Des caricatures au goût amer. Dans sa dernière édition, "Charlie Hebdo" est revenu sur la mort de 13 soldats français survenue au Mali en début de semaine, à travers cinq dessins signés Biche, lequel s'est amusé à détourner la campagne de recrutement de l'armée, en lien avec cette actualité. De fausses affiches avec des dessins choc, reprenant de vrais slogans. Ainsi, sur l'une d'elles, des soldats portent le cercueil d'un des leurs tandis qu'une phrase indique : "Je suis tourné vers les autres et vers mon avenir". Un autre dessin s'amuse des décorations reçues à titre posthume avec un cercueil couvert de médailles, accompagné de ce slogan : "Je protège mon pays, je progresse dans la vie".
Ces caricatures ont provoqué l'indignation du chef d'état-major de l'armée de Terre, le général d'armée Thierry Burkhard, qui a publié samedi sur les réseaux sociaux une lettre ouverte adressée au directeur de la publication de "Charlie Hebdo", Riss. "Le temps du deuil de ces familles a été sali par des caricatures terriblement outrageantes dont votre journal a assuré la diffusion. Si l'indignation m'a d'abord gagné, c'est surtout une peine immense qui m'envahit en pensant au nouveau chagrin que vous infligez à ces familles déjà dans la souffrance. Une peine doublée d'une incompréhension profonde", écrit ainsi le haut gradé.
Qui poursuit en rappelant le nécessaire respect dû aux soldats et en invitant Riss à se joindre à la cérémonie d'hommage national qui aura lieu lundi à Paris. "Je vous invite, avec sincérité et humilité, à vous joindre à nous ce jour-là, pour leur témoigner vous aussi, qui avez souffert dans votre chair de l'idéologie et de la terreur, la reconnaissance qu'ils méritent", conclut le général dans une référence explicite à l'attentat de "Charlie Hebdo" qui a touché en plein coeur le titre voilà près de cinq ans. Riss s'est pour l'heure abstenu de tout commentaire.
L'entourage du chef d'état-major de l'armée de Terre, cité par "Le Monde", précise que "ce ne sont pas les caricatures en tant que telles qui nous choquent, nous connaissons l'antimilitarisme de 'Charlie', mais cette façon de s'en prendre aux familles". Selon cette source anonyme, une des familles endeuillées aurait même décidé de porter plainte contre l'hebdomadaire satirique.
Le dessinateur Biche avait réagi à la polémique dès le 29 novembre sur son compte Twitter pour expliquer que "ces dessins ne se moquent pas des soldats morts, mais de ce que l'armée cherche à vendre par ses campagnes de recrutement alors que la réalité du terrain est différente. C'est pour ça que j'ai repris les affiches, vous pouvez les trouvez sur le net". La journaliste Caroline Fourest, ex-figure du journal, est venu à son secours samedi en estimant : "L'humour noir vaut pour tous, même ceux qui ne le comprennent pas. Grincer de la mort qui guette notre armée, ce n'est pas se moquer des morts, mais rappeler le danger. Le prendre au premier degré, c'est tuer la liberté pour laquelle ils sont morts". puremedias.com vous propose de découvrir ci-dessous les caricatures incriminées.