Sortie de conflit douloureuse à iTELE. Ce matin, la rédaction, réunie en assemblée générale, a voté la reprise du travail à l'unanimité moins deux abstentions, après trente et un jours d'une grève inédite, la plus longue dans un média audiovisuel privé. Cette levée du mouvement s'est accompagnée d'une nouvelle vague d'une vingtaine de départs, "sous les pleurs et les applaudissements", qui s'ajoutent à ceux actés pendant la grève. L'une des figures de la SDJ, Guillaume Auda, a notamment annoncé son départ ce matin. "L'édifice s'effondre comme un château de cartes, iTELE est morte" a commenté sur son compte Twitter le journaliste Stefan Etcheverry.
Qu'a obtenu la rédaction d'iTELE de la direction ? "Des miettes", se lamentent les journalistes. "Bolloré a gagné", commente un autre dépité. Le protocole d'accord de sortie de crise qui va être signé devrait être sans surprise. Serge Nedjar doit cumuler toujours les deux fonctions de directeur de la chaîne et de la rédaction mais sera assisté d'un adjoint, Jean-Marc Morandini est maintenu en quotidienne, une charte éthique, comme la loi l'imposera à partir de mi-2017, sera rédigée pour protéger la rédaction de son actionnaire.
Lundi après-midi, la direction, qui a rencontré les ministres Audrey Azoulay et Myriam El Khomri avait pourtant annoncé des avancées "sur tous les points, sociaux et éditoriaux". Ont suivi des heures de discussions entre les deux parties. "Ce qu'on veut, c'est un patron de la rédaction. Quelqu'un avec qui on n'est pas toujours d'accord mais qui parle le même langage, l'information. On ne veut pas de confusion entre les casquettes de directeur général et directeur de l'information", expliquait encore hier sur France Inter Jean-Jérôme Bertolus, qui n'a pas été entendu et a décidé lui aussi de quitter la chaîne.
Le retour de "Morandini Live" sur la future CNEWS était l'un des points d'achoppement entre la direction et la rédaction, qui n'a pas obtenu gain de cause sur ce point. L'animateur, très proche de Vincent Bolloré, reviendra donc dans les prochains jours mais de manière "encadrée", les journalistes de la rédaction pourront refuser de travailler avec lui. On parle d'un "cordon sanitaire" autour de l'émission "Morandini Live", déjà mise en demeure par le CSA pour plusieurs manquements.
iTELE va devoir maintenant se relever de cette grève, entachée par des dizaines départs, des journalistes de l'ombre, des rédacteurs en chef mais aussi des présentateurs, comme Amandine Bégot. Tous les postes seront remplacés, a assuré la rédaction. L'audience de la chaîne s'est logiquement effondrée ces dernières semaines et iTELE va devoir faire revenir les téléspectateurs un par un sur le canal 16 de la TNT. La concurrence, BFMTV, LCI et franceinfo a profité de l'affaiblissement de la deuxième chaîne info de France, en grignotant jour après jour de nouvelles parts de marché. Le conflit levé, la maison-mère Canal+ va pouvoir se concentrer sur le lancement de ses nouvelles offres commerciales, censées mettre un terme à l'hémorragie du parc abonnés en France, en chute de 500.000 selon le dernier décompte.