Pas rancunier, François Hollande ? Malgré les nombreuses affaires révélées par "Mediapart" ces derniers mois, l'Elysée aurait tout fait pour tenter de lui éviter un redressement fiscal colossal, plus de 4 millions d'euros. C'est un proche du ministre du Budget qui fait état au Canard Enchaîné de "multiples pressions" venant de l'Elysée pour "passer l'éponge sur la dette fiscale" du journal en ligne.
Pourquoi une telle indulgence supposée de la part du Chef de l'Etat ? Nos confrères rappellent que le patron de Mediapart, Edwy Plenel, est un ami de François Hollande, avec qui il a déjà écrit un livre. Ami qui est lui persuadé d'une vengeance de l'administration fiscale après les révélations de "Mediapart" sur l'affaire Cahuzac. Bernard Cazeneuve, successeur de Cahuzac à l'époque dément et assure qu'il y a une "pratique de non-intervention du ministre vis-à-vis de l'administration fiscale".
Les consignes de François Hollande n'ont visiblement eu aucun effet puis que le journal d'Edwy Plenel a annoncé avoir reçu en juillet dernier une notification de redressement fiscal de 4,2 millions d'euros pour ses exercices 2008 à 2013. Le fisc reproche au titre de presse de s'être auto-appliqué un taux de TVA de 2,1% sur ses abonnements en ligne, un taux super-réduit réservé en principe à la presse papier. Le taux légal de TVA pour les pure players était ainsi normalement de 19,6% sur la période concernée. Pour cette entorse à la réglementation, Bercy réclament 3 millions d'euros à "Médiapart", auxquels s'ajoutent 200.000 euros de pénalités de retard et 1 million d'euros pour "mauvaise foi", soit 4,2 millions d'euros en tout.
Depuis plusieurs années, Edwy Plenel dénonce "l'inégalité de traitement" qui existerait entre la presse en ligne et la presse papier en matière de TVA, réclamant au gouvernement l'alignement des deux taxes. En attendant d'avoir gain de cause, il s'était auto-appliqué le taux réduit, tout comme d'autres sites tel "Arrêt sur Images".
Le patron de "Médiapart" a finalement obtenu gain de cause en février dernier, date à laquelle le Parlement a voté une proposition de loi visant à appliquer également la TVA super-réduite à la presse en ligne. Mais la mesure ne s'applique qu'à partir du 1er février 2014, et Bercy ne semble pas vouloir lui donner une portée rétroactive. "Nous n'avons jamais été des fraudeurs. Nous avons défendu l'égalité entre la presse numérique et la presse papier depuis le départ et le Parlement nous a donné raison dans un vote unanime", a fait valoir Edwy Plenel.