Une victoire pour Antoine De Caunes ! Ce mercredi, puremedias.com, en partenariat avec "20 minutes", dévoile le palmarès de la deuxième édition des Radio Notes. Dans la catégorie "émission culturelle de l'année", "Popopop" sur France Inter remporte le titre devant "Laissez-vous tenter" sur RTL et "Musique" sur Europe 1. A cette occasion, Antoine De Caunes s'est confié auprès de puremedias.com.
Propos recueillis par Florian Guadalupe.
puremedias.com : Avec "Popopop", vous remportez largement le Radio Notes de l'émission culturelle de l'année. Qu'est-ce que ça représente pour vous ?
Antoine De Caunes : Génial ! Incroyable ! Mais où s'arrêteront-ils ?! Le ciel est la limite ! (rires) Je suis ravi. Les histoires de podium, j'ai toujours tendance à relativiser mais sur le fond, c'est bien. On avait quand même une grosse interrogation en prenant cette case qui est traditionnellement occupée par de la musique classique. C'était donc un renversement de proposition assez radical. Il s'avère que ça a plus que bien marché. Il y a un public qui a changé, qui a un petit peu rajeuni. J'ai l'impression qu'on remplit le cahier des charges. On essaye de faire une émission de pop culture, qui soit joyeuse, qui raconte des histoires et qui soit divertissante pour ce milieu d'après-midi.
"Si c'est pour arriver dans une case confortable et pour produire ce qui a déjà été fait avant, ce n'est pas passionnant."
On a le sentiment que c'est un terrain de jeu pour vous.
C'est un vrai terrain de jeu au sens propre du terme. C'est à la fois un domaine que je connais un petit peu pour le travailler depuis quelques années maintenant. Je suis chez moi. C'est naturel. Je ne fais pas d'effort particulier. Ce que j'adore dans l'émission, c'est qu'elle satisfait notre curiosité. On est tous, autant qu'on est, Aurélien Ezvan le rédacteur en chef, ou Charline Roux, ma partenaire, d'un naturel très curieux. On est toujours à l'affût de ce qu'il peut se passer. On a un enthousiasme intact. J'ai l'impression que ça, ça passe à l'antenne.
Installer une émission culturelle à 16h, ce n'est pas facile. Etait-ce un pari pour vous ?
Oui, c'était un pari. Ce métier est intéressant quand on essaye des choses. Si c'est pour arriver dans une case confortable et pour produire ce qui a déjà été fait avant, ce n'est pas passionnant. Ce que j'aime bien, c'est relever des défis, comme disait Bernard Tapie dans les années 80. On veut essayer de changer un petit peu la syntaxe de l'antenne. On veut faire évoluer l'antenne et évoluer avec elle.
Vos invités sont très divers. Comment les choisissez-vous ?
Le point commun entre tous ces invités, c'est que ce sont des gens qu'on a tous envie d'avoir. Il n'y a pas de contrainte sur France Inter. On n'a pas de mot d'ordre, on n'a pas de cahier des charges particulier à remplir. On reçoit qui on veut dans la sphère qui est la nôtre, la pop culture, et qui par définition, est assez ouverte. Puis, surtout, on veut des gens qu'on a envie de voir, qu'on estime fréquentables, avec qui on a envie de passer une heure de notre vie.
Vous avez également eu des "coups" comme l'interview de Bruce Springsteen.
Oui, Bruce Springsteen, c'est peu dire que j'avais eu envie de l'avoir ! Là, on joint l'utile à l'agréable. J'étais à la fois ravi de l'avoir et de servir de courroie de transmission à ce moment-là.
"Il y a une espèce de chasse à la polémique permanente qui personnellement me fatigue."
"Popopop" ose diffuser de longues interviews en anglais. Des formats peu fréquents sur les ondes.
Oui, oui. C'est difficile de parler de pop culture sans passer par des anglo-saxons. On essaye d'équilibrer pour que ça ne soit pas indigeste. C'est quand même plus facile d'écouter une émission parlée en français qu'en anglais avec une voix par-dessus. Mais je pense que l'équilibre est plutôt pas mal.
Pourquoi avoir justement axé votre émission sur de longues interviews ?
On n'a plus le temps d'interviewer aujourd'hui. Et encore, quand vous dites de longues interviews, ce sont des plages de maximum 12-13 minutes. C'est relativement long. Mais j'ai l'impression que la parole est toujours coupée. On est à une époque où il faut aller tout de suite à la déclaration qui va marquer. On va à la pêche à ça en permanence. Ca ne m'intéresse pas du tout. Ce qui m'intéresse, c'est de parler avec les gens, les mettre à l'aise, et qu'ils m'expliquent leur démarche. Il y a un temps incompressible. C'est parce qu'il est devenu rare ailleurs que je trouve qu'il est important qu'il soit chez nous.
