La SDJ monte au créneau. Le mercredi 14 avril dernier, "Le Parisien" a mis en ligne une affaire de tapage nocturne dans un logement jouxtant celui de l'ancien chef de l'Etat Nicolas Sarkozy. Après le match du Paris Saint-Germain contre le Bayern Munich au parc des Princes, auquel il a assisté mardi, l'ex-président de la République est tombé nez à nez avec des fêtards bruyants. Alertée avant l'arrivée de l'ancien locataire de l'Elysée, la police a décompté une trentaine de participants.
Problème : l'article du "Parisien" a depuis été retiré du site du quotidien francilien. Cette décision a heurté la Société des journalistes du titre de presse qui a "condamné fermement cette dépublication" à travers un communiqué et a dénoncé "une pratique rarissime" et "d'autant plus incompréhensible que l'article initial avait fait l'objet d'un correctif peu avant 18h".
Retour sur les faits, présentés par la SDJ. L'article a été publié vers 14h30 et a été repris par plusieurs sites. La Société de journalistes a reconnu qu'il "comportait une erreur dans son titre" : "Celui-ci indiquait, à tort, que Nicolas Sarkozy avait de lui-même appelé la police pour se plaindre du bruit". "J'ai reçu vers 17h-17h30, un coup de fil du cabinet de Nicolas Sarkozy disant que tout était faux, de A à Z", a raconté Jean-Michel Salvator, directeur des rédactions du "Parisien/Aujourd'hui en France", à la SDJ jeudi lors d'une rencontre. Et d'ajouter aux journalistes : "Un ancien chef de l'Etat ne passe pas par le 17 pour ce genre de choses et il n'était d'ailleurs pas chez lui puisqu'il assistait au match du PSG".
Ainsi, le titre a été "modifié" et l'auteur de l'article a apporté "une précision", "sourcée de l'entourage de l'entourage de l'ex-chef de l'Etat, pour éclaircir ce point" : "L'article en lui-même, relatant les félicitations de Nicolas Sarkozy aux policiers alors qu'il rentrait chez lui, est resté inchangé car parfaitement conforme à la réalité des faits". Jean-Michel Salvator a d'ailleurs estimé que "l'incident était clos". "L'affaire aurait dû en rester là", a noté la SDJ.
Sauf que dans les heures qui ont suivi, la Société des journalistes du "Parisien" a découvert que l'article avait "purement et simplement disparu du site", "sans que son auteur principal n'en soit avisé". "J'ai eu des remontées disant que le journaliste reconnaissait que l'information était fausse, qu'il n'avait ni preuve, ni certitude et n'avait pas appelé le cabinet de Sarkozy. Je me suis dit que cet article était mal né, et que dans ces conditions, il valait mieux le retirer", a fait savoir Jean-Michel Salvator. Pourtant, auprès de la SDJ, l'auteur de l'article a affirmé n'être "jamais revenu sur l'exactitude de ses informations", "issues de quatre sources distinctes".
"La SDJ condamne fermement cette dépublication. Elle ne se justifiait pas d'un point de vue éditorial. Elle est par ailleurs totalement inacceptable - et contre-productive - d'un point de vue formel. Supprimer un article est une pratique dangereuse. Elle introduit une rupture dans la relation de confiance qui nous lie avec nos lecteurs : comment peuvent-ils comprendre cette suppression subite ?", a déclaré la SDJ dans son communiqué.
De son côté, Jean-Michel Salvator a réagi : "Je ne veux pas écraser la craie. C'est un incident regrettable. Il y a eu dysfonctionnement mais c'est un papier minime qui n'a pas d'enjeu autre que l'audience. Je prends la responsabilité de cette décision". Face à ces propos, la SDJ a demandé que "ce genre d'incident ne reproduise plus" et "que la pratique de l'Edit, déjà utilisée à plusieurs reprises par le passé, soit systématisée".
Ce n'est pas la première fois que les journalistes du "Parisien" se retournent contre leur patron. Début mars dernier, la Société des journalistes, les organisations syndicales et le "collectif des femmes du 'Parisien'" s'étaient agacés après la publication d'un édito défendant Nicolas Sarkozy et donnant son opinion sur une décision de justice. Même gronde en 2020 quand Rémy Dessarts, directeur délégué des rédactions, avait tenu des propos sinophobes dans un éditorial. Il avait alors été soutenu par Jean-Michel Salvator qui avait plaidé le "malentendu" à l'époque.