Le "Washington Post" ne se prononcera pas dans la course à la Maison Blanche, dont le finish est prévu dans la nuit du 5 au 6 novembre 2024. Une première depuis 1976 pour le quotidien de la capitale fédérale qui avait ferraillé dur contre l'administration de Donald Trump. Alors que le comité éditorial avait déjà rédigé une tribune pour soutenir Kamala Harris, son directeur général William Lewis a annoncé que le titre ne soutiendrait finalement pas de candidature, ni aujourd'hui, ni dans le futur. Il s'est justifié en invoquant notamment une volonté de "revenir aux sources" pour un journal qui a longtemps choisi de ne prendre parti pour aucun camp. "Nous sommes conscients que cette décision sera vue comme un soutien implicite à l’un des candidats, ou le rejet d’un autre, ou comme une fuite devant nos responsabilités", avait écrit le signataire.
Il ne croyait pas si bien dire puisque cette volte-face a entraîné une vague massive de désabonnements. Selon la radio publique NPR, le "WaPo" a perdu entre vendredi et mardi 250.000 lecteurs, soit 10% de sa base d'abonnés d’abonnements numériques payants. Ce chiffre colossal pourrait encore augmenter dans la dernière ligne droite avant l'issue du scrutin. La vague de résiliation s'accompagne également d'une série de démissions, puisque plusieurs plumes reconnues, comme David Hoffman, lauréat d’un prix Pulitzer cette année, ont quitté le comité éditorial en signe de protestation.
Le quotidien détenu par le milliardaire Jeff Bezos avait pourtant su relever la tête après une période de décroissance économique. Soupçonné d'avoir imposé cette position, le fondateur d'Amazon avait rejeté l'idée que ses intérêts personnels étaient à l’origine de cette volonté de s'abstenir lors des futurs scrutins. Cette "décision de principe a été prise entièrement en interne", écrivait-il dans une tribune publiée par le journal, estimant que les déclarations de soutien n’avaient de toute manière que “peu d’influence” sur le choix des électeurs. Au contraire, cette résolution, en plus de porter préjudice à son journal, remet sur la table le débat de l'autocensure des médias.