Si la crise d'iTELE a eu un important écho médiatique, celle que subit "L'Obs" depuis plusieurs mois, plus silencieuse, n'en finit plus. Ce midi, plusieurs dizaines de salariés de la rédaction, accompagnés par des journalistes de Rue89, ont manifesté devant la place de Bourse, contre un plan de départs concernant 38 postes. Une fausse Une de l'hebdomadaire a été maquettée et affichée devant le bâtiment de la rédaction, avec en titre "Non aux licenciements".
"L'objectif est que ce soit des départs volontaires, mais s'il n'y a pas assez de départs, ce sera un plan social", explique un journaliste du groupe à puremedias.com. L'organisation de cette manifestation, au pied du siège de "L'Obs", a été décidée lors de la dernière assemblée générale ce mercredi, en présence des syndicats, des délégués du personnel et entre autres, du Comité d'entreprise. Jean Daniel, le fondateur de l'hebdomadaire en 1964, était aussi présent lors de l'événement auprès des manifestants.
"Le plan social a été déclenché depuis un moment, fin juin. Il y a des négociations sur les montants du plan de départs, mais pour le moment, il y a peu d'avancées. On craint que les conditions ne soient pas intéressantes, et en plus, il n'y a pas de dialogue constructif avec la direction", s'inquiète un salarié de "L'Obs", ajoutant qu'à ce jour, "aucune condition n'est remplie pour les 38 départs."
A l'origine, le plan social était ciblé en fonction des services, "TéléObs" étant par exemple "beaucoup plus touché" que le pôle politique. "On s'est battu pour que ça ne soit pas comme ça, pour égaliser. Désormais, ce serait autour de 20 départs sur le print et 3 ou 4 sur le web", nous indique un membre de la rédaction. Une nouvelle réunion a lieu cet après-midi entre les représentants du personnel et la direction.
Si les lignes ne bougent pas du côté de la direction, les journalistes de la rédaction sont prêts à se mettre en grève, "sûrement lundi ou mardi, au moment du bouclage, pour bloquer le journal". "La direction semble inflexible et il n'y a pas de grande culture de la contestation à 'L'Obs'. Il faut des opérations plus radicales. C'est la grande angoisse. Tout le monde est inquiet, y compris ceux qui restent pour leurs conditions de travail", craint-on en interne. Un autre journaliste se plaint que "depuis le rachat de Xavier Niel, Matthieu Pigasse et Pierre Bergé, ils ne font que boucher les trous". "Il n'y a aucun investissement sur l'éditorial, aucun recrutement. Ils ne disent qu'une chose : 'Il faut que le journal soit à l'équilibre'."
Depuis 2014, "L'Obs" appartient au le trio d'hommes d'affaires, qui détiennent aussi le quotidien "Le Monde". Après le départ de Laurent Joffrin de la direction de la rédaction, Matthieu Croissandeau a été nommé pour le remplacer, mais il a depuis dû faire face au vote d'une motion de défiance à son encontre. Après le licenciement contesté de la numéro 2 du journal, Aude Lancelin, l'hebdomadaire a annoncé avoir mis en place fin juin un plan d'économies de 5 millions d'euros.
Avec une baisse des ventes de ses journaux en kiosque de 13%, soit 401.000 exemplaires vendus en moyenne en 2015, le groupe veut stopper l'hémorragie, qui s'est traduite par une perte de 2,5 millions d'euros en 2015. "Force est de constater que la situation économique de notre journal, comme malheureusement celle de nombreux autres news magazines en France et à l'international, n'est plus viable sans une large remise à plat de toute notre organisation", était-il expliqué dans une note adressée aux salariés en septembre dernier. Contactée par puremedias.com, la direction de "L'Obs" n'était pas joignable.
Mise à jour 20h25. A la sortie de la dernière réunion cet après-midi, "il y a eu des avancées" de la direction, indique-t-on à puremedias.com. "Nous avons travaillé sur les indemnités et ils nous ont assuré qu'il n'y aurait pas de départs contraints", nous précise-t-on, ajoutant qu'il existe toujours des désaccords. "Une non-publication mardi, jour de bouclage, peut être envisageable", nous souffle un journaliste.