Éric Dupond-Moretti fait son retour, non pas en politique ou aux tribunaux, mais sur scène. À partir du 1er février 2025, il se produira au théâtre Marigny à Paris avec un one-man-show intitulé "J'ai dit oui !", dans lequel il reviendra sur son expérience au ministère de la Justice. Pour promouvoir ce spectacle, l'avocat était invité ce mercredi 11 décembre dans "C à vous" sur France 5. Mais lors du passage du chroniqueur Lorrain Sénéchal sur le plateau, la tension est montée d'un cran. Évoquant deux affaires récentes de violences sexuelles portées devant les tribunaux, celles de Gisèle Pélicot et d'Adèle Haenel, le journaliste a voulu revenir sur les propos polémiques tenus par Éric Dupond-Moretti par le passé sur le mouvement #MeToo.
"Quel regard vous portez sur ces deux affaires ? Vous, qui avez plusieurs fois exprimé, avec des mots qui ont d'ailleurs pu choquer parfois, que le mouvement #MeToo était allé trop loin. Vous aviez par exemple parlé de ces femmes qui regrettent de ne plus se faire siffler. Vous aviez parlé aussi de 'ces folasses qui racontent des conneries' et engagent l'honneur d'hommes qui ne peuvent plus se défendre'", a lancé Lorrain Sénéchal.
Des propos qui ont rapidement fait réagir Éric Dupond-Moretti, visiblement mécontent : "Monsieur, vous dénaturez complètement les propos qui ont été les miens. La défense, c'est la défense. Le propos que j'ai tenu, et que vous avez dénaturé, c'est un propos que j'ai tenu en défendant un homme qui d'ailleurs a été acquitté, monsieur. Et j'avais dit qu'il était arrivé, effectivement, que des femmes accusent des innocents. Il faut l'entendre, ça arrive." Il a poursuivi en défendant son bilan de ministre : "Pour autant, j'ai fait, lorsque j'étais ministre, voter un texte d'initiative sénatoriale que j'ai porté avec enthousiasme pour dire qu'en deçà de 15 ans, on ne pouvait pas dire d'une victime de moins de 15 ans qu'elle était consentante. Ça, c'est une réalisation dont je suis fier."
Sur les affaires Gisèle Pélicot et Adèle Haenel, il a ajouté : "Ensuite, je ne vais pas commenter. Vous avez madame Pélicot qui a souhaité que le huis clos ne soit pas ordonné. Elle avait le droit de le faire pour expliquer, au fond, non seulement ce qu'elle avait vécu, mais ce que pouvait être la soumission chimique. Et de ce point de vue-là, c'est une découverte. Il y a beaucoup de nos compatriotes qui la soutiennent." L'ex-ministre a également tenu à clarifier sa position sur le mouvement : "Quant au mouvement #MeToo, ce que j'ai dit, monsieur, là encore, vous avez dénaturé mes propos – et c'est une difficulté quand on est ministre de voir ses propos dénaturés – j'ai dit 'Me Too, formidable en ce que la parole de la femme est enfin libérée'. Mais attention, une parole doit passer par le filtre de l'institution judiciaire. C'est ça que j'ai dit. Il ne suffit pas d'accuser pour avoir raison." Puremédias vous propose de visionner la séquence dans la vidéo ci-dessus.
"Il y a aussi des follasses qui racontent des conneries et engagent l'honneur d'un mec qui ne peut pas se défendre car il est déjà crucifié sur les réseaux sociaux"
Pourtant, l'ex-garde des Sceaux traîne une réputation controversée sur ces sujets. En 2020, sa nomination avait été accueillie avec virulence par les associations féministes. Et pour cause : l'avocat s'est régulièrement distingué par des propos jugés hostiles aux mouvements de libération de la parole des victimes. Ainsi, en 2019, il déclarait au magazine "GQ" : "Le mouvement #MeToo a permis de libérer la parole et c'est très bien. Mais il y a aussi des follasses qui racontent des conneries et engagent l'honneur d'un mec qui ne peut pas se défendre car il est déjà crucifié sur les réseaux sociaux. Peu de gens raisonnables peuvent me démentir sur ce point." Il avait également critiqué la campagne #BalanceTonPorc, affirmant : "Tous les hommes ne sont pas des prédateurs, même s'il y en a. Mais il y a aussi des femmes que le pouvoir fait bander."
Dans la même interview, concernant le procès de Georges Tron, dont il a un temps assuré la défense, il déclarait au sujet des accusatrices : "Quand on est violé et qu'on y retourne 25 fois, c'est 24 fois de trop." Plus tôt, 2018, il affirmait au micro de Jean-Jacques Bourdin à propos du délit d'outrage sexiste, proposé par Marlène Schiappa : "Il y a une très vieille dame que j'adore qui m'a dit 'Moi je regrette de ne plus être sifflée'. (...) La bienséance doit régler ça, pas la loi, la loi ne peut pas se mêler de ça." Et en 2015, dans le cadre de l'affaire du Carlton, il avait estimé, dans "Le journal du dimanche" : "Il s'agit d'une affaire de copains qui s'offrent du bon temps."