Gilles Pélisson ne baisse pas les bras. Alors que le ministre de la Culture, Franck Riester, a éconduit hier les bougons patrons des grands groupes privés, celui de TF1 a décidé de repartir au front. Accordant une interview à Léa Salamé sur France Inter ce matin, Gilles Pélisson a ainsi réaffirmé son insatisfaction concernant la réforme de l'audiovisuel prévue par le gouvernement l'année prochaine.
"On est en train de dire au ministre (le ministre de la Culture, ndlr) : 'Allez au bout de vos idées ! Vous nous avez laissé penser que nous avions un rendez-vous avec l'Histoire et nous pensons qu'il y a un rendez-vous avec l'Histoire !'", a commencé Gilles Pélisson, citant ensuite les 6 millions d'abonnés à Netflix en France et le succès probable de Disney+, attendu en mars prochain dans l'Hexagone.
Accusant ensuite Franck Riester de faire "de la com'" et d'être "dans la politique", Gilles Pélisson a critiqué l'ensemble des garde-fous imaginés par le gouvernement pour que la réforme de l'audiovisuel ne fragilise pas la presse et les radios locales. Parlant des "modèles économiques fragilisés" des chaînes de télé, le PDG de TF1 a ainsi dit regretter que tous les secteurs interdits de publicité à la télévision ne soient pas libéralisés. Il a aussi critiqué les quotas imaginés par Franck Riester en matière de publicité pour le cinéma, un secteur historiquement interdit à la télévision, mais qui ne le sera bientôt plus grâce à la prochaine réforme audiovisuelle. Ces quotas ont pour but d'éviter que cette nouvelle publicité télévisuelle ne concerne que des blockbusters américains et pas des films français ou européens. "On peut faire des remises de 60 ou 70% pour les petits films", a proposé Gilles Pélisson comme mesure de substitution.
De la même manière, le PDG de TF1 a fustigé dans son entretien la future possibilité pour les chaînes de télé de pouvoir diffuser un troisième écran publicitaire lorsqu'elles programment des longs métrages. "C'est sur des films de plus de deux heures ! Si vous saviez le nombre de films de plus de deux heures qu'on passe par an...", a-t-il ironisé, au lendemain de la diffusion sur TMC, chaîne du groupe TF1, de "Captain America : Civil War", un film de 2h28.
Gilles Pélisson a ensuite critiqué les conditions posées par le gouvernement pour la mise en oeuvre de la publicité géo-localisée : ne pas donner l'adresse des commerçants-annonceurs afin de laisser ce privilège et le marché pub qui va avec, à la presse et aux radios locales, qui en sont fortement dépendantes. "A un moment, ce n'est pas le sujet. Le sujet, c'est qu'on se bat contre Google et Facebook, qui n'ont, eux, aucune interdiction ! A un moment, soit vous encadrez ces acteurs (...), soit il faut nous aider en tant que modèle de télévision", a fait valoir le PDG du groupe TF1.
Affirmant avoir "bien sûr peur" des "mammouths" que sont Google ou Apple, - dont il n'avait pas peur en juin, avant le dévoilement de la réforme - Gilles Pélisson a ensuite tenté de justifier l'alliance passée avec Netflix pour le financement et la diffusion du "Bazar de la charité", la série évènement actuellement programmée avec succès sur TF1. Il a précisé que si cette fiction appartiendra mondialement pendant quatre ans à Netflix après sa diffusion sur la Une en linéaire, elle reviendrait ensuite dans le giron de son groupe. "C'est un beau complément qui va me permettre de faire encore plus de programmes", s'est félicité Gilles Pélisson à ce sujet.