"Allez, on se la refait ?". 13h45 ce mardi 21 juin, un soleil de plomb fait chauffer le bitume aux abords du Stade Auguste-Delaune, à Reims. Devant l'immense scène installée sur le parking où les amateurs de football se pressent habituellement pour soutenir les joueurs rémois, une cinquantaine de musiciens, danseurs et techniciens s'affaire aux préparatifs du medley de huit minutes que proposera M. Pokora ce soir pour la nouvelle édition de la Fête de la Musique. Cette année, le grand rendez-vous musical de France 2 s'est délocalisé en Champagne-Ardennes.
"On est hyper bien accueillis ici à Reims. La ville et la région ont vraiment mis à notre disposition des infrastructures merveilleuses pour faire un beau show, une grande fête. Les artistes sont super heureux. C'est important d'aller en Province voir les gens, de ne pas donner l'impression que c'est toujours Paris, Paris, Paris" se félicite Emmanuel Virot, le directeur artistique de l'émission qui passera la journée à faire des aller-retours entre le car-régie, où toute la magie de la réalisation prend vie, aux coulisses pour s'assurer que tout soit minutieusement prêt pour le coup d'envoi. "Un direct, c'est beaucoup de pression".
Durant trois heures et demi ("sans doute quatre" souffle-t-on officieusement), Aya Nakamura, Pascal Obispo, Slimane, Hoshi, Patrick Bruel, Vianney, Zazie, Gims, Axelle Red, David Hallyday, Naps, Marina Kaye, Pierre de Maere ou la troupe de ''Molière L'opéra rock'' se relaieront sans temps mort pour faire vivre aux 20.000 spectateurs attendus et aux téléspectateurs devant leur télévision l'adrénaline d'un concert. "C'est un des plus gros shows de l'année, c'est un des plus gros rendez-vous de l'année aussi pour les Français. Pour nous, c'est une vraie mission de service public que de pouvoir offrir ce cadeau. Avec plus de 44 artistes sur 47 numéros, 90 chansons, des nouveaux talents, des clins d'oeils à l'ancienne génération, c'est tout le répertoire de la scène française qui est là" s'enthousiasme Alexandra Redde-Amiel, la directrice des jeux et divertissements de France 2, derrière ses lunettes de soleil.
Emmanuel Virot le reconnaît, il faut savoir composer avec la vision des artistes et celle de la production pour obtenir le dosage parfait : "Ce n'est jamais facile. Mais à partir du moment où ils viennent, ils sont hyper volontaires. On peut se permettre de leur demander des trucs exceptionnels. Et ils jouent le jeu !". Ce soir, Garou, Patrick Bruel, Santa, Lissandro et Claudio Capéo célébreront par exemple l'héritage culturel de Michel Fugain le temps d'un tableau empreint de nostalgie. Un spectacle de cette envergure nécessite une véritable armée de petites mains. "En moyenne, 130 techniciens sont mobilisés jusqu'au moment où on commence les répétitions. Avec les artistes, qui arrivent sur place deux jours en amont, on monte jusqu'à 450 personnes. Ça fait beaucoup de monde !" confirme la productrice Maryse Marascia, qui travaille de concert avec la municipalité depuis plus de six mois. Coût d'un tel dispositif ? "Nous ne sommes pas autorisés à France Télévisions à parler des prix" nous répond-t-on, en précisant tout de même que "la ville et la région participent" au financement de ce gros barnum.
En coulisses, la bonne humeur est de mise. Les danseurs se détendent à l'ombre des arbres entre deux mémorisations des chorégraphies, les blagues sur la météo fusent mais une certaine tension est bien palpable. "C'est un rendez-vous, un direct. C'est vrai que c'est beaucoup de pression" concède Alexandra Redde-Amiel : "Tout peut se passer ". Une soirée de live, sans filet, c'est une source d'angoisse et de problèmes inopinés à régler sur le tas. Concentration et réactivité sont indispensables. Hier soir, une forte averse a paralysé le bon déroulé des balances. "Ça, on ne peut pas lutter. On s'est pris la flotte bien comme il faut !" glisse Emmanuel Virot, amusé. Du côté de l'animation, Laury Thilleman a sa petite technique pour pallier d'éventuels "dérapages incontrôlés" : "C'est la formule de Michel Drucker. Il m'a toujours dit : pour avoir l'air naturel, il faut que tu travailles deux fois plus. Tout est réglé au millimètre avant qu'on arrive sur le show. Bien connaître sa partition, ça permet aussi de s'autoriser des libertés avec les artistes et de maîtriser des moments d'impro". L'animatrice rempile pour la sixième année consécutive à la présentation, aux côtés de Garou.
"On forme un duo très complice. On bosse, on se marre, on rigole, on se chambre... Comme dans la vraie vie !" assure l'ancienne reine de beauté, qui se remet doucement d'une fracture du tibia. Ce soir, pas de talons aiguilles pour elle : "Je suis la plus heureuse de porter du plat. Ça complexera moins les artistes que je dépasse de trois têtes quand je porte 12 centimètres de talons !". Une blessure, c'est ce que redoute par-dessus tout Kamel Ouali, avec la menace des intempéries qui empêcherait les danseurs de se produire sous la pluie. Le célèbre chorégraphe, qui officie à la direction artistique danse, supervise pas moins de 96 danseurs, venus de la troupe du Paradis Latin mais aussi d'écoles de danse locales, pour l'entièreté du show. "Ce n'est pas qu'une émission de télé, c'est aussi une expérience avec le public. Il faut trouver les bonnes ficelles pour que personne ne se sente oublié" affirme-t-il. Il est désormais 16h10 et une foule compacte se presse déjà aux entrées. En serpentant entre les kilomètres de câbles électriques qui relient toutes les infrastructures, on croise Juliette Armanet en crop top, Vianney qui adresse des saluts de la main. Amadou et Mariam se protègent de la chaleur sous une tente, pendant que Christophe Maé fait des vocalises. Pas de doute, la soirée va être belle !
De notre envoyé spécial sur place, Yohann Ruelle.