À RMC BFM, le climat social pourrait se détériorer. Son nouveau propriétaire, Rodolphe Saadé, aurait donné pour consigne à son état-major de faire fermer BFM Paris Île-de-France, l'une des chaînes régionales regroupées au sein de la marque BFM Régions. Constatant, près de deux mois après la prise de poste de Jean-Philippe Baille (directeur général délégué à l'information de RMC BFM), que cette décision – comme plusieurs autres – n'avait pas été suivie d'effets, le milliardaire aurait répété sa demande avec plus de fermeté lors d'un dîner "glacial", dixit "La lettre", organisé ce mercredi 20 novembre 2024, en marge du Comex de sa filiale regroupant ses activités de presse et d'audiovisuel.
Cette décision serait motivée par le déficit généré par cette antenne en particulier. Contrairement aux 9 autres chaînes locales du groupe, BFM Paris Île-de-France, créée en 2016, "a perdu deux à trois millions d'euros par an depuis son lancement par Patrick Drahi et Alain Weill", rappelle "La lettre" dans cet article, qui n'a pas échappé à la CGT RMC BFM – CMA Media. Le syndicat a interpellé Rodolphe Saadé sur X ce mercredi : "Lors de votre venue, nous avons tendu la main pour instaurer un dialogue social apaisé et constructif", a-t-il rembobiné. "C'est avec stupéfaction que nous apprenons votre projet de fermeture de BFM Paris. Pourquoi choisir la voie de la confrontation ?", se sont interrogés ses membres.
Le Syndicat national des journalistes (SNJ) partage la "consternation" de ses homologues de la CGT : "La station BFM Paris Île-de-France serait menacée. Après avoir subi trois réorganisations en quatre ans, les salariés l'ont appris avec accablement ce matin dans la presse...", déplorent sur la forme comme sur le fond les deux organisations dans un communiqué commun intitulé "BFM Paris va-t-elle fermer ? La direction doit répondre". D'autant plus, rappellent les syndicats, que BFM Paris-Île-de-France n'a pas été épargnée par les restructurations. "En quatre ans, (la chaîne) a connu un plan de départs volontaires, trois réorganisations de la rédaction ainsi que des changements profonds dans la manière de travailler".
Ces derniers auraient contribué à la dégradation des conditions de travail des salariés. "L’intensification de la charge de travail et le virage éditorial confus ont plongé les salariés dans un mal-être profond et une perte de sens professionnel. Comme l’a mis en évidence le rapport d’expertise diligenté par les élus du CSE en février dernier. Malgré ces changements, la rédaction a toujours travaillé avec acharnement et résilience pour maintenir une antenne de qualité", insistent le SNJ et la CGT qui prennent au mot Rodolphe Saadé. "Alors (qu'il) martelait à plusieurs reprises vouloir garder tous les salariés, cette clause de cession (ouverte du 1er octobre 2024 au 31 mai 2025, ndlr) semble aujourd’hui se déguiser en plan social pour BFM Paris. Elle nous interroge sur les ambitions du groupe pour les antennes locales", concluent avec inquiétude les syndicats qui "demandent à être reçus au plus tôt par Rodolphe Saadé".
Cet entretien pourrait aussi être l'occasion pour le SNJ et la CGT de dire un mot sur la charte d'indépendance, en cours de négociation avec CMA Media. D'après "L'informé", les deux syndicats ont demandé à être reçus par l'Arcom sur ce dossier face au "manque de dialogue" de la direction, "fermée sur le sujet". Le régulateur s'est déjà entretenu, ce mercredi 27 novembre, avec la Société des journalistes de BFMTV, opposée comme la direction à la création d'un bloc de chaînes info sur la TNT.
Décidément, les sujets chauds s'accumulent. En plus du projet de fermeture de BFM Paris Île-de-France, Rodolphe Saadé n'aurait pas dissimulé lors de ce dîner marseillais son impatience face à "un mercato qui s'éternise". À l'exception de l'arrivée de Guillaume Daret, transfuge de France Télévisions qui animera "BFM politique" dès janvier 2025, aucun recrutement externe n'a été annoncé depuis le changement d'actionnaire. Par exemple, relaie "La lettre", "l'homme d'affaires ne comprend pas pourquoi le remplacement d'Éric Brunet (à la tête avec Alice Darfeuille du "20h Brunet" du lundi au jeudi entre 20h et 22h, ndlr) traîne autant".
Rodolphe Saadé se serait enfin étonné du "flottement éditorial ressenti par la rédaction de 300 journalistes" de BFMTV. Fabien Namias, directeur général de BFMTV, avait annoncé à son arrivée, dixit "La lettre", "une inflexion de la ligne : moins de buzz, moins de clash, plus d'international". Mais cette promesse pourrait être contrariée par les audiences. Pour la première fois du mois (!), BFMTV, désormais dans une position de challenger, s'est classée devant CNews un jour de semaine ce jeudi 21 novembre 2024 (3,8% contre 3,7% pour le canal 16), journée marquée par... le déploiement du conséquent dispositif de couverture des intempéries de neige en France. Contactée par Puremédias, BFMTV n'a pas souhaité apporté de précisions ni répondre à nos questions sur tous ces sujets.