L'image entachée des Golden Globes lui coûtera-t-elle sa place dans le paysage des cérémonies de remise de trophées ? Dimanche 9 janvier, le Beverly Hills Hotel sera en tout cas l'hôte d'une 79e édition en proie aux doutes.
Les organisateurs ont fait fi des accusations et des polémiques visant l'Association de la presse étrangère de Hollywood (HFPA) et décidé de maintenir la cérémonie récompensant le cinéma afin de mettre en lumière "les oeuvres philanthropiques de l'association", exprime-t-elle dans un communiqué. Ni le public, pour cause de crise sanitaire, ni les caméras n'y seront, en revanche, conviés.
NBC avait de toute façon fait savoir en mai 2021 qu'elle renonçait à retransmettre l'événement, diffusé sur son antenne depuis 1996 et dont l'audience a été divisée par trois entre 2020 et 2021 (de 18,3 millions à 6,9 millions). "Cela ne va pas être le même événement que d'habitude mais nous avons toujours dit (...) que nous remettrions les prix quoi qu'il arrive", confiait la présidente de la HFPA, Helen Hoehne, le 13 décembre dernier lors de l'annonce des nominations qu'elle a présentée aux côtés du rappeur Snoop Dogg.
Mais qu'est-il donc reproché à la HFPA ? Le jury de cette cérémonie, composé de 90 journalistes étrangers en poste à Los Angeles, est visé depuis des mois par des accusations de racisme, de sexisme, de harcèlement et de corruption. Plus d'une centaine de publicistes lui a, par exemple, écrit en mars 2021 pour lui demander de "mettre un terme à des comportements discriminatoires et non professionnels, des manquements éthiques et des accusations de corruption".
Le "Los Angeles Times" avait révélé un mois plus tôt, rappelle "Télérama" que "la HFPA n'avait toujours aucun membre noir malgré le mouvement #OscarsSoWhite qui avait appelé dès 2015 à une meilleure représentation des minorités raciales dans les cérémonies de prix du septième art. Le journal a également précisé qu'au moins trente membres avaient été logés au luxueux hôtel parisien Peninsula par les studios Paramount, pour visiter le site du tournage... d''Emily in Paris'".
Les promesses de réforme et de changement de pratiques de la HFPA - notamment le recrutement de vingt membres supplémentaires plus représentatifs de la diversité pour son conseil d'administration - qui ont suivi la publication de cet article n'ont pas été jugées suffisantes par les stars Scarlett Johansson, qui avait accusé des journalistes de la HFPA de poser des questions "à la limite du harcèlement sexuel" en conférence de presse, et Mark Ruffalo. Tom Cruise, lui, a rendu en signe de protestation ses trois statuettes de meilleur acteur remportées pour "Né un 4 juillet", "Jerry Maguire" et "Magnolia". Quant aux plateformes (Netflix, Amazon, Warner Media, HBO), elles ont pris leurs distances avec la HFPA le temps qu'elle mette en oeuvre des changements significatifs.
Peut-être le message a-t-il été entendu. Cette année, trois des artistes en compétition pour le prix du meilleur acteur dans un film dramatique sont noirs (Will Smith pour "La méthode Williams", Denzel Washington pour "The Tragedy of Macbeth" et Mahershala Ali pour "Swan Song"). Omar Sy a été sélectionné, quant à lui, dans la catégorie du meilleur acteur pour une série dramatique ("Lupin" sur Netflix).
Les réalisatrices, jusque-là rarement valorisées, sont représentées par Maggie Gyllenhaal ("The Lost Daughter") et Jane Campion. "The Power of the Dog" ((meilleur film dramatique, meilleur acteur dans un film dramatique, meilleur acteur et meilleur actrice dans un second rôle, meilleur scénario, meilleure musique de film et meilleur réalisateur), le film réalisé par cette dernière, est cette année le plus nommé, à égalité avec "Belfast" de Kenneth Brannagh, avec sept nominations chacun. Marion Cotillard, côté français, est nommée dans la catégorie "meilleure actrice dans une comédie ou comédie musicale" pour sa prestation dans "Annette". Alexandre Desplat est dans la "short list" pour "The French Dispatch" dans la catégorie "meilleure musique de film".
Côté séries, le phénomène mondial "Squid Game" est nommé dans pas moins de trois catégories, dont celle de "meilleure série dramatique" et "meilleur acteur dans une série dramatique", une première pour une série sud-coréenne. Outre Omar Sy, Tahar Rahim représentera les couleurs du "Serpent" (Netflix) dans la catégorie du "meilleur acteur dans une mini-série". "Succession" (OCS) se distingue avec quatre nominations, dont deux dans la prestigieuse catégorie du "meilleur acteur dans une série dramatique (Brian Cox et Jeremy Strong). Quant à "WandaVision" (Disney+), ses deux protagonistes, Elizabeth Olsen et Paul Bettany, concourent dans les catégories "meilleur acteur" et "meilleur actrice dans une mini-série".