"Téléfoot" plébiscité ! Cette saison, les TV Notes ont accueilli une nouvelle catégorie, celle de l'émission sportive de l'année. C'est le rendez-vous dominical de Grégoire Margotton sur TF1 qui décroche ce prix. Avec 19,4% des suffrages, le programme de plus de 40 ans devance le "Canal Football Club" et "L'Equipe du soir". A cette occasion, puremedias.com a rencontré Grégoire Margotton pour évoquer sa première saison à la tête de l'émission hebdomadaire, la Coupe du monde féminine de football et ses prochains projets sur TF1.
Propos recueillis par Florian Guadalupe.
puremedias.com : Vous remportez avec "Téléfoot" le premier TV Notes de l'émission sportive. Est-ce une satisfaction ?
Grégoire Margotton : C'est "Téléfoot" qui le remporte, pas moi. C'est une magnifique nouvelle. C'est très impressionnant de travailler pour cette émission. Ce n'est pas facile de la faire évoluer parce qu'elle a plus de 40 ans. Je suis très fier d'avoir fait cette année. J'espère qu'il y en aura beaucoup d'autres. On a souffert comme toutes les autres émissions de sport. On est aussi de plus en plus influencé par ce qui se fait sur le digital. On se diversifie. La télévision est un vieux média. Ce n'est pas facile à bouger. Mais c'est un média qui travaille avec les nouveaux médias. On partage les mêmes êtres humains. Thomas Mekhiche est l'exemple parfait. Il participe à "Téléfoot" à la télévision et fait "Téléfoot, la quotidienne" sur le digital.
"On aimerait avoir une émission qui dure deux fois plus longtemps."
"Téléfoot" est devenu aujourd'hui une marque global. Elle est à la fois à la télévision mais également très présente sur le web, via "La quotidienne". Selon vous, ce relai sur le numérique peut-il expliquer cette victoire aux TV Notes ?
Ca explique complètement cette victoire ! Je pense qu'à la différence d'autres émissions historiques autour du sport, "Téléfoot" est celle qui s'est le plus digitalisé et le plus intelligemment. J'en parle d'autant plus facilement que je n'en suis pas responsable. Je l'accompagne. Je l'ai vu depuis mon arrivée à TF1. En trois ans, il y a vraiment eu une révolution. Il n'y a pas eu une révolution sur le vieux "Téléfoot", qui existe, qui changera, qui - je l'espère - durera encore des années, mais qui souffre. Mais il y a eu des révolutions ailleurs. C'est peut-être cet ailleurs, ces plateformes digitales et ces réseaux sociaux qui ont fait que ce nom-là, "Téléfoot", et cette émission-là ont été choisis. J'en suis même persuadé.
Qu'est-ce qui différencie aujourd'hui "Téléfoot" des autres émissions de sport ?
Dans un monde que l'on dit très spécialisé, "Téléfoot" reste l'émission de foot la plus grand public. C'est quelqu'un qui a bossé 25 ans à Canal+ qui le dit. J'ai dû apprendre en arrivant à TF1 à m'adresser à un plus grand public. Il n'est pas forcément au courant qu'untel a signé ici ou que bidule joue en 4-3-3 depuis deux journées, parce que son latéral droit s'est blessé. Ce sont des choses que savent les téléspectateurs de Canal+ et pas forcément ceux de "Téléfoot". C'est ce grand écart qui est compliqué. Il y a encore des spécialistes qui regardent cette émission tranquillement en y apprenant deux ou trois choses en mangeant leurs céréales le dimanche matin. Et il y a des gens qui ne regardent que ça. Ils ne sont pas abonnés à beIN ou à Canal+. Ils ne regardent pas la Ligue des champions la semaine. Donc, en 40 minutes, ce n'est pas facile de contenter tout le monde. On aimerait avoir une émission qui dure deux fois plus longtemps. Mais on essaye de continuer sur ce qui reste l'ADN de cette émission : ce sont trois à quatre sujets d'actualité qui permettent de se tenir au courant. Ca ne nous empêche pas de faire de beaux sujets de magazine de temps en temps. En tout cas, on ne veut pas aller sur du talk. Ce n'est pas la vocation de "Téléfoot". Ca ne l'a pas été et ça ne le sera jamais. Un talk de foot le dimanche matin, ce n'est pas l'horaire. C'est un horaire pour de l'image, pour de l'info et de la légèreté.
"J'espère ne pas être le dernier présentateur de 'Téléfoot'."
