Les relations entre les professionnels du cinéma et les critiques ont toujours été très compliquées. Et cela ne semble pas s'arranger. Dans son édition de ce week-end, Le Figaro a ainsi expliqué que ses journalistes cinéma étaient désormais privés des projections presse organisées par Pathé et Gaumont. En cause : leurs critiques jugées trop négatives par les deux distributeurs français.
Dans un article intitulé "Pas de tomates pour les navets", plusieurs journalistes du Figaro ont ainsi dénoncé avec ironie cette situation. "Les critiques sont des gens méchants. Parfois, ils écrivent du mal des gentils films. Parfois même, ils osent dire qu'ils ne sont pas tous des chefs-d'oeuvre. Pire, ils ne soutiennent pas systématiquement les longs métrages produits et distribués par les firmes Pathé et Gaumont. Qui n'ont rien contre la critique, pas du tout, du moment qu'elle tartine sur la qualité de leur réalisation" ont-ils raillé.
Concernant Gaumont, Le Figaro a expliqué que les relations s'étaient détériorées avec la publication d'un dossier consacré à la faiblesse des scénarios des films français. Ce dernier était illustré par des photos du film "Mea Culpa" avec Vincent Lindon, distribué par Gaumont. Le Figaro n'a par la suite pas amélioré ses relations avec le distributeur en accueillant fraîchement un autre de ses films, "La Belle et la Bête" avec Vincent Cassel et Léa Seydoux. Le journal s'est aussi brouillé dans le même temps avec Pathé en n'épargnant pas son film "Supercondriaque", de et avec Dany Boon. Effet immédiat : "plus un critique de notre journal n'est convié aux projections de presse".
Le journal a par ailleurs tenu à rappeler que ses salariés ne sont pas les seuls visés par de telles mesures et que ces dernières tendraient même à se développer ces derniers temps. "Si les distributeurs n'ont jamais porté les critiques dans leur coeur, il semble qu'ils aient décidé de leur déclarer la guerre" ont ainsi écrit les journalistes du Figaro. L'éviction des projections de presse ne serait d'ailleurs pas la seule initiative mise en oeuvre par les distributeurs français. Le Figaro a ainsi également évoqué des critiques menacés de perdre leur emploi ou encore des encarts publicitaires supprimés en guise de représailles.
Interrogé par le journal sur cette affaire, Sidonie Dumas, patronne de Gaumont, n'a pas commenté le fond des accusations du Figaro. Elle a seulement expliqué que le cinéma français était malmené "à tort" par la presse. "Les articles sont trop généralistes : tous les scénaristes sont mauvais, les acteurs trop payés, le cinéma trop financé. Le cinéma est un bouc émissaire" a-t-elle dénoncé. Evoquant des "attaques systématiques" devenues lassantes, Sidonie Dumas a précisé que "Gaumont ne s'opposera jamais à des critiques négatives" à condition que "les articles soient argumentés".
Et la dirigeante d'expliquer : "Beaucoup de critiques décrètent 'c'est nul' avant même d'avoir vu le film. Quand 200 millions de Français vont au cinéma par an et y retournent, la critique ne peut pas être systématiquement contre le métier, simplement par respect pour le public". Avant de regretter : "Ce qui manque chez les critiques, c'est un élan positif. C'est un mal très français".