchon hier soir, a tenu à nier fermement toute volonté de dissimulation du passé de son intervenant d'hier, ce dernier pouvant, rappelle-t-il, être découvert "en seulement un clic sur Google". "Nous n'avons rien voulu cacher du tout !", se défend ainsi l'intervieweur, expliquant que le bouleversement en direct du conducteur de l'émission a fait passer hier à la trappe la question d'Adrien Rohard qui devait justement rappeler les sympathies passées d'Antoine Demeyer pour les idées de Marine Le Pen. Et Gilles Borstein de résumer : "Nous voulions simplement un dialogue entre Jean-Luc Mélenchon et un électeur 'fâché mais pas facho', ceux-là mêmes que Jean-Luc Mélenchon doit convaincre pour espérer être élu en 2022. C'est l'ambition de 'Votre instant politique' d'organiser ce dialogue entre les électeurs de notre panel et des responsables politiques".
Benjamin Meffre et Florian Guadalupe