Canal+ est orpheline. La chaîne cryptée a perdu hier son premier patron, André Rousselet, décédé dimanche 29 mai, à l'âge de 93 ans. Né à Nancy le 1er octobre 1922, André Rousselet avait commencé une première carrière dans la préfectorale après des études de droit. C'est au cours de cette dernière qu'il avait fait la connaissance de François Mitterrand dont il restera l'un des plus fidèles collaborateurs. A l'orée des années 1960, il s'était lancé dans les affaires en devenant propriétaire de la G7, l'une des toutes premières compagnies de taxis parisiens. Grâce à ses relais politiques, il en avait fait un géant du secteur, rachetant notamment la compagnie concurrente Taxis Bleus. Il l'avait aussi diversifiée en se lançant notamment dans les remorqueurs portuaires.
Devenu directeur de cabinet de François Mitterrand à l'Elysée en 1981, il avait été nommé patron d'Havas, alors entreprise publique, par le président de la République. Il avait alors piloté la naissance d'une chaîne à péage française axée sur le cinéma et les divertissements et baptisée Canal+. Dans la douleur, cette dernière voit le jour le dimanche 4 novembre 1984 à 8h du matin (vidéo ci-dessous) dans un scepticisme général.
Les débuts de Canal+ sont été très difficiles, à tel point que la chaîne sera sauvée de la disparition par François Mitterrand. Canal a fini par relever la tête en créant un modèle économique inédit fait de cinéma, de retransmissions sportives, de porno et plus généralement d'une impertinence inédite à l'époque à la télévision. En moins de 10 ans, André Rousselet a ainsi créé un groupe audiovisuel international très rentable, diversifié dans les chaînes thématiques, la production audiovisuelle et cinématographique.
En 1994, le PDG de Canal+ avait finalement été évincé de la direction de Canal+ à l'issue de manoeuvres actionnariales menées par Havas, la Générale des Eaux et la Société Générale. Dans la foulée de son départ, André Rousselet avait publié dans Le Monde une tribune intitulée "Edouard m'a tuer", rendant Edouard Balladur, le premier ministre de l'époque, responsable de son départ. "Nous lui devons beaucoup. Toutes les équipes de Canal sont profondément émues", a réagi la direction de Canal+ à l'annonce de son décès.