Son témoignage avait fait le tour des médias. Samedi dernier, au lendemain de l'assassinat de Samuel Paty, professeur d'histoire-géographie dans un collège de Conflans-Sainte-Honorine, de nombreuses personnes s'étaient rassemblées devant l'établissement pour faire part de leur émotion. Sur les réseaux sociaux, le témoignage d'un adolescent de 12 ans recueilli par le journaliste indépendant Clément Lanot était devenu viral. On y voyait cet élève, scolarisé dans le collège, mais qui n'avait pas Samuel Paty comme professeur, déclarer notamment, plein de sagesse : "Il faut continuer à apprendre. Sinon les terroristes vont gagner". Une vidéo partagée plus de 2,5 millions de fois.
Le collégien est vite devenu un symbole, au point d'être invité à la télévision, dans "C Politique"* sur France 5 ou à la radio, sur France Inter où il a été interrogé lundi par Léa Salamé. Le même jour, le quotidien "Libération" a dressé son portrait sur son site internet, tandis que de nombreux journaux ont relayé son témoignage dans l'intervalle. Une forte médiatisation fulgurante qui a dérangé Lyes Louffok, membre du Conseil national de la protection de l'enfance. Ce dernier a appelé les médias à la raison, en soulignant que l'adolescent est un enfant fragile, placé sous la responsabilité de l'aide sociale à l'enfance du département des Yvelines.
Le site "Causette" s'est interrogé à son tour en dénonçant "une exposition médiatique qui questionne notre responsabilité collective" et a révélé que c'est le pédopsychiatre qui suit l'enfant qui a répondu favorablement aux différentes sollicitations, en accord avec le jeune homme. Mais dans un communiqué publié mardi, le département des Yvelines, s'est fendu d'une mise au point.
"Le visage, les propos et l'identité d'un jeune collégien de 12 ans ont été dévoilés sans autorisation par un grand nombre de médias lui demandant de s'exprimer après le drame", rappelle le Conseil départemental, dont dépend l'adolescent. Et d'ajouter : "À ce jour, les détenteurs de l'exercice de l'autorité parentale n'ont donné aucune autorisation pour que celui-ci soit interviewé, ni que son visage et son identité soient dévoilés, tant sur des médias écrits qu'audiovisuels, mais aussi sur le web ou les réseaux sociaux".
L'institution se défend de toute prise d'initiative en la matière. "A aucun moment les services de l'aide sociale à l'enfance ne se sont substitués aux représentants légaux de ce mineur et n'ont, au contraire, eu de cesse de rappeler ce cadre et l'absence d'autorisation".
La responsabilité de l'éducateur et du médecin qui ont épaulés l'adolescent durant cet épisode médiatique est pointée : "Non seulement ces deux personnes n'ont jamais été habilitées à délivrer une telle autorisation mais l'association qui les emploie leur avait par ailleurs préalablement signifié cette absence d'autorisation". Condamnant l'attitude des médias, le département des Yvelines demande désormais que le témoignage de l'adolescent soit supprimé de tous les supports, sous peine d'engager des poursuites civiles et pénales "dans l'intérêt du mineur". Pour l'heure, seul le journaliste indépendant qui avait recueilli la parole de l'adolescent en premier a supprimé sa vidéo.
* puremedias.com a relayé lundi le passage de l'adolescent dans "C Politique", ignorant à l'époque l'absence de délivrance d'une autorisation par ses représentants légaux. La séquence a été supprimée de notre site conformément à la demande du département des Yvelines.