Interview
Thomas Hugues : "Je peux me rendre disponible pour de nouveaux projets"
Publié le 10 juin 2010 à 09:23
Par Charles Decant
Le journaliste confirme une 3e saison de "Médias, le magazine" et nous confie ses envies et sa vision de l'évolution du PAF.
Thomas Hugues sur le plateau de "Médias, le magazine" Thomas Hugues sur le plateau de "Médias, le magazine"© France 5 / Guyon
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En direct de Monte-Carlo. A l'occasion du Festival de télévision de Monte-Carlo, Médias, le magazine se délocalisera dimanche sur le rocher. Rencontre avec le présentateur du magazine de décryptage des médias de France 5, Thomas Hugues.

Ozap : Suppression de la rediffusion, passage du samedi au dimanche midi, changement de rédacteur en chef, Médias, le magazine a subi plusieurs bouleversements à la rentrée... Quel bilan faites vous de cette deuxième saison ?
Le bilan est très positif. On réunit en moyenne près de 600..000 téléspectateurs, avec sur certaines émissions des pics à un million. Pourtant, on prenait un petit risque en changeant de programmation ; en même temps on revenait à l'horaire historique de l'émission média de France 5 et donc on se doutait qu'il y avait quand même un public pour regarder l'émission à cette heure-là. Ensuite, sur le contenu, on a vraiment creusé le sillon qu'on avait déjà mis en place l'an dernier, et qui finalement avait fait le succès de Médias, le mag, c'est à dire le décryptage, l'actualité vue par les journalistes, le traitement de l'actualité par les journalistes, les pressions, les manipulations, les relations avec les pouvoirs, économie et politique... C'est vraiment un pilier très important de l'émission. Le second pilier de l'émission, ce sont les personnalités qui font les médias : les stars, les présentateurs, les animateurs télé, mais pas que, à la radio aussi, les patrons de presse, qu'on invite régulièrement.



L'émission reviendra à la rentrée ?
Le principe d'une troisième saison est acquis. On n'a pas signé encore le contrat, parce que tout le monde négocie en ce moment avec France Télévisions. C'est une période où on demande aux producteurs de serrer un peu les budgets... Mais oui, nous serons bien de retour à la rentrée. Je pense qu'on restera dans la case actuelle. En tout cas, je milite pour. L'émission sera ajustée à la marge.

Au cours de la saison, on a pu entendre certains de vos concurrents pointer du doigt des exclusivités accordées par France Télévisions à Médias, le magazine, comme la venue de certains invités. C'est une demande de votre part ?
Je n'ai pas ce sentiment, on n'a pas mis la pression sur France Télévisions pour qu'ils nous gardent des animateurs. J'ai vu beaucoup d'animateurs du groupe sur les plateaux de mes collègues. Ce n'est en tout cas pas une demande de notre part. On peut considérer que c'est une forme de cohérence du groupe. Si un tel doit parler d'une émission, autant qu'il le fasse en premier sur l'émission de France 5. Maintenant, c'est nous qui demandons et choisissons les invités. Nous n'avons pas de pression de France Télévisions. Il y a des demandes qui correspondent parfois à ce que l'on veut faire, et d'autre fois non et, dans ce cas-là, on refuse.

En parlant de vos "collègues", on a appris que Pif Paf ne reviendra pas à la rentrée et que Pop Com est menacé...
Je trouve ça dommage. Contrairement à ce que disent certains, je pense qu'il y a vraiment la place pour des émissions hebdomadaires qui réfléchissent à l'actualité des médias. Et je pense que c'est d'autant plus important qu'internet et la multiplication des chaînes et des radios se traduit par une surinformation : les gens sont bombardés d'images et d'informations. Prendre une fois par semaine le temps de s'arrêter, de faire un pas en arrière et d'analyser tout ce qui a été dit dans la semaine, je trouve que c'est très important. Et c'est complémentaire d'une quotidienne où on va brasser cette matière, ce rouleau compresseur qu'est l'actu et forcément, mécaniquement, avoir moins de recul.



Cette fin de saison est marquée par les très nombreuses informations de presse autour de la prochaine nomination du patron de France Télévisions par le chef de l'Etat, une première. Comment traiter cet événement lorsqu'on est sous l'autorité de France Télévisions ?
On en a un peu parlé, mais sans plus. J'ai fait un choix éditorial de ne pas relayer toutes les rumeurs, alors que chaque semaine un nouveau nom sortait. Les rumeurs étaient impossibles à vérifier. On a donc pris le parti de ne pas feuilletonner là-dessus. En revanche, régulièrement dans l'année, dès qu'il y avait un élément important, on en a parlé à travers une brève, voire un sujet plus approfondi de quatre à cinq minutes. On l'a fait et je n'ai pas reçu de consignes de la direction de France Télévisions pour me dire "surtout ne parle pas de ça... Ce n'est pas le moment". Le seul fait d'actualité sur lequel j'ai eu un échange avec eux, c'est lorsque nous avons voulu parler des deux journalistes français retenus en Afghanistan. On nous a demandé d'attendre pour en parler au nom de leur sécurité.

