Daniel Kretinsky sort du silence. Alors que son arrivée surprise au capital du groupe "Le Monde" a provoqué l'émoi au sein de la rédaction du journal du même nom, le discret milliardaire tchèque a pris la parole dans "Les Echos" samedi. Dans cette longue interview, Daniel Kretinsky s'explique notamment sur les raisons de son investissement dans le journal. A l'en croire, ce dernier n'est pas "économique", "c'est plutôt un engagement citoyen". "Je considère que la presse est essentielle pour la préservation des valeurs traditionnelles de la démocratie libérale. Si nous investissons dans ce secteur, c'est parce que je suis très attaché aux valeurs de nos sociétés et que ce que j'observe aujourd'hui dans leur évolution me fait peur", explique l'homme ayant fait fortune dans l'énergie.
"Aujourd'hui, les gens qui s'informent uniquement par le numérique ne sont pas assez armés pour comprendre dans leur complexité les enjeux sociétaux, économiques, politiques. Le rôle de la presse pour cela est essentiel à mes yeux. J'ajouterais néanmoins avoir aussi un profond intérêt intellectuel pour les enjeux auxquels la presse doit faire face aujourd'hui", a-t-il ajouté, plaidant pour une meilleure régulation des GAFA et disant vouloir se "battre pour un système plus juste".
Souhaitant visiblement rassurer les salariés du "Monde" sur ses intentions, l'homme d'affaires a également affiché son attachement à l'indépendance de la presse. Il a ainsi assuré que la "question de la ligne éditoriale n'a rien à voir avec les investissements que l'on fait". "Chaque rédaction est indépendante et chaque média a son esprit, ses valeurs, son audience et il faut les respecter. Mes idées personnelles n'ont pas à interférer dans la ligne des journaux", a assuré celui qui vient de racheter l'hebdomadaire "Marianne", ainsi que plusieurs titres de presse de l'entreprise d'Arnaud Lagardère, tels que "Elle", "Télé 7 Jours", "France Dimanche", "Ici Paris" ou encore "Public".
Alors que Matthieu Pigasse, actionnaire du "Monde", ne lui a cédé pour l'instant que 49% de ses parts dans "Le Monde", Daniel Kretinsky ne dit pas non à un rachat à terme de l'intégralité du portefeuille du banquier, ce qui ferait de lui un actionnaire de co-contrôle du Monde aux côtés de Xavier Niel. "Si demain il devait céder l'intégralité de sa part, bien sûr qu'on regarderait, mais cela n'est pas son intention aujourd'hui à ma connaissance", a commenté Daniel Kretinsky, alors que Matthieu Pigasse a déjà un temps cherché à lui céder l'intégralité de ses parts, comme l'a révélé "Libération".