Dans "Les traîtres", sur M6, Vincent Cespedes est, pourrait-on dire, dans son élément. Voilà une vingtaine d'années, après la saison 1 de "Loft Story" sur M6, il publiait, en effet, "I Loft You", "le premier livre en français sur la télé-réalité". "Une chaîne privée a-t-elle le droit d'accélérer le dépérissement de l'intégrité, de l'honnêteté et de la culture chez des millions d'adolescents ?", s'interrogeait-il, à l'époque, au sujet de l'arrivée en France de cette télévision d'un nouveau genre. Deux décennies et une participation à un programme de télé-réalité plus tard, Vincent Cespedes ne renie rien de ses écrits. Il se dit, en revanche, "persuadé" que "Les traîtres" coche toutes les cases du "format de demain".
"On n'est plus du tout dans l'oeil de 'Loft Story'. J'entends par là la transparence exacerbée et l'exhibition de l'intime", affirme-t-il à puremedias.com. "Dans 'Les traîtres', au contraire, on cache les choses. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que ce jeu émerge en 2021, après le confinement, période au cours de laquelle la sensation de huis clos prédominait et où il fallait cacher plus de choses qu'en montrer".
L'autre paramètre, mis en lumière par le philosophe, est la place laissée aux téléspectateurs. "C'est un jeu qui surfe sur le flou des identités, le flou des intentions. C'est aux téléspectateurs de décrypter. Là où c'est excitant, c'est qu'ils se retrouvent, par analogie au jeu vidéo, dans un 'jeu cinéma'. Il y a un film commun à tout le monde duquel émergent des théories alternatives", observe-t-il.
À LIRE AUSSI : "Les traîtres" : La production a-t-elle dévoilé trop vite leur identité aux téléspectateurs ?
"Cette émission n'a donc rien d'un contenu déversé dans les crânes. Il y a des possibilités interprétatives multiples et c'est ce qui plaît à mon avis dans ce genre de format", analyse encore Vincent Cespedes, qui a acquis la conviction suivante : "Le format de 2040 sera celui dans lequel les téléspectateurs pourront directement influer sur le scénario. Mais 2040, on n'y est pas encore", sourit-il.