C'est dans leur monde que les hommes politiques se livrent. La semaine dernière, Michel Denisot est parti à la rencontre d'Alain Juppé dans sa ville, Bordeaux, dont il est maire depuis 1995. Dans les rues de cette métropole qu'il a transformée, l'ex-ministre livre son premier message de campagne pour les primaires de l'UMP, qu'il espère au printemps 2016. "Si je me suis lancé, ce n'est pas pour m'arrêter", lance-t-il en forme d'avertissement à ceux qui, à droite, l'imaginent déjà lâcher ses ambitions. Alain Juppé ira, quoi qu'il arrive, s'il est investi par les militants et sympathisants de son parti.
Le vocubalaire est choisi, les candidats de l'UMP pour 2017 seront ses "concurrents", la gauche son "adversaire". Même s'il s'en défend, tout, dans sa construction pour le combat présidentiel, l'oppose au "nouveau" Nicolas Sarkozy. "On ne change jamais vraiment. On peut s'améliorer ou se détériorer. A Bordeaux, les bonnes bouteilles vieillissent bien". Mais Alain Juppé ne veut pas faire campagne "contre" l'ex-chef de l'Etat, il ne cherche pas "l'affrontement".
Sur le style et les idées, Juppé fait de l'anti-sarkozysme. L'abrogation du mariage pour tous, évoquée par certains à droite ? "Il y a des évolutions dans la vie. Une évolution a été franchie, cela m'étonnerait qu'on revienne dessus". Le FN ? "Aux antipodes de ce que je crois". BHL, fervent soutien de l'ex-président ? "Je préfère ne pas l'évoquer, parlons de choses sérieuses". Son âge avancé ? "Un atout d'avoir de l'expérience". Ses relations parfois houleuses avec la presse, quand Nicolas Sarkozy ne cache plus son aigreur à son égard ? "Je suis apaisé, il faut garder son sang froid". Même le soutien de Bernardette Chirac à Nicolas Sarkozy ne l'effraie pas, "son droit le plus strict, qui me laisse serein". Alain Juppé ou la communication dans la rupture de l'agressivité.
Jacques Chirac avait dit qu'il était "l'un des meilleurs (d'entre nous)". Alain Juppé n'est pas loin de le penser. "Bien sûr que j'ai la conviction d'être le meilleur. Mais si je vous dis pourquoi, j'aurai l'impression d'être arrogant". Pas d'arrogance donc, le président par intérim de l'UMP veut "apaiser" la société, lui redonner "confiance". Lui veut casser son image froide, raide, "imbuvable", livrer "un combat sans agressivité". A Bordeaux, Alain Juppé ne suscite pas l'hostilité, fort de ses 60% de voix aux dernières élections municipales. On se presse pour le saluer, lui arracher un selfie. Juppé s'y prête volontiers, sur un petit air de campagne. Présidentielle cette fois.
"Conversation secrète" avec Alain Juppé.
Ce soir à 22h45 sur Canal+.