Après le sacre de l'équipe de France masculine en Coupe du monde la saison dernière, était-ce plus difficile de parler de football cette année ?
On n'arrive plus trop à savoir. On dit tous que la télévision va mourir, que le print va mourir et que ça va prendre encore 5, 10, 20 ans. Dans cette période un peu bizarre où les plus de 40 ans continuent de regarder la télévision et les moins de 20 ans ne regardent presque plus les émissions en temps réel, c'est compliqué de se dire à l'avance ce que les gens vont aimer. On était persuadé qu'après le titre mondial, on allait surfer sur les Bleus. On était parti là-dessus en septembre. On s'est aperçu rapidement que les gens étaient passés à autre chose. On s'est aperçu aussi que la saison de Ligue 1 n'était pas passionnante. La Ligue 1 n'est pas l'ADN de "Téléfoot" mais on la suit quand même. La Ligue 1 a été particulièrement creuse cette saison, sans relief, faible et sans matchs qui resteront dans les mémoires. Elle a eu un champion dès le mois de décembre qui termine la saison très mal. Heureusement qu'il y a eu un petit peu de Rennes en Ligue Europa. Heureusement qu'il y a eu des émotions de fin de saison en Ligue des champions, avec Liverpool et l'Ajax. Mais pas avec des clubs français et pas avec des Bleus. Donc, ça a été une saison où on n'a pas eu beaucoup de prises et beaucoup de leviers émotionnels.
Est-ce ce qui peut expliquer une baisse d'audience par rapport à l'année précédente pour "Téléfoot" ?
Non. Il y a plein de choses. Je pense que c'est général. Je pense que c'est un miracle qu'il y ait entre 900.000 et un million de personnes qui viennent voir à la télé à 11h du matin le dimanche un magazine de football. C'est miraculeux quand on voit les audiences moyennes de beaucoup d'émissions de télé. Je ne parlerai pas de mes concurrents ou de mes collègues. Mais les cartons d'audience télé sont très rares. Le "Canal football club" a baissé dans les mêmes proportions que nous. On lutte tous. On essaye tous de se renouveler. On essaye de proposer des choses nouvelles. On va changer des choses à la rentrée. Mais on est des résistants. On essaye surtout de faire honneur à cette histoire. Je crois que TF1 croit encore en cette émission et à cette marque. J'espère ne pas être le dernier présentateur de "Téléfoot", donc je m'accroche un peu plus que les autres.
"Mon envie, c'est de faire des documentaires."
Quels seront les changements à la rentrée ?
On est actuellement sur la Coupe du monde. On aura un petit peu de temps pour réagir car, à la rentrée prochaine, il y aura la Coupe du monde de rugby qui va nous priver de "Téléfoot" pendant quelques semaines. Ca va être long. Ce sera un moment pour travailler et réévaluer l'émission. Ce que je sais, c'est qu'on restera uniquement sur du foot. L'émission sera programmée à la même heure et ne va pas évoluer dans sa durée. Ce ne sera pas un talk. Ce sera toujours dans l'info et dans le reportage. Ceci dit, il y aura des évolutions. On est dans la réflexion et dans le contact avec de nouveaux intervenants. Rien n'est calé. Rien n'est décidé. Mais forcément il faut évoluer.
Avec la Coupe du monde féminine, TF1 a intégré dans son dispositif de nouveaux visages féminins comme celui de Camille Abily. Pourrait-on imaginer qu'elle rejoigne "Téléfoot" à la rentrée ?
C'est possible ! On s'aperçoit que le "Téléfoot" spécial femmes depuis deux semaines a beaucoup de mal. Les courbes d'audience quand on parle des femmes sont très mauvaises. En revanche, les matchs font des cartons. C'est ce qui est compliqué à gérer. Ce n'est pas la même résonance et ce ne sont pas les mêmes audiences. Donc, oui, on peut imaginer qu'il y aura un après Coupe du monde et que le football féminin aura une place différente. Mais je ne peux pas vous dire aujourd'hui que Camille Abily continuera avec nous ou qu'il y aura quatre femmes autour de moi ou que ce sera une femme qui présentera l'émission à ma place.
Outre "Téléfoot", quels sont vos projets au sein du groupe TF1 ?