Vous êtes donc plus dans la conversation que dans la polémique.
Absolument. Je m'en fous de la polémique. La polémique, il y en a partout. Il y en a à tous les coins de rue. Il y en a partout sur les réseaux. Il y a une espèce de chasse à la polémique permanente qui personnellement me fatigue. Je préfère raconter des histoires ou qu'on me raconte des histoires.
"Je ne vois pas pourquoi on jouerait avec des auditeurs."
Y-a-t-il une personnalité du monde de la culture que vous rêvez d'accueillir dans votre studio ?
Y'en a plein ! Je cours après Paul McCartney depuis des années. Je pense qu'on a une émission incroyable à faire avec lui. Je cours après des artistes que j'aimerais beaucoup finir par avoir, comme Banksy. Je ne désespère pas d'y arriver. Bruce (Springsteen, ndlr), c'est une vieille histoire qui traînait. Je trouvais ça très important de l'avoir au moment où il sort sur Netflix. Il y a évidemment toujours des gens que j'ai envie d'avoir. Ca recoupe cet enthousiasme et cette curiosité. J'insiste un peu lourdement sur le rôle de l'équipe de l'émission. Je suis la tête de gondole de l'histoire, mais l'émission n'existe pas sans la participation active de Charline Roux, qui apporte vraiment quelque chose de très complémentaire dans le ton. Elle est à la fois la garantie de sérieux, de pure info et de nourriture pop culture. Il y a la fantaisie d'un Aurélien Ezvan, le rédacteur en chef, qui travaillait avec Mouloud Achour et que j'avais rencontré dans "Le grand journal" il y a quelques années. C'est la conjonction de tous ces gens-là qui fait que cette émission est particulière. Elle ne se résume pas à moi.
A la même heure que vous, vos concurrents jouent et échangent avec les auditeurs. Est-ce que ça pourrait être quelque chose en plus dans "Popopop" ?
Ce n'est pas la nature de l'émission. Je ne vois pas pourquoi on jouerait avec des auditeurs. On va leur faire gagner quoi ? Des bilboquets ? Ce n'est pas notre vocation à nous. On fait une émission d'écoute. On discute avec des gens. On raconte des histoires. On fait écouter de la bonne musique. On s'en tient à l'actualité de la pop culture. Il n'y a pas de vraie raison de faire jouer.
Est-ce que vous aimeriez faire autre chose à la radio ?
Pour l'instant non. Comme tous les formats intéressants à travailler, là, c'est une émission qui est en plein "work in progress", qui bouge, qui a beaucoup bougé depuis qu'on l'a inaugurée il y a un an et demi. On l'affine de jour en jour. Je pense qu'il y a encore du travail. Je pense que la troisième saison sera celle de la plénitude. Mais le plaisir au quotidien est d'affiner le trait.
"J'en ai assez des émissions de plateau avec le public qui applaudit à tour de bras, sans véritable raison."
Comment organisez-vous votre rythme de travail entre France Inter et Canal+ où vous avez "La Gaule d'Antoine" et où vous partez un peu partout en France ?
Je n'ai plus de vie ! Sauf qu'en ce moment, on est en train de préparer "La Gaule" version Brexit qui va passer au mois de mars. Je n'ai littéralement plus de vie. Je travaille sept jours sur sept. Je pars le week-end. Ca ne me simplifie pas la vie de famille (rire). Mais ce métier est fait comme ça. Il y a des moments où toutes les planètes s'alignent, il faut être là et y aller. Puis, surtout, ce sont deux émissions très complémentaires. "Popopop", je reçois les gens, c'est quelque chose d'intime, d'immédiat, de simple. La télé, le tournage, c'est en extérieur. C'est moi qui vais à la rencontre des gens et non pas l'inverse. Et c'est ce qui est compliqué dans les tournages à la télé. Il n'y a pas la légèreté de la radio. Les deux se complètent parfaitement. Elles suffisent à mon bonheur.
Aimeriez-vous revenir à l'antenne en clair à la télévision ?
Je m'en fous complètement, honnêtement, tant que j'ai cette liberté de pouvoir faire exactement ce que je veux, comme c'est le cas avec "La Gaulle". De manière générale, j'en ai assez des émissions de plateau avec le public qui applaudit à tour de bras, sans véritable raison, la lumière trop forte, le surmaquillage, les invités stressés parce qu'ils sont en direct. Ca, ça va, je l'ai fait. Je n'ai plus envie de le faire. J'ai envie de légèreté. J'ai envie de liberté. Aujourd'hui, toutes les conditions sont réunies. Je n'ai vraiment pas envie de revenir, ni en prime, ni en clair, ni en ce que vous voulez. Je suis très heureux de ce que je fais.