Editorial. Rien ne sera plus jamais vraiment comme avant à iTELE. Le terrible conflit qui vient de s'achever hantera pendant plusieurs mois les esprits de ceux qui restent ou la rejoindront. Le silence assourdissant de certaines stars de l'antenne pendant un mois risque d'être pesant. Mais iTELE est morte, vive CNEWS, le nouveau super projet de la direction pour remettre la chaîne dans le droit chemin budgétaire et éditorial.
Depuis dix-huit mois, la prise de pouvoir de Vincent Bolloré à Canal+ a eu de sévères répercussions sur la couleur éditoriale des antennes, en matière de sport, d'investigation ou encore de dérision. Il fallait s'attaquer à l'information. Les journalistes grévistes d'iTELE, petite chaîne du groupe, auront été les seuls à tenir tête au milliardaire. Pendant 31 jours. De quoi crisper un actionnaire à qui habituellement personne ne résiste. Le patron de Vivendi a fait de cette crise à iTELE un symbole de sa toute-puissance, une affaire personnelle aussi, malgré les avertissements de ses cadres inquiets d'un pourrissement du conflit, désastreux pour l'image du groupe.
Cette grève, tristement inédite dans un média privé, aura aussi révélé la solidarité de toute une profession, attachée à ses valeurs d'indépendance et d'éthique à l'heure où la plupart des groupes deviennent la propriété de grands industriels. Certains verront dans cet élan confraternel du corporatisme, le triomphe du "Tout-Paris médiatique" et du "petit monde socialo-bobo-écolo". Le temps leur montrera que ce combat commun était indispensable, noble et surtout d'utilité publique. Rien n'est jamais vraiment acquis en matière de droit des citoyens à une information de qualité, complète, libre, indépendante et pluraliste. Vincent Bolloré aura eu au moins ce mérite, nous le rappeler. Bravo aux journalistes d'iTELE d'avoir mené ce combat, souvent dans la douleur, et bonne chance à ceux qui vont s'atteler à la reconstruction de cette chaîne qui a, depuis 16 ans, toujours eu sa place dans notre salon.