L'avenir de l'audiovisuel public suspendu aux résultats des élections législatives 2024. Dès le lendemain de l'annonce par Emmanuel Macron de la dissolution de l'Assemblée nationale et donc de la convocation des électeurs les 30 juin et 7 juillet prochains, Sébastien Chenu, cadre du Rassemblement national, parti arrivé en tête des Européennes, a confirmé que la privatisation de l'audiovisuel public était dans les cartons. Qu'elle serait inscrite à l'agenda du gouvernement, dans l'hypothèse où celui-ci serait dirigé par Jordan Bardella au début de l'été.
D'ici là, les candidats du Rassemblement national à un siège de député martèlent ainsi à longueur d'interviews, y compris dans les médias publics, l'intérêt de cette proposition sur le plan économique sans préciser ce qu'il adviendrait des salariés de ces entreprises. "Désolé pour vous mais j'espère que vous pourrez retrouver de bonnes conditions de travail, et j'en suis sûr", a ainsi glissé Alexis Jolly, candidat RN dans la 6e circonscription de l'Isère, à l'oreille de Jordan Guéant, journaliste à France 3 Alpes qui l'interviewait le 16 juin dans "Dimanche en politique en régions". "Ne vous inquiétez pas, on prendra soin de vous", a ironisé le député sortant.
"Alors, je suis désolé Alexis Jolly", l'a interrompu Jordan Guéant. "Vous allez me forcer à me sortir de ma réserve (...) Je vais sortir un peu du rôle du journaliste mais j'ai un peu l'impression, sans vouloir vous offenser, que vous crachez dans la soupe que vous êtes en train de boire", a-t-il rétorqué à son invité.
"En fait, le service public de l'audiovisuel, c'est exactement lui qui vous donne la parole aujourd'hui. Il permet de faire vivre cette campagne électorale comme aucun autre média. C'est le service public de l'audiovisuel qui vous permet de vous adresser à vos électeurs et peut-être de vous faire réélire. Cela donne un petit peu une impression assez étrange d'entendre des responsables politiques, quels qu'ils soient, dire qu'ils vont privatiser le service public", a estimé Jordan Guéant. Avant de conclure : "J'ai plein d'autres collègues qui font très bien leur travail (...) et qui s'inquiètent aujourd'hui effectivement de tout ça. Parce que le service public de l'audiovisuel, M. Jolly, et le service public en général, c'est le patrimoine de ceux qui n'en ont pas". puremedias.com vous propose de visionner la séquence.
La privatisation de l'audiovisuel public ne sort pas de nulle part : cette proposition était inscrite noir sur blanc dans le projet présidentiel de Marine Le Pen. En septembre 2021, en effet, la candidate du RN avait imaginé privatiser Radio France et France Télévisions, les deux plus importantes entités de l'audiovisuel public et "préserver certaines choses", à l'image de "l'audiovisuel d'outre-mer" ainsi que "la voix de la France dans le monde (France Médias Monde, ndlr)". "Arte ne sera pas concernée (par la privatisation, ndlr) et l'Institut national de l'audiovisuel (Ina) sera transféré au ministère de la Culture et intégrera les archives nationales", précisait-elle alors.
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Franceinfo et le réseau des 44 antennes de France Bleu seraient eux aussi épargnés, a-t-on appris ce lundi 17 juin sur France Bleu Picardie. Céline Autin, journaliste de la station, interrogeait Damien Toumi, candidat RN dans la 2e circonscription de la Somme : "Damien Toumi, vous répondez aux questions de France Bleu Picardie qui appartient au service public de l'audiovisuel, que votre parti compte privatiser. À qui donc voulez-vous vendre France Bleu Picardie dans les trois ans qui arrivent ?", a tenté de savoir l'intervieweuse.
"Bah écoutez, on souhaite garder France Bleu Picardie. Notre idée, c'est de privatiser l'audiovisuel public mais de conserver à la fois RFI, France 24, qui représentent la France à l'étranger, Arte et Franceinfo, qui est une chaîne d'information, et les radios France Bleu, qui permettent d'avoir une proximité, qui sont les radios locales".