Des mesures pas très populaires. Alors que le projet de Rachida Dati , nouvelle ministre de la Culture, de gouvernance unique de l'audiovisuel public provoque une levée des boucliers, sa mesure d'autorisation de la publicité à la télévision pour les livres, n'est pas beaucoup plus populaire. Un décret surprise, daté du 5 avril dernier, a autorisé, pour une expérimentation de deux années, la publicité télévisée pour les livres.
Cette décision a été prise moins de deux semaines après la fin de la consultation publique ouverte par l'Arcom à ce sujet. Cette mesure est impopulaire dans le milieu de l'édition qui redoute que cela nuise à la diversité de la littérature. De son côté, le ministère affirme que cette mesure est faite, non pas pour aider le secteur de l'édition, mais celui de la publicité télévisée fragilisé avec le numérique.
Pour le moment, seul un éditeur a acheté des écrans publicitaires à la télévision, XO Editions, éditeur de Bernard Minier, Guillaume Musso, Christian Jacq, Franck Ferrand, Mike Horn ou encore Henri Loevenbruck, et dont la maison-mère est Editis, désormais détenue par CMI France, groupe dirigé par le milliardaire Daniel Kretinsky.
"Le fondateur de notre maison, Bernard Fixot, a inventé la publicité sur le livre à la radio. Il n'a cessé de militer pour ouvrir cette possibilité à l'un des plus puissants des médias : la télévision", écrivent dans un communiqué les dirigeants de cette maison, Édith et Renaud Leblond, qui promeuvent actuellement à la télévision "Les Effacées", nouveau roman de Bernard Minier.
La plupart des éditeurs, et pas uniquement les petites maisons qui n'ont pas les moyens de s'offrir une pub à la télé, sont contre cette nouvelle mesure. Antoine Gallimard, patron du groupe Madrigall (Gallimard, Flammarion...), mais aussi, plus surprenant, Denis Olivennes, ancien patron de Canal+ et Europe 1, actuel président d'Editis (maison mère de XO Editions), ont fait savoir qu'ils ne voulaient pas en entendre parler, arguant la crainte d'une "best-sellerisation", selon l'AFP.
"On avait toujours dit qu'on était contre, tous les éditeurs, au nom de la diversité", déclarait Antoine Gallimard il y a quelques jours sur France Inter. Sur la même antenne, Denis Olivennes avait indiqué qu'il craignait que la publicité à la télévision contribue à "accélérer la concentration du marché sur ses plus gros vendeurs, au détriment de la diversité, parce que seuls les best-sellers peuvent supporter les coûts d'une publicité à la télévision".
De son côté, le Syndicat national de l'édition (SNE) demande l'abrogation de la mesure dans un communiqué : "En l'absence de tout encadrement de cette 'expérimentation', le Syndicat national de l'édition demande l'abrogation de ce décret qui n'est pas le reflet d'une concertation avec les professionnels du livre". Le SNE ajoute : "Le Syndicat national de l'édition déplore que la phase d'expérimentation sur le livre ouverte par le décret ne fasse l'objet d'aucun encadrement précis et ne soit accompagnée d'aucun engagement en faveur d'une promotion accrue du livre et de la lecture à la télévision".
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Jusqu'alors, la publicité pour les livres était uniquement autorisée sur les chaînes payantes et sur les plateformes de replay.
En 2020, c'était le cinéma qui avait eu une autorisation, d'abord temporaire, de publicité à la télévision. Une autorisation désormais pérennisée par le même décret.