Je vais être assez occupé. On va sans doute repartir sur un championnat du monde de handball. Il y aura "Téléfoot" et les matchs de l'équipe de France. J'espère qu'on aura l'Euro de football, comme il y a trois ans, avec l'alternance avec M6. Je n'ai pas d'autres projets avec TF1. En sachant quand même que mon envie et que ma base de plaisir, c'est d'essayer de faire des documentaires. Dès que j'en aurai la possibilité, je le ferai. Il n'y a pas un qui est lancé pour l'instant. J'ai une ou deux idées qui ne sont pas arrêtées non plus, mais qui pourraient se mettre en route. Elles ne sont pas signées. Mais si ça se mettait en route, ça enclencherait des commentaires et des documentaires que je pourrais faire et qui m'occuperait bien pendant tout l'automne et l'hiver. Mon envie, c'est ça.
"Les audiences de l'équipe de France ? Ce n'est pas une surprise, c'est une hallucination collective !"
Un nouvel appel d'offres pourrait être lancé dès la fin de l'année pour les droits de la Ligue des champions. Si TF1 se positionne, aimeriez-vous reprendre de nouveau les commentaires de cette compétition ?
Je ne sais pas si la Ligue des champions revenait, TF1 me considérerait comme commentateur de la Ligue des champions. Je l'espère. (rires) Je ne compte pas là-dessus. On est sur une économie depuis des années qui ne permet plus à TF1 de concourir pour diffuser des matchs de Ligue des champions. C'est économiquement plus viable et plus jouable. J'en suis le premier meurtri. J'ai été le premier meurtri à une époque quand Canal+ perdait des droits. On changeait de métier. On évoluait. On faisait autre chose. Ca passait à la concurrence, ça revenait, ça repartait. Pour l'instant, j'ai l'impression que ça reste du domaine des chaînes à péage et des opérateurs de téléphonie. Ce n'est plus pour des chaînes en clair et plus pour le grand public. J'en suis le premier malheureux. Quand je vois ce qu'on a pu voir comme qualité de match et comme émotion en Ligue des champions en demi-finale et en quart de finale cette année, je le regrette. Mais si dans un monde idéal TF1 revenait de temps en temps sur des matchs comme ça, je vous avoue que si je ne les commentais pas, je serais peut-être déçu. (rires)
Il y a un an, dans une interview à puremedias.com, vous disiez vous préparer pour la Coupe du monde masculine depuis 48 ans. Et pour celle féminine ?
Ca fait 15 ans ! A Canal+, j'étais à Saint-Etienne le jour où on a retransmis un France/Angleterre, commenté par Thierry Gilardi et Aimé Jacquet. C'était un barrage pour la Coupe du monde qui avait qualifié l'équipe de Corinne Diacre. Elle avait marqué ce jour-là ! Canal+ avait fait une première diffusion pour cette équipe de France féminine. Il y avait 25.000 personnes dans le stade. C'était avec l'impulsion d'Aimé Jacquet en 2003. Quand il a basculé en directeur technique national de la fédération et qu'il s'est battu pour le football féminin, je l'ai suivi. Je ne dis pas que j'ai suivi tous les matchs de l'équipe de France depuis qu'ils sont diffusés sur D8, puis W9. Mais j'ai suivi les grandes compétitions et l'histoire de ces filles. J'ai eu beaucoup de travail à faire sur le Chili, sur la Thaïlande et même sur l'Angleterre. Mais sur l'équipe de France, j'avais quand même quelques bases heureusement. Evidemment que j'en sais moins que sur les hommes. Evidemment que Bixente en sait moins que sur les hommes.
Les matchs de cette Coupe du monde connaissent des audiences fulgurantes sur TF1. Etait-ce une surprise pour vous ?
Ce n'est pas une surprise. C'est une hallucination collective. (rires) Ce n'est pas que moi. Je crois que tous les gens qui se sont battus pour ça ont halluciné. Ce sont toutes ces femmes qui se sont battues pour le football féminin. C'est Noël Le Graet qui s'est battu pour la féminisation de son institution. Il a offert la possibilité que les jeunes femmes puissent pratiquer le football dans les clubs. Ce sont aussi ces clubs qui ont mis des sections professionnelles pour les femmes. Après, j'espère que la vague va continuer. Elle continuera différemment. Elle s'arrêtera peut-être pour le championnat qui aura du mal à se développer. Mais elle continuera dans l'esprit des gamines qui ont 10 ans. Elles auront vu ces matchs-là et elles diront : "J'aimerais bien faire du foot à la rentrée". Rien que pour ça, je suis très heureux. Je suis content que TF1 retransmette cette compétition.