Pendant douze jours, les députés ont vivement débattu du mariage pour tous à l'Assemblée Nationale. Jour et nuit, ils ont discuté le texte, porté par la ministre de la Justice, Christiane Taubira, et étudié les 5.000 amendements déposés. Samedi, à 5h40 du matin, ils ont terminé leur travail et mis le point final au projet de loi qui sera soumis à un vote solennel demain en début d'après-midi.
Ces débats ont enflammé la toile. Les internautes ont été très nombreux à suivre les débats sur l'ouverture du mariage aux couples de même sexe sur le site web de la chaîne LCP-AN. Les opposants et les partisans de la réforme ont commenté sur les réseaux sociaux les propos des uns et des autres et vigoureusement réagi aux nombreux accrochages entre les deux parties. Pendant 12 jours, le mot-dièse #DirectAN a été l'un des hashtags les plus utilisés sur Twitter.
Mais de nombreuses voix se sont élevées pour critiquer l'attitude de La Chaîne Parlementaire - Assemblée Nationale. Alors qu'elle retransmettait les images de l'intérieur de l'Assemblée en direct, 24 heures sur 24, sur son site internet (qui a du coup enregistré des audiences records), LCP a choisi de ne pas les diffuser sur le canal 13 de la TNT, qu'elle partage avec Public Sénat. "LCPAN est en train de rater une occasion unique de montrer son utilité et de justifier son existence", s'était agacé un blogueur. Un autre estimait qu'il était "scandaleux" que la chaîne "n'utilise pas son canal TNT pour retransmettre en direct le débat #mariagepourtous pour le plus grand nombre".
Ce choix éditorial de LCP a aussi agacé... les députés ! Le président de la commission des lois, Jean-Jacques Urvoas, fait part ce matin de son incompéhension face à l'attitude de la chaîne. Dans un "récit" de ses deux dernières semaines publié par Le Nouvel Observateur, il s'en prend directement à la chaîne: "LCP a totalement loupé le débat, écrit le député socialiste du Finistère. Pour une fois que le Parlement est au centre d'un intérêt, qu'une chaîne qui a la prétention de s'appeler parlementaire ne comprenne pas qu'elle doit bouleverser ses programmes..."
Jean-Jacques Urvoas se réjouit en revanche d'avoir pu utiliser son compte Twitter dans l'Hémicycle. "Heureusement que Twitter était là d'ailleurs. (...) Le réseau a eu une fonction défouloir pour les députés de la majorité, qui devaient éviter au maximum de prendre la parole : c'est normal. Pour ma part, je me suis dit : 'Tu es le président de la commission des lois, n'abîme pas la fonction'. J'ai essayé de tweeter informatif. J'ai surtout apprécié les interactions avec le public sur #directAN."
L'usage de Twitter a d'ailleurs donné lieu à des débats au sein même du débat. Dans plusieurs de ses interventions, Christian Jacob, chef de file du groupe UMP a fustigé les échanges entre députés par gazouillis interposés, certains de ses collègues allant même jusqu'à demander l'interdiction pure et simple du réseau social dans l'hémicycle. Une interdiction que Jean-Jacques Urvoas juge "grotesque". "Faire une blague dans un tweet, je ne vois pas en quoi c'est pire que de lâcher une petite phrase dans la salle des Quatre colonnes", estime-il.
Des propos qui ne vont pas plaire à Gérard Leclerc, le patron de LCP-AN. Sous le feu des critiques, la chaîne avait finalement changé de tactique. Jeudi soir, elle avait annoncé qu'elle bouleversait finalement ses programmes pour diffuser la fin des débats. Elle promettait de diffuser "en direct et en intégralité" les débats entre le vendredi 8 février 9h30 et le lundi 11 février 8h00. Un large dispositif bien trop tardif puisque les débats se sont finalement terminés samedi matin...