La mort d'une figure emblématique de la télévision française. Selon un post du compte Facebook certifié de son fils, Laurent-Eric Le Lay, Patrick Le Lay, ex-patron emblématique du groupe TF1, est mort aujourd'hui, à l'âge de 77 ans. Concepteur dans les 1990 et 2000, avec Etienne Mougeotte, de la télévision commerciale à la française, ce chef d'entreprise avait fait de TF1 la première chaîne privée d'Europe.
Né à Saint-Brieuc en 1942, Patrick Le Lay était un ingénieur de formation ayant rejoint le groupe de construction Bouygues en 1981. Responsable de la diversification de l'entreprise de BTP, il avait préparé le dossier de candidature pour la privatisation de la chaîne publique TF1, en 1987. Après avoir remporté la mise, Francis Bouygues lui avait cédé les rênes de la chaîne en 1988. Patrick Le Lay les tiendra fermement en main jusqu'à son départ du groupe, vingt ans plus tard, en 2008.
En duo avec Etienne Mougeotte, en charge de la partie éditoriale, Patrick Le Lay fera de TF1 dans les années 1990 une véritable machine à cash. C'est l'époque dorée du "grand TF1", celle des 40% de parts de marché, qu'il s'agisse des "13 Heures" de Jean-Pierre Pernaut, des "20 Heures" de Patrick Poivre d'Arvor et Claire Chazal, des grandes retransmissions sportives, des premières diffusions des films les plus attendus, ou encore des grandes fictions de prime time comme "Navarro", "Les Cordier juge et flic" ou encore "Julie Lescaut". "Ce que nous vendons à Coca-Cola, c'est du temps de cerveau humain disponible", n'avait pas hésité à déclarer Patrick Le Lay en 2004, une expression restée depuis dans l'Histoire.
Côté programmes de flux, le début des années 1990 chez TF1 sera justement marqué par une course effrénée à l'audience avec le lancement de programmes jugés racoleurs comme "Tout est possible" de Jean-Marc Morandini, "Les marches de la gloire" de Laurent Cabrol ou encore "Perdu de vue", animé par Jacques Pradel. Accusés de faire de la "télé-poubelle", Patrick Le Lay et Etienne Mougeotte n'hésiteront finalement pas à changer brutalement leur fusil d'épaule à partir de 1996, jetant par dessus bord les programmes les plus décriés de la grille, ainsi que leurs animateurs, au nom de la désormais célèbre "quête de sens".
Après avoir juré à l'orée des années 2000 de ne jamais proposer de télé-réalité sur TF1, Patrick Le Lay y convertira finalement son groupe, enragé par l'immense succès rencontré par "Loft Story" sur "la petite chaîne qui monte" devenue sa principale concurrente, M6. Le tout-puissant patron de TF1 lancera ainsi dans la foulée "Koh-Lanta" et la "Star Academy" en 2001, avant de proposer dans les années suivantes "Nice People", "La Ferme Célébrités" ou encore "Secret Story".
Capitaine de l'industrie audiovisuelle, autant craint que respecté, Patrick Le Lay aura cherché pendant 20 ans à innover, n'hésitant pas à ferrailler avec Canal+ dans la bataille du satellite, avec le lancement de TPS au début des années 2000. Pragmatique, le PDG de TF1 aura cependant complètement raté le virage stratégique de la TNT à laquelle il ne croyait pas, obligeant quelques années plus tard son successeur, Nonce Paolini, à investir massivement dans deux canaux, TMC et l'actuelle TFX, pour rattraper le coup. Tellement emblématique qu'il disposait de sa propre marionnette aux "Guignols de l'info" de Canal+, Patrick Le Lay s'est éteint des suites d'une longue maladie.
Dans un communiqué, Gilles Pélisson, actuel PDG de TF1, a salué un "visionnaire pour le monde de la télévision moderne, un grand chef d'entreprise et un entrepreneur audacieux qui a su créer les fondations solides d'un groupe de télévision privé, sur lesquelles nous continuons de bâtir aujourd'hui. Toutes mes pensées vont à sa famille et à ses proches".