François Sagat© ADLTV - Pascal Roche
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Ce soir, dès 20h50, Canal+ propose six heures de programmation spéciale « consacrée aux communautés gays ». Au cours de cette soirée spéciale, la chaîne proposera à 23h55 un documentaire inédit de 40 minutes consacré à l'acteur François Sagat, véritable pornstar révélée en France et connue à travers le monde. L'acteur accepte de se livrer dans ce film à l'esthétique très réussie en amenant notamment les caméras dans sa ville natale, à Cognac. Pour puremedias.com, François Sagat a accepté d'évoquer ce documentaire et de se confier sur sa carrière, ses envies au cinéma et son expérience dans Homme au bain, le dernier film de Christophe Honoré. Entretien.puremedias.com : Vous semblez timide en interview, c'est en tout cas l'a priori que j'ai de vous. Vous comprenez aujourd'hui qu'on s'intéresse à vous ?
François Sagat : C'est l'inverse justement (rires). Ce n'est pas que ce n'est pas mon truc, c'est juste de se décider à en commencer une mais après, je ne suis jamais mal à l'aise en interview. Je ne peux pas savoir si on s'intéresse vraiment à moi. Qu'on veuille me voir en action peut-être mais de m'entendre parler, je sais que beaucoup de gens n'ont pas forcément envie de m'entendre parler. Avant, je regardais beaucoup les réactions des gens sur internet, les commentaires sur des blogs etc. et je voyais souvent que j'agaçais. Plus je m'exprimais et plus j'agaçais. A l'époque où je faisais du porno, c'était plus une curiosité, c'était agréable de voir une créature en action mais à partir du moment où j'ai commencé à vouloir proposer des choses de moi-même, j'ai l'impression que je commençais à agacer ceux qui me connaissaient dès le départ.
Quand on regarde l'image que vous avez dans les médias et ce que les gens peuvent en dire, vous êtes passé de l'acteur porno à un mec ultra-branché...
(il interrompt) Alors branché, ça a toujours été pour moi quelque chose de péjoratif. Branché, c'est toujours provisoire, c'est toujours ringard au final. Moi, dans la conception des choses, j'ai toujours aimé la simplicité. Effectivement, quand on me voit dans la rue, on me remarque mais, moi, je me trouve simple. Physiquement, je ne me trouve pas si sophistiqué que ça. Donc le fait d'être branché, c'est dans l'air du temps un moment et après, ça disparait. Branché, c'est péjoratif.
Mais vous le vivez comme ça ? Que des médias très respectables, très culturels s'intéressent à vous...
C'est très parisien en fait. Après il y a aussi des choses à faire à l'international mais j'ai l'impression que c'est très parisien tout ce truc qu'il y a autour en ce moment, même le fait d'avoir fait ce film pour Honoré a été un espèce de... c'était entre la blague et la nouveauté.
La blague carrément ? Sur le fait d'avoir choisi un acteur venu du porno ?
Je parle de la critique de la presse gay par rapport à ça. J'ai l'impression que l'opinion générale d'une certaine presse gay était de dire que c'était du foutage de gueule, qu'il n'y avait finalement pas de secret et que les bonnes recettes, c'était de prendre un acteur porno, du cul, de le mettre dans un film d'auteur et de faire un paquet et que ça allait marcher. Je ne pense pas que ce soit si simple que ça en fait. Après, c'est plus ou moins réussi dans l'impact que ça a d'un point de vue cinématographique mais je trouve que les gens se sont un petit peu énervés rapidement. C'est mon point de vue.
Vous avez réfléchi à ce changement d'image. Est-ce que vous vous êtes dit un jour "Je veux sortir du porno" ?
En fait, j'avais déjà une esthétique avant même de faire du porno, j'avais déjà des envies, un univers. J'ai des références, modestes soient-elles. J'ai une culture, assez faible, mais j'en ai quand même une petite. Le fait de faire du porno, c'était juste une confirmation d'une envie personnelle, d'un fantasme par rapport au corps et, en fait, je pense que c'est un passage, une étape. Effectivement, je suis connu pour ça parce que c'est ce qui m'a montré au grand public mais le fait de vouloir arrêter absolument, c'est que j'en ai en fait assez. Je ne pense pas que ce soit nécessaire de continuer à tourner à tout prix, d'être sur le devant de la scène dans ce secteur-là. Je ne renie rien, je ne veux pas renier le cul. C'est juste que je me vois mal aujourd'hui en train de tourner une scène. Je me sentirais mal, je sentirais que ce n'est pas le bon moment ou alors d'une autre manière, pas d'une façon commerciale.
