Alors que TF1 parie une nouvelle fois sur le foot, M6 compte sur la contre-programmation ce soir avec le lancement de "Devious Maids". Imaginée et produite par Marc Cherry, créateur de "Desperate Housewives", et co-produite par Eva Longoria, la série suit plusieurs domestiques d'origine latine qui travaillent pour les familles les plus riches de Beverly Hills. Le meurtre de l'une d'entre elles donne le coup d'envoi de la première saison, diffusée avec succès outre-Atlantique, et dont M6 diffuse ce soir les six premiers épisodes.
Dans "Devious Maids", Ana Ortiz, repérée dans "Ugly Betty", campe Marisol Suarez, une domestique qui n'en est pas tout à fait une, prête à tout pour tirer au clair le meurtre de la jeune Flora. De passage à Monte-Carlo il y a quelques jours dans le cadre du 54ème Festival de Télévision, elle a répondu aux questions de puremedias.com sur la saison 1, les critiques qui l'ont surprise, la force de la série et l'ambiance parfois électrique sur le tournage.
Propos recueillis par Charles Decant.
L'arrivée de "Devious Maids" à la télé n'a pas été aussi simple qu'on aurait pu le penser. Développée pour ABC, la série n'a pas séduit la chaîne et a finalement été sauvée par la chaîne câblée Lifetime... Comment l'avez-vous vécu ?
J'étais déçue, parce que j'adorais travailler pour ABC, qui a été fantastique avec moi à l'époque de "Ugly Betty" notamment. Mais Lifetime fait partie du groupe, et ça collait bien. La chaîne a pu attirer énormément l'attention et faire énormément de promotion pour la série, et je ne pense pas qu'ABC aurait pu en faire autant puisqu'ils ont beaucoup d'autres séries.
Le fait d'être diffusé sur le câble vous donne-t-il plus de liberté ?
Clairement. On est un gros poisson dans une petite mare, et pas un petit poisson perdu dans un océan. Sur ABC, on aurait été perdu parmi les autres. Et puis, grâce à ça, on peut faire seulement 13 épisodes. Lifetime nous laisse de la liberté, nous laisse de l'espace pour respirer un petit peu.
En quoi Eva Longoria est-elle impliquée dans le processus créatif ?
Elle est en quelque sorte notre ange gardien. Elle est très proche de Marc Cherry, qui a créé la série. Et il écrit très, très bien pour les femmes. Mais il écrit un peu moins bien pour les femmes hispaniques. Et c'est une voix très différente. Du coup, Eva lui glisse quelques suggestions, elle lui offre une autre perspective. Et puis, elle se bat pour nous ! Il y a eu une grosse polémique quand on a lancé la saison 1, beaucoup de critiques... Ce qui m'a choqué le plus, c'est que les critiques les plus vives venaient de notre propre communauté. Ca nous a surprises.
Vous avez compris les critiques ?
Oui, parce que quand j'ai lu le titre la première fois, je me suis dit "Vraiment... ? Des bonnes ?". Mais j'ai lu le script parce que c'était Marc Cherry, et parce qu'Eva est une amie de longue date. Quand j'ai lu les personnages, je me suis rendu compte que les bonnes étaient vraiment le centre moral de la série. Ce sont elles qui sont fortes, qui sont drôles, qui ont le pouvoir. Ma mère était une femme de ménage. La mère de Judy Reyes était une femme de ménage. Pourquoi ne pourrait-on pas raconter ces histoires avec dignité, mais aussi avec de l'humour, du sexe... Pas besoin que les héros soient des médecins ou des avocats. Ce sont ces gens qui élèvent les enfants, qui nettoient les maisons. C'est intéressant !
Et puis c'est une série portée par quatre femmes !
Absolument, quatre actrices de couleur !
Vous pensez que c'est l'une des raisons qui explique la réticence d'ABC ?
Oui, je le pense. Je pense qu'ils avaient peur que ça ne parle pas au public. Alors que si ! Donc on a eu beaucoup de chance que Lifetime nous sauve. Et je pense que c'était vraiment le bon choix, a posteriori. Sur une grande chaîne, si on ne démarre pas très fort, ils se disent "Ah, dommage, ça n'a pas marché". Mais eux nous ont laissé le temps, ils ont attendu que le public nous trouve. Et ça a marché !
Est-ce que ça vous a déçu qu'en 2013, le fait que la série soit portée par des femmes hispaniques soit à ce point significatif et pointé du doigt ? Et que ça ne soit pas vu comme "Desperate Housewives", par exemple...
Pour être honnête, je pense que les choses sont un peu plus évoluées en Europe. Dites-moi si je me trompe, mais j'ai le sentiment qu'il y a plus de diversité ici qu'aux Etats-Unis, de ce que j'en ai vu. Si vous regardez les séries qui ont eu le plus de succès... "Friends", ils étaient tous blancs ! J'adore cette série, c'est l'une de mes préférées, mais c'est vrai, ils étaient tous blancs. "Seinfeld", pareil. "Will & Grace", idem. On n'est pas aussi avancé qu'il le faudrait, mais on y arrive ! Aujourd'hui, une série où il n'y a que des blancs, ça fait un peu bizarre.
Qu'est-ce qui vous a plu dans le personnage de Marisol ?
J'ai l'habitude de jouer la bonne copine un peu impertinente, ou le flic un peu dur. C'est ce qui m'a attiré dans le personnage de Marisol, qui est si mesurée, si calme et concentrée.
Comment l'avez-vous décroché ?
J'ai rencontré Marc à son bureau. Il m'a demandé à quel rôle j'étais la plus réceptive. Et je lui ai dit Marisol. Il m'a répondu "C'est drôle, je ne te voyais pas comme Marisol, parce que tu as une énergie si jeune ! Je te vois plus comme une Goldie Hawn, et je vois plus Marisol comme une Grace Kelly". Je lui ai répondu "Elles sont toutes les deux blanches aux cheveux blonds" ! (Rires) Mais le fait qu'il m'ait dit ça m'a aidée en fait, et je l'ai compris. Donc j'ai lu le rôle, et je l'ai eu !
Vous savez déjà s'il y aura une saison 3 ?
On ne sait pas, non. On vient de finir la saison 2... Mais je pense qu'il y aura une saison 3. La chaîne y croit beaucoup, les audiences augmentent tout doucement. Ils ont tellement investi que je pense qu'ils veulent voir où elle peut aller.
Quel regard portez-vous aujourd'hui sur "Ugly Betty" ?
C'est peut-être un peu vaniteux mais j'adore regarder "Ugly Betty". A chaque fois, je me rappelle énormément de bons souvenirs. Quand je vois une scène, je me rappelle que le réalisateur a crié "Coupez !" et qu'America, le petit Marc et moi on s'est mis à chanter ou à danser ou à faire n'importe quoi. Il y a une saison où j'étais enceinte, ils me cachaient comme ils pouvaient... (Rires) J'adore regarder la série. Je suis très, très fière de la série.
Et comment est l'ambiance sur le tournage de "Devious Maids" ?
On a toutes des personnalités assez fortes, donc il nous arrive de nous chamailler. Mais on a une vraie chance : on est amies depuis très longtemps. On est très investies dans la série, et on se respecte énormément en tant qu'actrices, donc quand il arrive que le ton monte, on en parle sur le moment, on règle ça, et on tourne la page. Parce que ça vaut la peine ! Le plus important, c'est le succès de la série. Et puis, on est amies depuis 10 ans, on ne va pas non plus laisser une série nous séparer !