Personnellement, est-ce que vous souhaitez que Patrick de Carolis soit reconduit dans ses fonctions ?
C'est une question difficile, mais je pense qu'il a un bilan qui plaide en sa faveur. Si on regarde ce qu'il avait promis devant le CSA lors de son audition, on peut considérer qu'il a rempli son cahier des charges.

Vous regrettez le nouveau mode de nomination du PDG de France Télévisions ?
Je pense qu'un système à l'anglaise aurait été plus vertueux. C'est vrai que le précédent système (nomination par le CSA, NDLR) était en partie hypocrite, même si les anciens présidents du CSA disent qu'il on su parfois résister aux pressions des politiques. C'est vrai que le système actuel est plus limpide. Mais d'une certaine façon, est-ce qu'il n'y a pas un effet boomerang pour l'exécutif ? Maintenant, la décision de nommer le président de France Télévisions est une décision politique analysée comme telle. Avec tout ce que ça suppose comme pressions et suspicions potentielles pour le futur président. On le voit bien avec Jean-Luc Hees d'ailleurs à Radio France, même si c'est très souvent injuste.



Vous évoluez au sein d'un groupe, vous avez l'expérience du prime time sur TF1. Est-ce que vous n'avez pas envie d'être à la tête d'un magazine ou d'une émission d'info, ou d'infotainment, sur France 2 par exemple ?
L'infotainment non. J'ai déjà donné (Défense d'entrer avec Valérie Benaïm en 1999 et 2000 sur TF1, NDLR) et ce n'est pas forcément ce que je fais de mieux et ce que j'ai le plus envie de faire. Maintenant, oui, avoir un magazine d'info sur l'une des chaînes de France Télévisions, je ne vais pas vous mentir, ça m'intéresserait.

Comment se passent justement les discussions avec la direction de France Télévisons ? Est ce que vous êtes force de propositions ? Est-ce qu'on vous contacte pour certains projets ?
J'ai été plusieurs fois contacté. La dernière fois, c'était il y a trois semaines. Un producteur m'a approché pour un projet d'émission estival. Mais j'ai décliné, ce n'était pas ce que j'avais envie de faire. Avec France Télévisions, le dialogue est régulier. Maintenant que Médias, le magazine est installé, je peux me rendre disponible pour d'autres projets.

Surtout que vous vous êtes retiré dernièrement de Story Box Press, l'agence de presse que vous aviez monté avec Lorraine Willems et Laurence Ferrari en 2006. Cette dernière avait quitté la société en 2008, vous cette année... Pourquoi ?
Je voulais justement me recentrer sur mon métier de journaliste. Je suis plus journaliste que chef d'entreprise. Je suis heureux d'avoir participé à la création de Story Box, qui est une belle agence de presse, qui va continuer avec Lorraine Willems. C'est une décision commune donc il n'y a pas l'ombre d'une difficulté entre nous. Mais je n'avais plus envie de consacrer trop d'énergie à cette partie-là de mon activité.



Est-ce que la radio est un média dans lequel vous souhaitez évoluer ?
Pour moi, la radio est un média fabuleux. C'est le média de l'instantanéité de la proximité. Ca me passionnerait d'animer une tranche d'info ou d'avoir une émission.

Finissons par une question d'actualité. Lundi, TF1 a diffusé dans son 20h une interview du président iranien réalisée par Laurence Ferrari. Elle s'est entretenue avec lui vêtue d'un voile. Certains s'en sont émus. Quel est votre avis ?
Je trouve ça totalement naturel. Lorsqu'on va dans un pays musulman où les femmes sont voilées, on respecte les règles de ce pays. Ça n'a pas empêché Laurence Ferrari de poser les questions qu'il fallait poser. Dans mon métier, j'ai tellement vu de journalistes et de grands reporters porter un voile dans un contexte similaire que je ne comprends pas cette polémique. Je la trouve complètement futile.

Ce type de polémiques se multiplie d'ailleurs ces dernières années. C'est une dérive de l'immédiateté ?
Bien sûr. C'est lié à la multiplication des sources et des sites internet qui parlent de médias. C'est normal, il faut bien alimenter ces sites. Une pierre dans le jardin d'Ozap. Les polémiques prennent plus d'ampleur et se développent plus vite qu'auparavant donc on a l'impression qu'il y en a plus. Mais ce n'est pas l'évolution la plus réjouissante du métier de journaliste de ces cinquante dernières années.

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