L'histoire se répète. Comme cela s'était déjà produit en 2018, ce matin, peu après 8h, Canal+ a coupé le signal des chaînes du groupe TF1 (TF1, TMC, TFX, TF1 Séries Films et LCI). Le groupe crypté a argué de la fin de l'actuel contrat de distribution, effectif le 31 août, pour justifier sa décision, tout en dénonçant dans un communiqué "le versement d'une rémunération très conséquente" réclamée par TF1. De son côté, le groupe présidé par Gilles Pélisson a pris acte dans un autre communiqué du choix de Canal+ de "priver ses abonnés des chaînes et des services qu'ils payent dans leur abonnement". puremedias.com fait le point sur les principales questions que posent ce nouveau bras de fer.
Outre les principaux points du précédent accord - distribution des chaînes, replay étendu, avant-premières... -, ce nouvel opus intègre l'offre de replay MYTF1 Max lancée en 2021 et davantage de contenus en 4K.
Officiellement, il s'agit d'une histoire d'argent, comme évoqué ci-dessus ; Canal+ s'alarmant d'exigences qualifiées d'"infondées" et "déraisonnables". Nos confrères du "Point" évoquent "une hausse de 50 % par rapport au prix du précédent contrat", réclamée par TF1. Une hausse qui serait certes bien réelle par rapport au précédent contrat de distribution, mais pas de cette importance selon nos informations. Le groupe TF1 se targue d'ailleurs dans son communiqué d'avoir conclu des accords avec les distributeurs Free, SFR, Bouygues Telecom - dont TF1 est la filiale - Orange, Molotov et Salto, dont TF1 est un des actionnaires. "La même proposition a été faite à tous les opérateurs", précise à puremedias.com une source proche du dossier. A la mi-journée, dans un reportage du "13 Heures" consacré au sujet, la chaîne s'est fait fort de souligner que ce contrat "rétribue en partie le milliard d'euros investi par TF1 dans la création de contenus, fictions, divertissement ou information".
Les conséquences de l'arrêt de la diffusion des chaînes du groupe Canal+ seront visibles dès aujourd'hui sur les audiences de TF1. Pour rappel, Canal+ représente entre 12% et 15% de son audience globale. A noter que cette coupure concerne également le service TNT Sat par lequel Canal+ assure la diffusion des chaînes de la TNT dans les zones blanches, une obligation pourtant encadrée par la loi. Compte tenu des circonstances, il est donc possible que le "20 Heures" de France 2 soit par exemple devant celui de TF1 ce soir. Vendredi dernier, il y avait moins de 600.000 téléspectateurs d'écart entre les journaux d'Anne-Claire Coudray et de Thomas Sotto.
Pour de bons connaisseurs du dossier interrogés par puremedias.com, le fait que cette coupure intervient alors que l'Autorité de la concurrence mènera dès le début de la semaine prochaine les auditions des différentes parties prenantes dans le cadre du projet de fusion TF1/M6, est tout sauf anodin. D'autant que les négociations auraient débuté dès le printemps dernier. Le communiqué de Canal+ déplore la "position dominante" de la filiale du groupe Bouygues. Entre les lignes, Canal sous-entend donc que le rapprochement avec le deuxième groupe privé français, M6, ne ferait qu'accroître cette position...
Mais comme le relève "Le Figaro", le groupe Bouygues a d'ores et déjà proposé à l'Autorité de la concurrence que les contrats de distribution qui courent en moyenne sur quatre ans et sont prolongeables d'un an à l'initiative des distributeurs, puissent l'être dans les mêmes conditions pendant une année supplémentaire.
Deux rendez-vous attendent l'équipe de France de football ce mois-ci, dans le cadre de la Ligue des nations. Le 22 septembre, pour suivre France/Autriche, les téléspectateurs auront rendez-vous sur M6. Il n'y aura donc pas de problème. En revanche, trois jours plus tard, le 25 septembre, ce sera au tour de TF1 de diffuser en exclusivité le match opposant la France au Danemark. Si le conflit entre les deux parties n'est pas résolu d'ici là, les abonnés de Canal+ feront face à un écran noir. Et pour la Coupe du monde, dont le coup d'envoi sera donné le 20 novembre prochain, avec la diffusion de 28 affiches sur TF1, Canal+ souligne dans son communiqué qu'il sera possible de suivre l'intégralité de la compétition grâce à son partenariat avec beIN Sports.
C'est LA grande question. En mars 2018, le précédent conflit avait duré une semaine. Face notamment à la pression de la ministre de la Culture d'alors, Françoise Nyssen, le groupe Canal+ avait fini par rétablir le signal des chaînes. Mais il avait fallu attendre le mois de novembre 2018 pour que les deux groupes privés parviennent à un accord en bonne et due forme. Cette fois, personne ne se risque à un pronostic et Canal+, en évoquant dès aujourd'hui la perspective de la Coupe du monde de football, anticipe déjà la possibilité que le conflit puisse s'étendre sur plusieurs mois.
Cependant comme l'a relevé ce matin dans un communiqué le cabinet spécialisé NPA Conseil, "les marchés financiers ne semblent pas anticiper sur un conflit durable et/ou sur des effets notables : à 10h30, ce vendredi, l'action TF1 était en hausse, à +0,4% et celle de Vivendi était à peu près alignée sur l'ensemble du marché (+0,614% contre +0,69% pour le CAC 40)". Signe que TF1 veut éviter l'enlisement du dossier : l'appel lancé dans "Le Parisien" par Didier Casas, secrétaire général du groupe, qui appelle Canal+ "à revenir à la table des négociations". Dans le camp opposé, on indique à puremedias.com que "le dialogue se poursuit".
En attendant le rétablissement du signal, plusieurs solutions s'ouvrent aux téléspectateurs, à commencer par la TNT, qui offre un accès gratuit aux chaînes. TF1, TMC et leurs petites soeurs sont aussi accessibles de la même manière sur le site de myTF1 et, moyennant un abonnement, chez les opérateurs ayant conclu un accord avec le groupe ou sur des plateformes comme Molotov ou Salto.