Payer en cash plutôt qu'en réputation. Hier aux États-Unis devait s'ouvrir un procès historique opposant la chaîne d'information conservatrice Fox News à l'entreprise Dominion. En cause, des théories relayées à l'antenne pendant la présidentielle de 2020 où il était sous-entendu que les appareils utilisés pour voter électroniquement aient été trafiqués pour faire perdre Donald Trump. Une contre-vérité partagée par le camp républicain, mais aussi les éditorialistes de la chaîne, qui jetaient l'opprobre sur Dominion, l'entreprise fournissant les machines.
S'estimant diffamée, la société a donc attaqué devant les tribunaux la chaîne. Elle réclamait 1,6 milliard de dollars en dommages et intérêts. Il y a quelques semaines, la justice avait confirmé la tenue de ce procès après avoir déterminé que les accusations de fraude étaient infondées. Mais à la surprise générale, le "procès en diffamation du siècle" comme l'a nommé le "New York Times" n'a pas eu lieu. Une heure après ce qui devait être l'ouverture de la séance, les deux parties ont annoncé d'avoir atteint un accord. Plutôt que de s'étaler devant la justice, Fox News a accepté de payer 787,5 millions de dollars à Dominion, évitant ainsi le procès.
"Nous sommes heureux d'être parvenus à un règlement de notre différend avec Dominion Voting Systems. Nous reconnaissons la décision de la Cour qui a trouvé que certaines déclarations à propos de Dominion étaient fausses. Ce marché reflète l'attachement de Fox News à un engagement continu en faveur des normes journalistiques les plus élevées", a déclaré la chaîne conservatrice dans un communiqué. De son côté, John Poulos, le patron de Dominion, a déclaré que Fox News avait "admis avoir raconté des mensonges" qui ont "causé de dégâts énormes à mon entreprise, à nos employés et à nos clients". "Rien ne peut réparer cela", a-t-il ajouté.
Les observateurs américains estiment que Fox News a préféré payer une large somme plutôt que de voir ses dirigeants et animateurs vedette se présenter à la barre et admettre avoir menti. Des conversations fuitées ces dernières semaines montraient en effet qu'à tous les niveaux, y compris celui du dirigeant Rupert Murdoch, tous savaient que les accusations de fraude étaient infondées. Ce qui n'a pas empêché la chaîne de les diffuser.
Pour Fox News l'enjeu est donc celui de la crédibilité. L'entreprise a engagé une campagne marketing dans les journaux américains pour redorer son image. Mais comme l'a montré une enquête relayée par "Variety", une partie de la confiance avec les téléspectateurs est déjà effritée. Tout n'est cependant pas terminé, après Dominion, Fox News va devoir affronter en justice la société Smartmatic, qui l'accuse de faits similaires.