Mais vous aviez à un moment peur de ne pas réussir à lâcher ça ?
Oui, c'est tellement addictif en fait. Le travail en lui-même est très excitant à faire, je dis le travail parce que ce n'est pas qu'un acte sexuel, c'est surtout un travail de composition. J'ai toujours aimé le faire parce que je me suis rendu compte que j'étais opérationnel, capable et que j'aimais le faire. C'est juste ce qui se passe autour qui est dangereux et toute cette promo à chaque fois qui m'a freiné en fait.
Mais est-ce que vous pouvez vous le permettre, ne serait-ce que d'un aspect financier ?
Je me suis forcé et, effectivement, c'est dur financièrement. Je galère mais il y a des alternatives et il y a tout le temps d'autres choses à faire. Je ne suis pas seul non plus donc plan B, on essaie. Il faut résister. Si je continue aujourd'hui, j'aurais peut-être plus d'argent mais, en même temps, mon image va s'altérer beaucoup plus vite donc je préfère être précautionneux. C'est risqué mais mieux vaut prévenir que guérir. En tout cas, ce n'est pas une envie.
Vous avez aussi accepté de faire ce documentaire de Canal pour accentuer cette transition. Le doc est d'ailleurs présenté comme "Vous allez voir qui est vraiment François Sagat".
C'est un peu ça mais est-ce qu'on sait tout de moi ? Pas forcément. Je ne le voulais pas tant que ça, c'était une espèce de remise en place des choses, c'est l'histoire d'un parcours avec l'enfance, ma psychologie. Je voulais en montrer sans tout dévoiler.
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Vous avez hésité à y faire figurer des extraits de vos pornos ?
On en a parlé ensemble mais c'était Canal+ qui voulait absolument mettre ces passages-là, surtout pour le thème de la nuit gay. En général, il y avait un film porno et il n'y en a pas cette année donc je pense que c'était un procédé de remplacement. J'étais un peu réticent parce que je ne voulais pas tout mélanger mais, au final, je me suis rendu compte que c'était logique. Ce sont des passages très édulcorés et je trouve que ça a un intérêt au final.
Que ce soit dans Homme au bain ou dans ce documentaire, ça reste toujours axé autour de votre physique avec ce côté très sexuel...
Ça ne m'a pas dérangé, pourquoi pas. Pourquoi vouloir absolument aller à contre-sens de ce qu'on est. Comme tout le monde, comme vous, je suis contradictoire. Ce sont des passages et je trouvais que le début du doc était très paillettes, très axé sur le physique, les performances, ce coté esthétique. Si ça n'avait été que ça, je pense que ça n'aurait pas été si intéressant.
Mais, aujourd'hui, est-ce qu'il y a forcément ça quand on vous fait des propositions ?
Il y a beaucoup de nudité et du fait de ne pas parler, même pour la télé. Ce sont des projets que j'ai été obligé de refuser parce que je ne voyais pas l'intérêt. Là, c'est autre chose, c'est du domaine de la narration, ce n'est pas une fiction, c'est moi.
C'est quelque chose qui vous a freiné dans Homme au bain quand on vous a proposé le rôle ?
Non parce que je n'ai pas voulu réfléchir, j'ai voulu accepter parce que Christophe Honoré, ce n'était tout simplement pas à refuser. Après, le rendu a peut-être été décevant pour beaucoup. Je sais que beaucoup de filles ont aimé, la plupart des hétéros aussi, chacun y trouve son compte. J'ai l'impression que le public gay a moins aimé. C'est 50/50 je pense. Ce film était extrêmement expérimental et Christophe Honoré ne s'est pas soucié s'il allait satisfaire l'un ou l'autre.
Et vous, le film était fidèle à l'image que vous vous en étiez fait ?
C'était fidèle à moi en tout cas, à qui je suis dans la vie, donc il n'y avait pas de grande surprise. Il avait une grande surprise sur le fait qu'il y avait une certaine ingratitude qui ressortait de moi, dans ce que je dégageais, une espèce de réalisme et de malaise. Il a réussi à capter certaines choses. Je vois un François, je ne vois pas quelqu'un d'autre. Avec le recul, je ne vois pas Emmanuel, je vois François dedans.
Vous avez envie de faire quoi aujourd'hui au cinéma, quel genre de rôles ?
