Acteurs trop payés, films pas assez rentables, flops en série... Le cinéma français est pointé du doigt de toutes parts. Il y a deux ans, Mathieu Kassovitz avait lancé un pavé dans la mare en critiquant la qualité du cinéma français. Agacé d'avoir été snobé aux César pour "L'ordre et la morale", l'acteur et réalisateur s'était lancé dans une tirade choc, allant jusqu'à déclarer "J'enc*** le cinéma français". "On manque d'une ambition très simple qui est celle du cinéma. On fait des films, on oublie un petit peu le côté cinéma", avait-il expliqué, avant de critiquer la profession. "On travaille dans des tout petits groupes, on retrouve les mêmes acteurs dans les mêmes films faits par des copains... Je trouve que cette partouze artistico-commerciale n'est pas excitante. Et j'en suis extrêmement malheureux", avait-il lâché.
Aujourd'hui, c'est un autre réalisateur français connu à l'international qui prend la parole et ne ménage pas le cinéma français, et il semble partager en partie l'avis de son confrère sur la qualité des films produits. Interrogé par 20 Minutes à l'occasion de deux festivals qu'il préside, le neuvième Mobile Film Festival, qui récompense des films d'une minute tournés sur smartphone, et la quatrième édition de My French Film Festival, Jean-Pierre Jeunet évoque en partie sa carrière et ne mâche pas ses mots quand la journaliste évoque le côté "esthétisant" souvent prêté à ses films.
"Le long-métrage français, c'est quand même à 90% l'apothéose de la laideur et ça ne dérange personne", lance ainsi le réalisateur du "Fabuleux Destin d'Amélie Poulain", deuxième plus gros succès français de l'histoire à l'international. Et il illustre son propos par un exemple inattendu. "J'appelle ça le syndrome de la Pyramide du Louvre et des chiottes Decaux. La Pyramide, ça ne peut pas être plus beau et ça avait fait un scandale. Les chiottes Decaux, c'était des horreurs, mais j'ai jamais lu une critique. La laideur ne dérange personne et la beauté choque, c'est très français", poursuit Jean-Pierre Jeunet, qui avoue en avoir souffert : "Moi je m'en suis toujours pris plein la gueule pour l'esthétisme". Mais tous les films français ne lui déplaisent pas. Interrogé sur le film qui l'a marqué en 2013, il répond "Les garçons et Guillaume, à table". "Quand Guillaume Gallienne joue sa mère, c'est extraordinaire. Dustin Hoffman peut aller se rhabiller", conclut-il.