Nouveau casse-tête en vue pour France 2. Alors que la chaîne a prévu d'organiser le mercredi 22 mai prochain un second et ultime débat en partenariat avec France Inter autour des élections européennes à quelques jours seulement du scrutin, certains des candidats invités protestent contre les modalités d'organisation de cette émission. En cause, le fait que la deuxième chaîne a décidé de scinder son débat en deux parties. La première partie de soirée doit ainsi réunir six personnalités : Raphël Glucksmann (Place publique-Parti socialiste), Marine Le Pen (Rassemblement national), Yannick Jadot (Europe Ecologie-Les Verts), Stanislas Guérini (La République en marche), Manon Aubry (La France insoumise) et Laurent Wauquiez (Les Républicains).
Les autres candidats invités à prendre part à l'échange ne pourront donc pas interpeller les principaux partis présentant à une liste à ce scrutin puisque France 2 a décidé de tous les regrouper en deuxième partie de soirée. C'est le cas pour Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France), Ian Brossat (Parti communiste), Jean-Christophe Lagarde (UDI), François Asselineau (UPR), le chanteur Francis Lalanne (Alliance jaune), Dominique Bourg (Urgence écologie), Florian Philippot (Les Patriotes), Nathalie Arthaud (Lutte ouvrière) et Benoît Hamon (Génération·s). 15 listes sont donc annoncées, sur un total de 34 présentant des candidats au scrutin du 26 mai prochain.
Dans une interview donnée au "Monde", Benoît Hamon n'a pas de mots assez durs pour qualifier le débat de France 2 et menace même de le boycotter si la chaîne publique n'infléchit pas sa position. "Ils ont accepté que des listes soient représentées par des chefs de parti comme par exemple Stanislas Guerini (La République en marche) ou Marine Le Pen (Rassemblement national) à la place des têtes de liste", déplore-t-il à propos de la première partie de soirée. "Tous les autres sont renvoyés en deuxième partie de soirée quand les Français sont au lit, avec une audience trois fois inférieure. C'est méprisant pour la démocratie, le pluralisme et l'Europe dont tout le monde semble se contreficher".
Et le candidat de porter l'estocade à propos de France Télévisions : "Le service public est censé avoir une responsabilité supérieure. J'observe que BFMTV, télévision privée, souvent critiquée, est plus respectueuse du pluralisme". Invité sur Public Sénat ce mardi, il a même reproché à la présidente du groupe public, Delphine Ernotte, de vouloir donner "quelques gages à l'Elysée" afin d'obtenir un second mandat.
Benoît Hamon n'est pas le seul à vouloir faire entendre sa voix. Le candidat du PCF, Ian Brossat, a mis sa participation en suspens et annoncé sur le site de son parti sa volonté de s'entretenir "sans délai" avec le Conseil supérieur de l'audiovisuel sur le sujet pour amener France 2 à revoir sa copie. Même son de cloche pour Florian Philippot (Les Patriotes), Jean-Christophe Lagarde (UDI) ou Nicolas Dupont-Aignan qui dénonce de son côté une "marque incroyable d'irrespect" envers les électeurs.
Invité à réagir à la polémique naissante par l'AFP, Thomas Sotto, qui co-animera cette soirée aux côtés d'Alexandra Bensaid, souligne que les critères de représentativité imposés par le CSA ont été respectés "rigoureusement" et "scrupuleusement". Des critères qui tiennent compte des sondages, du nombre de parlementaires ou encore de la contribution au débat électoral. Et le journaliste, visiblement lassé par ces polémiques, entend siffler la fin de la récréation. "Ces petites intimidations, ça suffit", s'exclame-t-il, assurant qu'aucun candidat ne sera favorisé plus qu'un autre et que le découpage du débat en deux parties participe à la fluidité de l'ensemble. De même, la présence de chefs de partis est destinée selon lui à suppléer les candidats qui seront en meeting le soir de la diffusion du débat.
Déjà, pour son premier débat spécial européennes proposé le 4 avril dernier, France 2 avait eu maille à partir avec certains candidats qui n'avaient pas été invités à participer. Ian Brossat avait été intégré dans le dispositif après avoir envoyé une lettre de protestation, tandis que Benoît Hamon avaitsaisi le tribunal administratif de Paris, qui lui avait donné raison et avait obligé dans le même temps la chaîne à recevoir également Florian Philippot et François Asselineau. France 2 avait fait appel de cette décision en dénonçant une "atteinte grave à la liberté de la presse". Un appel qu'elle avait remporté tout en décidant de maintenir les trois hommes dans son débat, "par élégance", selon les termes employés par Yannick Letranchant, le directeur de l'information de France Télévisions.