Le ministère français de la Défense a-t-il fait l'objet d'un espionnage au profit de la Russie en 2017 ? C'est ce qu'a semblé confirmer hier soir sur France 5 Bernard Bajolet, ancien directeur de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) de 2013 à 2017. Interrogé par Caroline Roux dans "Poutine, le maître du jeu", une nouvelle déclinaison en prime time de "C dans l'air", Bernard Bajolet a réagi à une affaire d'espionnage russe au sein du cabinet du ministre de la Défense de l'époque, Jean-Yves Le Drian. Bernard Bajolet a ainsi affirmé dans le documentaire au sujet de ce dossier ultra-sensible : "En effet, quand j'étais directeur général de la sécurité extérieure, je l'avais fait remonter". Avant d'enchaîner sur la question plus générale du contre-espionnage. puremedias.com vous propose de revoir cette séquence.
Cette affaire avait été révélée dès 2018 par "Mediapart" et concernait un espion du GRU, le service de renseignement militaire russe, qui aurait recruté une "taupe" au sein du "cabinet militaire" de Jean-Yves Le Drian lorsqu'il était ministre de la Défense sous la présidence de François Hollande. Au cours de rencontres entre l'officier supérieur français et son officier traitant russe, des comptes-rendus de réunions ministérielles "auraient été transmis", écrivaient à l'époque les deux journalistes de "Mediapart" ayant signé l'enquête. Bernard Bajolet aurait en conséquence saisi le procureur de la République de Paris de cette affaire.
Selon le blog du journaliste spécialiste des questions de Défense, Jean-Dominique Merchet, hébergé par "L'opinion", cette saisine de la justice concernerait en réalité une autre affaire liée à deux anciens personnels de la DGSE ayant travaillé pour la Chine. "Ils ont été condamnés pour trahison par la justice en juillet 2020", précise le journaliste, ajoutant que "Bernard Bajolet souhaite obtenir l'intégrale de son interview sur France 5".
Au lendemain de la diffusion de ce documentaire, Bernard Bajolet a rétropédalé dans une lettre envoyée à l'AFP où il affirme que sa réponse a été mal interprétée. Il assure n'avoir "jamais voulu réagir à un cas individuel ni mentionner un cabinet en particulier, mais voulu souligner l'intensité des activités d'espionnage menées à l'encontre de notre pays par des puissances étrangères, dont la Russie, et l'importance de la fonction de contre-espionnage confiée aux services de renseignement". "En aucun cas ma réponse ne peut être considérée comme une confirmation de la réalité des allégations dont a fait état Mme Roux sur la présence d'un agent étranger dans le cabinet d'un ministre de l'époque", affirme-t-il.
"À aucun moment le cabinet Le Drian n'a été mis en difficulté", a de son côté réagi lundi matin auprès de l'AFP le cabinet du ministre des affaires étrangères, où l'on se dit "très surpris des déclarations d'un ancien DGSE qui sait que cette typologie d'affaires est classifiée".
Hier soir, la diffusion sur France 5 de "Poutine, le maître du jeu" a rassemblé 779.000 téléspectateurs, soit 4,9% du public.