J'ai envie de réaliser, je n'ai pas forcément envie d'être acteur, ce n'est pas quelque chose qui m'anime plus que ça. Ou alors quelque chose de très vulgaire, un personnage hétéro, absolument pas dans la séduction, ni dans la nudité, forcément tout l'inverse de ce que j'ai pu faire, ou alors il faudrait que ce soit extrêmement intéressant. J'ai déjà écrit une petite histoire et j'ai quelqu'un qui pourrait déjà me produire.
Du coup, vous n'êtes pas emballé par ce qu'on vous propose aujourd'hui ?
Déjà, on me propose peu. Avec sincérité, on ne m'a pas beaucoup proposé de gros projets, le film avec Christophe Honoré n'a pas été un déclencheur. Les faits sont là, je n'ai pas eu de proposition, très peu. Ce n'est pas grave. Je préfère rien faire plutôt que de faire n'importe quoi (rires).
Les grands médias ne vous proposent rien. On aurait pu vous proposer une télé-réalité par exemple.
Ah, je trouverais ça insultant qu'on me le propose, je ne pourrais pas faire ça, je préfère rien faire. Je trouve ça insultant, le mot est juste, car ça n'a aucun intérêt de se risquer à se mettre en scène dans ce genre de choses. C'est plat, très mal scénarisé, c'est vulgaire, je n'aime pas. Ce n'est pas quelque chose que je vais regarder. Je respecte ceux qui le font mais je ne me respecterais pas si je le faisais. Le fait d'être approché pour ça serait insultant.
Vous auriez l'impression d'être mis au niveau des starlettes de télé-réalité ?
Elles débarquent sans univers particulier. Bon, après j'ai vu que Cindy Sander avait refait un truc, j'étais déçu car j'aime beaucoup Cindy Sander, elle a un univers à elle (rires).
Vous savez que je vais en faire le titre de l'interview (rires).
Non mais je ne suis pas fan de Cindy Sander (rires) ! Je la trouve touchante et j'étais déçue qu'elle fasse Les anges de la télé-réalité. Qu'elle fasse son truc sur sa lancée, qu'elle fasse des choses mais qu'elle n'aille pas là.
Il y a quelques années, vous avez déclaré "J'ai du mal à comprendre qu'on puisse être fan d'une pornstar". Vous le pensez toujours ?
Je n'ai pas changé d'avis. On est employés pour un acte sexuel et on n'a pas vraiment de parti pris sur les choses. On ne subit pas les choses mais il n'y a pas de création là-dedans. Etre fan de son cul, d'avoir envie de baiser avec, oui mais le côté fanatique a toujours été lié pour moi au domaine artistiqueet au don de chaque artiste. Je n'ai jamais été fan de pornstar, j'ai vu des mecs qui me donnaient envie, qui me faisaient fantasmer mais le fanatisme ne va pas avec.
Dans le documentaire, on vous voit pourtant à l'aise avec vos fans.
Je suis mal à l'aise avec certains comportements mais pas avec mes fans en général. Ils sont adorables. Mais les "I Love You" avec un air de désespoir, ça me fait un peu peur, ça me met mal à l'aise. Ces gens-là ne savent pas qui je suis en dehors des parties charnues qu'ils ont vu de moi (rires).
Et signer des godes à votre effigie comme on peut le voir dans le film, ça ne vous gêne pas ?
Pas du tout. Ca peut avoir l'air vulgaire. Je signe ma bite et je trouve ça très drôle (rires). C'est un marché, un business, c'est vieux comme le monde. Ca ne me dérange pas.
Le porno, c'est terminé ?
J'espère arrêter parce que j'ai vu des gens d'un certain âge continuer à être là à tout prix et gagner des prix, vouloir être "la" pornstar du mois et je trouvais ça pathétique. De vouloir absolument être là sans vraiment donner le choix aux spectateurs. Ça, ça m'a fait peur et je préfère partir au bon moment, m'éclipser ou me faire oublier. Dans l'idéal, j'aimerais que ce soit fini, ça fera deux ans en septembre que je ne tourne plus.
On a l'impression que vous parlez d'alcool.
C'est de la drogue, une drogue qu'on a besoin d'arrêter.
On peut se faire aider, vous avez un psy ?
Je n'ai pas de psy. Je pense qu'il faut juste avoir d'autres projets plus excitants, tout simplement. Si je rate ça, peut-être que je reviendrai dans le porno mais ça voudra dire que je serai désespéré.
La bande-annonce
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