Est-ce le rôle d'un journal de prendre position aussi clairement ? Depuis hier et la Une de "La Voix du Nord" à laquelle Marine le Pen a vivement réagi, la question est posée au journal. Le quotidien régional a publié hier la première partie d'une enquête pour mettre ses lecteurs en garde contre le danger que représenterait l'élection de la présidente du FN à la tête de la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie. Alors que paraît aujourd'hui la deuxième partie de cette enquête, le directeur de la rédaction, Jean-Michel Bretonnier, a détaillé ce choix éditorial dans la matinale de France Bleu Nord.
"Le rôle d'un journal c'est de rendre compte de l'actualité, de la réalité. Il y a dans le Front National une ambiguïté particulière. Le Front National joue le jeu démocratique tout à fait normalement. Mais il a également une radicalité dans le discours dont il joue", dit-il. Une radicalité que le quotidien veut mettre à jour. "Il nous a semblé que notre rôle était d'aller jusqu'au bout de notre métier en décrivant la réalité telle que nous la voyons, telle que nous l'analysons. Et nous prenons nos responsabilités", a-t-il ajouté.
Lundi, sur RTL, Marine Le Pen a menacé le journal de lui retirer les 9 millions d'euros subventions qui lui sont versées par la région si elle est élue. La candidate, en tête des sondages, expliquait que cette enquête n'était qu'un renvoi d'ascenseur du journal à la région socialiste. "Marine Le Pen essaye de faire croire que nous vivons des subventions. Ca n'a rien à voir, nous ne touchons aucune subvention directe du Conseil Régional mais des financements de coproduction de programmes régionaux qui paraissent sur la chaîne Wéo", a clarifié Jean-Michel Bretonnier. Cette chaîne locale est la propriété à 35% seulement du groupe La Voix du Nord. Cogérée par la région et d'autres partenaires (Roularta, NRJ, Caisse d'Epargne), elle met régulièrement à l'antenne des programmes destinés à valoriser le patrimoine local.
Interrogé également sur une éventuelle perte de lecteurs suite à cette enquête, Jean-Michel Bretonnier explique qu'il préfère donner l'alerte en amont que de se voir reprocher son manque de responsabilité. "Comme c'est un parti très clivant, il y a aussi dans nos lecteurs des électeurs qui ne sont pas du tout, du tout proche du Front National et qui nous reprocheraient aussi de ne pas aller au bout de notre métier en décrivant cette réalité-là. Et si demain, cette région de 6 millions d'habitants tombait dans l'escarcelle du FN, peut-être nous dirait-on est ce que vous avez bien dit tout ce qu'il fallait nous dire avant ce premier tour ?".